Bienvenue chez perturbateurs-dépôt !

Publié le 15 septembre 2018
Écrit par Sylvie Leblanc, n.d.

Bienvenue chez perturbateurs-dépôt !
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Avec la belle saison, nous sommes gourmands de temps à déguster et de liberté dans nos mouvements.

 

Nous sommes souvent tentés par des éléments et une alimentation plus « pratiques » qui nous font gagner du temps, afin de profiter au maximum de l’été et de l’automne. Dans ces multiples petits choix que nous faisons pour simplifier nos déplacements en cette période estivale, sans le savoir, plusieurs molécules peuvent s’accumuler et venir à la longue perturber le fragile équilibre hormonal des petits et des grands.

Qu’il s’agisse des emballages pour les boîtes à lunch, des bouteilles en plastique, des produits de soins personnels (par exemple des crèmes solaires, des shampoings, des dentifrices, etc.), de certaines composantes de mobilier ou de certains produits d’entretien ménager, plusieurs produits contiennent ce que l’on appelle des « perturbateurs endocriniens ».

 

Qu’est-ce qu’un perturbateur endocrinien ?

Les perturbateurs endocriniens sont des substances chimiques, étrangères à l’organisme, qui peuvent interférer avec le fonctionnement du système endocrinien et produire ainsi des effets sur l’organisme. Ils influent généralement négativement sur les processus de synthèse, de sécrétion, de transport, de stockage, de libération, d’action ou d’élimination des hormones. Lorsque l’on mentionne le terme « hormone », il peut s’agir aussi de sécrétions provenant de la glande thyroïde, des glandes parathyroïdes qui coiffent la thyroïde, du pancréas, des glandes surrénales (les glandes du stress), etc.

Les perturbateurs endocriniens pourraient induire des problèmes de santé comme l’infertilité, un développement anormal du fœtus, une puberté précoce, des cancers, le diabète, l’obésité, des problèmes neurologiques, des troubles d’apprentissage, et bien d’autres.

Il existe des pistes de la présence de perturbateurs hormonaux dans notre environnement et dans notre alimentation.

Au début du mois de mars, un reportage de Radio-Canada a permis de lever le voile au grand public à cet effet. Il est fait mention dans ce documentaire que plusieurs recherches se sont penchées sur la toxicité des néonicotinoïdes pour les abeilles, mais presque aucune pour les humains. Pour une des premières fois dans le monde, une étude de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) propose une compréhension de leur impact potentiel sur la santé humaine. La chercheuse québécoise Élyse Caron-Beaudoin a travaillé plus de cinq ans sur le sujet des néonicotinoïdes et leurs effets sur la santé et sur l’équilibre hormonal, particulièrement chez la femme.

Selon cette chercheuse, « la réalité, c’est que la population humaine est exposée à une myriade de contaminants différents, en mélange, en combinaison. Et dans une optique d’analyse du risque, l’idéal serait d’évaluer les effets et la toxicité des mélanges de ces contaminants. »

Elle ajoute : « Les résultats démontrent que la présence des néonics a perturbé la production d’œstrogènes. » Or, rappelle Élyse Caron-Beaudoin, « pendant la grossesse, tout est une question d’équilibre. Une perturbation de la production d’œstrogènes de la femme enceinte est associée à des problèmes de santé : plus petit poids du bébé à la naissance ou plus petite circonférence de la tête. » Cela va plus loin.

Plus des deux tiers des cancers du sein sont d’origine hormonale. Les traitements consistent souvent à tenter de freiner la production d’œstrogènes, par exemple chez des femmes ménopausées. Toutefois, les résultats de l’étude menée dans le laboratoire de l’INRS montrent que des concentrations assez faibles de néonicotinoïdes ont eu pour effet d’augmenter la production de l’aromatase, une enzyme clé dans la production d’œstrogènes. « Plus il y a production d’œstrogènes, plus les cellules vont se diviser, et donc plus le cancer peut se développer rapidement », explique Élyse Caron-Beaudoin.

On retrouve les néonicotinoïdes dans 99 % des champs de maïs et de canola, et dans la moitié des cultures de soya du Québec. En plus des pollinisateurs, comme les abeilles, ils menacent aussi les vers de terre, les oiseaux et les poissons.

Voici une des rares certitudes liées aux pesticides perturbateurs endocriniens touchant nos choix alimentaires : consommez le plus possible d’aliments biologiques, de produits cultivés localement ici, au Québec. Pour ce qui est des aliments biologiques produits outremer, les cahiers des charges peuvent différer grandement.

Dans une parution de La Presse+ du 10 mars 2018, Stéphanie Bérubé relatait qu’une équipe de l’Université de Montréal a évalué la concentration de certains pesticides dans l’eau de surface de cours d’eau du Québec ainsi que dans l’eau du robinet. Les chercheurs ont aussi trouvé des traces de ces insecticides systémiques controversés presque partout, y compris dans l’eau de Montréal et de Laval. Bienvenue chez « Perturbateurs-Dépôt ! ». Selon plusieurs sites, on compte parmi les molécules qui pourraient imiter (selon les sites mentionnés en références) les œstrogènes et qui seraient à surveiller les suivantes : les néonicotinoïdes, les alkylphénols, les BHA et BHT, les bisphénols A (BPA), le cadmium,

les parabènes, les phtalates, les téflons et composés perfluorés (PFC). D’autres molécules pourraient influencer la production et les fonctions de la glande thyroïde, comme le triclosan, les phtalates, le mercure, les ignifuges bromés (PBDE), interdits en Californie et bannis en Europe depuis 2004, etc.

Alors, si vous croyez que seules les hormones de synthèse peuvent faire valser vos taux d’hormones, je suis désolée de « péter votre bulle », il y a des perturbateurs endocriniens cachés un peu partout dans les matériaux de construction, dans certaines composantes de mobilier, dans la majorité des produits d’entretien ménager qui ne sont pas dits « écologiques », dans de nombreux produits de soins personnels, dans les additifs alimentaires et, comme les recherches le dévoilent, dans plusieurs pesticides et dans certains engrais de synthèse, entre autres.

Saviez-vous que plusieurs jeunes hommes, actuellement, pourraient avoir un taux de fertilité moindre que les générations précédentes ? Chez les femmes, il y a malheureusement de plus en plus de fausses couches, qui sont un évènement difficile. Il faut donc éviter le plus possible ces perturbateurs endocriniens dans la nourriture et dans votre environnement immédiat : évitez tous les produits d’entretien qui contiennent des perturbateurs endocriniens, ayez une alimentation biologique le plus possible, etc.

Les Européens parlent de « contaminants environnementaux », particulièrement en France, où les études sur ces perturbateurs sont nettement plus importantes. D’ailleurs, l’UE est en cours d’élaboration d’un règlement à propos de ces composantes. Deux études françaises ou cohortes d’études portant sur les effets pervers de certaines molécules de synthèse se démarquent, dont la cohorte ELFE, lancée en 2011. Son objectif principal est l’étude des déterminants environnementaux et sociétaux qui, de la période intra-utérine à l’adolescence, peuvent affecter le développement et la santé des enfants. Elle consiste en un suivi de 20 000 enfants nés en 2011 et fait suite à la cohorte PELAGIE. La cohorte PELAGIE a été lancée en 2002, en France. PELAGIE vise à étudier l’impact de contaminants environnementaux sur le développement intra-utérin, puis sur celui de l’enfant. Elle suit 3500 mères-enfants.

Comment se fait-il qu’ici, en Amérique du Nord, nos familles soient tenues dans l’ombre de ces « déterminants environnementaux » ou, en d’autres termes, « perturbateurs hormonaux », à l’heure où le ruban rose est maintenant presque un outil de commercialisation et que des irrégularités de la glande thyroïde et des cancers hormonodépendants sont des problèmes de santé notoires ? J’ai rencontré beaucoup de femmes inquiètes qui se questionnaient sur leur consommation de produits à base de soya, comme si elles participaient au jeu de la roulette russe, après un cancer du sein ou hormonodépendant. Avons-nous déplacé le réel éléphant dans la pièce pour ce qui est du surplus d’œstrogènes?

Alors, j’ose ici poser une question aux libres penseurs qui dénigrent le soya en raison de certains aspects associés aux stéroïdes : est-il possible que l’utilisation des néonicotinoïdes, « déterminants environnementaux » ou « perturbateurs hormonaux », présents dans les cultures de soya avec OGM soit plus à pointer du doigt que les composantes naturelles du soya biologique ? Est-ce possible de mettre en proportion ici les valeurs salutaires, nutritionnelles et antioxydantes du soya biologique comparativement aux traitements non naturels des semences du soya trafiquées à l’aide d’OGM et les pesticides avec néonicotinoïdes qui font partie de ces méthodes de culture ?

Finalement, le retour des pratiques et des produits de souches écologiques, biologiques, naturelles est bon pour nous, les humains, les abeilles, la faune, la flore, mais surtout bon pour préserver un petit capital pour les générations futures, dans toutes les sphères d’activités.

Je rêve du jour où, chez mon épicier, dans une boutique d’aliments naturels ou dans un comptoir de légumes frais, je pourrai acheter 13 épis de maïs bio à la douzaine, pour le déguster sans présence de pesticides, d’OGM, etc. Dites-moi, que serait l’été sans cette céréale que l’on consomme avec tant de convivialité en présence d’amis et de notre famille ! Pour le moment, cette denrée est encore difficile à trouver…

Depuis nombre d’années, je vous invite à la consommation, le plus possible, d’aliments biologiques qui sont, en règle générale et selon les cahiers de productions biologiques au Québec, exempts de pesticides, d’OGM, etc. Il en sera ainsi, tant et aussi longtemps que le gouvernement fédéral (Santé Canada) n’exigera pas un étiquetage obligatoire pour les aliments contenants des OGM et des pesticides.

Si vous êtes des adeptes des marchés d’été, d’une alimentation plus fraîche, locale, exigez des aliments et des produits sains, sans pesticides et cultivés au Québec.

Et si, à la lecture d’étiquettes, d’ingrédients qui composent un aliment ou un produit, vous vous ennuyez cruellement de votre cours de chimie 201, dans le doute, abstenez-vous !

Si plus de gens calculaient les additifs chimiques présents sur les emballages ou dans nos aliments au lieu des calories, nous serions, ainsi que notre planète, nettement en meilleure santé globale ! Bonne fin d’été, en santé !

 

RÉFÉRENCES

http://www.sabotage-hormonal.org/spip.php, article 17

http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1087515/etude-recherche-quebecoise-inrs-effet-femmes-sante-pesticides-tueurs-abeilles-neonicotinoides

http://invs.santepubliquefrance.fr/Dossiers-thema- tiques/Environnement-et-sante/Cohorte-Elfe