Publié le 1 juin 2024
Écrit par Par Sarah-Maria LeBlanc, HTA, M.A.
Connaissez-vous les perturbateurs endocriniens ? Bien que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ait publié, il y a plus de 10 ans, un rapport qui fait état de leur existence et de leurs impacts importants sur la santé publique, ils sont encore banalisés et plutôt méconnus du grand public. Dès les débuts de ma pratique comme herboriste-thérapeute, j’ai dû faire face aux dommages importants qu’ils créent, notamment au niveau de la santé des femmes, menaçant non seulement notre santé reproductive, hormonale et gynécologique, mais également celle de nos filles et de nos garçons, et même de leur descendance. Nous verrons aujourd’hui ce que sont exactement ces derniers et comment les plantes médicinales peuvent nous aider à nous en protéger.
Il existe plusieurs types de perturbateurs endocriniens. Ceux qui m’intéressent aujourd’hui sont les xénoestrogènes. Provenant de sources diverses (voir l’encadré), ce sont des composés chimiques qui modifient notre équilibre hormonal, en agissant principalement sur nos récepteurs hormonaux. Les xénoestrogènes se fixent sur ces récepteurs d’estrogènes (ERα et ERβ) et activent une réponse hormonale : soit ils imitent les estrogènes (hormonomimétisme), soit ils bloquent l’accès aux vrais estrogènes (antagonistes), perturbant la production et le métabolisme de nos hormones. Ces molécules peuvent altérer plusieurs processus physiologiques dans tous les règnes du vivant, dont le nôtre, les humains. Les effets seront variables selon différents types de facteurs : le terrain de la personne, bien sûr, mais également la durée d’exposition, la dose et le mélange de différentes molécules. À titre d’exemple, des chercheurs français (V. Delfosse, et autres, 2015) ont testé les interactions entre 40 molécules issues de pesticides, de polluants environnementaux et de médicaments. Deux d’entre elles (un pesticide organochloré largement utilisé et un estrogène de synthèse communément prescrit) mélangées se sont révélées de 10 à 50 fois plus puissantes que les deux étudiées séparément ! Pourtant, nous sommes exposés à des dizaines de ces composés tous les jours…
Où on les retrouve et leur impact
Ces molécules sont présentes dans tous les plastiques : plats de conservation, bouteilles d’eau en plastique (même sans BPA), pellicule, ustensiles de cuisine et tant d’autres produits de consommation courante. On retrouve même du bisphénol A (BPA) dans les reçus de caisse thermiques : en 2014, des chercheurs (Hormann, Vom Saal, et autres) nous apprenaient que leur manipulation pouvait transférer des quantités importantes de BPA sur les mains, entrer par les pores de peau et contaminer notre nourriture. Puis viennent nos cosmétiques, nos produits d’hygiène personnelle, nos produits de nettoyage. Sans oublier les fruits et légumes non biologiques, à cause des pesticides, des herbicides et des fongicides. Nous les buvons aussi dans l’eau du robinet, puisque les systèmes de filtration n’ont pas souvent les technologies adaptées à cette réalité. Nous les ingérons parfois dans les poissons de nos mers, dans les viandes (bœuf, veau et poulet) non biologiques. Dans mon livre J’aime mes hormones, je dresse une liste à cocher des différents perturbateurs.
Le problème, c’est que ces perturbateurs sont très difficiles à éliminer pour notre organisme. Ils sont beaucoup plus puissants que nos hormones naturelles. Ils se fixent sur nos sites récepteurs hormonaux et ne s’en délogent pas, s’accumulant lentement… Il suffit d’imaginer des invités parasites qui prennent beaucoup de place sur le sofa et qui ne veulent plus décoller de là, et, lorsque les hôtes de la maison arrivent pour reprendre leur place, ils ne l’ont plus… et ça se reproduit sans cesse, créant du chaos dans notre maison. Pour revenir à notre corps, la situation pourra être aggravée selon le terrain digestif de la personne – notamment le métabolisme du foie et la condition des intestins.
Si les impacts les plus connus sont la puberté précoce chez les filles, la perte d’hormones androgènes chez les garçons et la diminution de la fertilité, leur impact supposé est beaucoup plus large. On peut parler de facteurs importants dans le dérèglement de la thyroïde et du cycle menstruel, de l’intensification des signes de périménopause et de troubles du système reproducteur tels que des fibromes, de l’endométriose ou un adénocarcinome du vagin. Enfin, et c’est ce qui est le plus troublant, ils sont cancérigènes, ils agissent au cœur même des cellules. Ils augmentent les facteurs de risques du cancer du sein, des ovaires et de l’utérus. Quant à vous, messieurs, vous n’êtes pas en reste : oligospermie (faible quantité de spermatozoïdes), baisse de plus de 50 % de la qualité des spermatozoïdes, cancer des testicules et hyperplasie de la prostate chez les hommes adultes peuvent aussi être reliés à l’impact des perturbateurs endocriniens. Sans oublier leur impact sur des troubles comme l’obésité, le diabète, les problèmes digestifs et même cardiovasculaires. Conclusion : ces molécules modifient lentement et insidieusement notre fonctionnement hormonal et nous laissent avec de graves problèmes de santé publique. N’est-ce pas assez troublant pour nous convaincre d’agir ? Pour notre santé et celle de nos enfants.
Les solutions
Heureusement, nous pouvons dresser la liste des possibles perturbateurs endocriniens de notre maisonnée et graduellement les éliminer. Il y a également des plantes et des aliments qui peuvent nous aider. Ainsi, les brassicacées (familles des choux) s’avèrent protectrices de notre santé hormonale, en soutenant la détoxification des « mauvaises » estrogènes. On parle également des fibres, qui empêchent la recaptation des estrogènes par l’intestin et diminuent le gras, contribuant ainsi à ne pas créer de sites favorables à la conversion de l’estrogène. Et, bien sûr, elles aident à l’élimination, ce qui contribue à dire adieu aux xénoestrogènes ! Ensuite, on parle des phytoestrogènes, estimés de 100 à 500 fois moins forts que les estrogènes de notre corps. J’en parlerai dans la seconde partie de cet article. Enfin, il y a certaines plantes qui peuvent nous aider à éliminer les xénoestrogènes de notre vie. Le foie assume plus de 50 % du métabolisme des estrogènes. Les plantes qui agissent sur le foie vont donc toutes, à des degrés différents, aider l’excrétion des xénoestrogènes.
Les plantes et les familles de plantes présentées ici ne sont que quelques-unes des alliées végétales qui aident notre corps à se protéger des perturbateurs endocriniens et à faciliter leur élimination. Dire oui à sa pleine santé, c’est dire non aux perturbateurs endocriniens. Ça demande du courage, de la patience et de la détermination, mais les nouvelles habitudes se prennent, et les changements se font sentir, jusque dans nos humeurs ! Osons entreprendre cette voie, pour la santé de nos systèmes reproducteurs masculin et féminin, mais aussi pour la santé… de nos enfants.
Toutes les références sont disponibles sur demande.