Douleur articulaire : se rétablir d’un coude du golfeur

Publié le 20 mai 2019
Écrit par Nicolas Blanchette, B. Sc. kinésiologie, D.O.

Douleur articulaire : se rétablir d’un coude du golfeur

Le début de la saison de golf est à nos portes. Profitons-en pour parler d’une problématique du coude qui porte justement le nom de ce sport.

 

L’épicondylopathie médiale, ou coude du golfeur, est une pathologie du coude de la classe des tendinopathies. Cette pathologie articulaire commune touche non seulement les golfeurs, mais aussi et surtout les gens qui occupent un emploi ou qui pratiquent des loisirs nécessitant des mouvements répétitifs des avant-bras, du poignet et des doigts : les mécaniciens, les cuisiniers, les travailleurs de la construction, les alpinistes, etc. Le coude du golfeur se caractérise par des douleurs ressenties à la petite saillie osseuse du côté interne du coude (cette structure anatomique se nomme « épicondyle médiale », ou « épitrochlée »).

 

Coude du golfeur

Cette blessure est la sœur jumelle du plus populaire coude du joueur de tennis, dont on entend fréquemment parler. Lors de ce dernier, c’est la partie externe (latérale) du coude qui est source d’inconfort. Or, les deux tendinopathies partagent bien des points en commun dans la façon de les prendre en charge.

Quelque peu ironiquement, bien que le coude du joueur de tennis affectait plus souvent les joueurs de tennis des décennies précédentes, les joueurs de tennis modernes sont davantage incommodés par le coude du golfeur. Et les golfeurs modernes sont statistiquement plus affectés par le coude du joueur de tennis ! Malgré ce trait quelque peu comique, la condition n’en demeure pas moins dérangeante, et il vaut mieux bien la comprendre pour être capable de se rétablir adéquatement.

  

Blessure de surusage

Le coude du golfeur appartient à la classe des épicondylites et, plus largement, des tendinites. Malgré le suffixe « ite », toujours utilisé dans le langage populaire, l’inflammation du tendon, comme l’ont montré les dernières études, joue souvent un faible rôle quant à la présence des douleurs, surtout si ces dernières sont chroniques (« tendinopathie » est une dénomination plus juste). Cependant, si vous éprouvez une douleur importante et inhabituelle après avoir pratiqué un sport ou réalisé un effort physique, il y a peut-être de l’inflammation. Si c’est le cas, il est conseillé d’appliquer de la glace pendant une quinzaine de minutes, par-dessus une serviette humide placée sur la région douloureuse.

On associerait davantage la sensation douloureuse à une hypersensibilisation de la région, causée par l’installation de changement dégénératif dans les tendons lié à des microtraumatismes par accumulation. De manière plus simple, la majorité du temps, un volume de travail trop important ou une charge de travail ayant progressé trop rapidement dans le temps sont en cause. Plus rarement, la blessure découle d’un traumatisme direct au coude.

L’épicondyle médial du coude (ou épitrochlée), cette pointe osseuse qui fait mal lors du coude du golfeur, est le point de départ de plusieurs structures importantes. On y retrouve le ligament collatéral ulnaire, stabilisateur important du coude. Du côté musculaire, le tendon du muscle rond pronateur s’y attache. C’est l’un des muscles qui vous permet d’effectuer des rotations de l’avant-bras (à coude fléchi en apportant la paume de la main en direction du plancher). Il est donc très utilisé dans tous les mouvements de vissage et dévissage. Autre élément important : le muscle rond pronateur est en proximité étroite avec le nerf médian. Ce nerf apporte les sensations de la partie palmaire du pouce, de l’index et du majeur. Il fournit aussi la force à une partie des muscles du poignet et des doigts. Des engourdissements de ces régions ou des sensations de décharges électriques douloureux sont souvent un signe de contraintes touchant le nerf médian (ce sont aussi les signes du fameux syndrome du tunnel carpien, le rond pronateur étant parfois l’un des sites de compression de ce nerf lors de ce syndrome).

Outre le rond pronateur, le tendon commun des muscles fléchisseurs du poignet et des doigts s’y retrouve (un tendon qui rejoint ensuite quatre muscles bien distincts). Si vous placez votre bras devant vous, paume vers le haut, ces muscles vous permettront de ramener le poignet vers vous (flexion) et de serrer les doigts comme pour faire un poing (préhension). On peut d’ailleurs palper ces muscles aisément en réalisant ce mouvement. Les fléchisseurs de l’avant-bras sont très sollicités par tout mouvement demandant la préhension (tenir les objets vigoureusement) et la stabilisation du poignet nécessaire au maniement de charges.

Pour connaître si l’une ou l’autre de ces structures est en cause dans le coude du golfeur de son client, le thérapeute devra réaliser des tests pour valider la force de chacune des fonctions de ces muscles. Lorsqu’un test d’effort musculaire spécifique répond par de la douleur (fléchir le poignet, étendre le coude, dévier le poignet, tourner l’avant-bras, etc.), c’est généralement signe que le traitement doit commencer à cet endroit.

 

Prise en charge de la condition

Dans le stade aigu, et puisqu’il s’agit d’une blessure de surusage, la première étape consiste à mettre l’articulation au repos. Sans immobiliser le coude, prenez du repos pendant quelques jours, si nécessaire, de toute activité sollicitant fortement les avant-bras. Profitez-en pour consulter votre médecin afin d’être certain qu’il ne s’agit pas d’une autre pathologie ou afin d’obtenir des médicaments de soutien, si nécessaire. Une orthèse pour le coude du golfeur peut également aider à soulager les symptômes initiaux. Lorsque la douleur principale s’est calmée, il est de mise d’entamer un petit programme d’exercices de mobilisation et de renforcement du coude et du poignet.

 

Importance du renforcement excentrique dans les tendinopathies

On appelle « phase excentrique » la partie d’un mouvement qui consiste à retenir une charge sous contrôle. Par opposition, la phase concentrique est celle où une charge est déplacée dans l’espace de manière active. Lorsque l’on monte sur les pieds, par exemple, la phase concentrique est celle où l’on se hisse sur les orteils, tandis que la phase excentrique est le retour contrôlé vers le sol.

Dans la littérature scientifique, les exercices excentriques ont montré leur efficacité dans les programmes de réhabilitation de nombreuses tendinopathies. Ils permettent des adaptations biologiques du tendon endommagé, accélérant la période de récupération. Le coude du golfeur n’y fait pas exception.

Pour réaliser l’exercice, installez-vous en position assise et déposez votre avant-bras sur votre cuisse, paume vers le haut. Laissez votre poignet dépasser dans le vide, de sorte qu’il ne soit pas bloqué par votre genou. Avec un petit poids dans la main (une charge de 5 lb, par exemple, pour commencer), réalisez une flexion du poignet en ramenant le poids vers vous. Si le geste est trop douloureux, aidez-vous avec votre autre main. Faites 3 séries de 15 répétitions par jour en retenant la charge pendant 3 à 5 secondes lors de la descente. Augmentez la charge graduellement au fil des semaines. Il est correct de ressentir une certaine douleur.

Par contre, celle-ci doit être disparue le lendemain. Si une légère douleur est présente, mais n’augmente pas d’une journée à l’autre, cela vous indique que vous utilisez la charge appropriée. Vous viendrez ainsi à bout du problème et réduirez vos risques de récidives, car vos muscles seront plus forts.

 

Un facteur cervical ?

Selon l’ostéopathe Robert Maigne, deux épicondylites sur trois présenteraient, à un degré variable, une implication cervicale qui facilite la condition et hypersensibilise les nerfs impliqués dans le coude du golfeur. Selon Spinner, chirurgien orthopédique, il arrive que le traitement d’un cou arthrosique soit suffisant pour améliorer considérablement les symptômes d’un coude douloureux ou du syndrome du tunnel carpien. Il peut donc être pertinent d’obtenir l’aide d’un thérapeute manuel (ostéopathe, physiothérapeute, chiro-praticien, kinésithérapeute, etc.) dans la gestion de la condition pour avoir une perspective globale et, si nécessaire, pour obtenir davantage d’exercices afin de vous aider à mettre cette problématique derrière vous.

 

Prévenir les récidives

L’apparition du coude du golfeur peut être facilitée par une utilisation inappropriée de l’articulation liée à une faute technique. Si la condition est liée à la pratique d’un sport, il sera donc important d’être supervisé pendant quelques séances par un professionnel afin de s’assurer que la technique est aussi impeccable que possible. La façon de tenir le bâton de golf ou la raquette peut être en cause dans cette pathologie.

Idéalement, il faut augmenter graduellement la période d’activité sportive à travers les semaines. La problématique apparaît fréquemment lorsque, après avoir été inactif pendant plusieurs mois, on reprend l’activité physique là où on l’avait laissée l’année dernière. Rappelez-vous que les tendons s’adaptent progressivement à de nouveaux stress. Il faut donc, de préférence, se garder une petite gêne lors des premières semaines de la reprise de l’activité.

 

RÉFÉRENCES

HAMMER, W. Functional Soft-Tissue examination and Treatment by Manual Methods, 3e édition, Jones and Bartlett Publishers, 2007.

SPINNER, Management of peripheral nerve problem, George E. Omer.