
Publié le 1 mai 2025
Écrit par Nicolas Blanchette, ostéopathe, B.Sc. Kin. spécialisé
Les tendinopathies du coude sont des pathologies musculosquelettiques désagréables et malheureusement fréquentes. En effet, on estime que 1 % à 3 % de la population adulte en souffrirait actuellement. La prévalence de cette pathologie est plus élevée chez les personnes âgées de 30 à 50 ans. Elle touche davantage les personnes qui pratiquent des activités impliquant des mouvements répétitifs du coude, comme certains sports tels que le tennis et le golf. Les personnes dont l’emploi nécessite des travaux manuels ou des gestes répétitifs sont plus susceptibles de souffrir de cette affection. Cette pathologie est, la plupart du temps, identifiée sur la base d’un examen clinique uniquement. Afin de préciser le diagnostic, on peut avoir recours à l’échographie.
Les deux formes de tendinopathies du coude les plus fréquentes sont l’épicondylite latérale et l’épicondylite médiale. Toutes deux impliquent l’irritation d’un ou de plusieurs tendons issus des groupes musculaires s’insérant sur le coude. Le groupe des muscles extenseurs, qui permet de redresser les doigts et le poignet, s’insère sur la partie latérale de l’humérus. Lorsque le site de douleur se trouve sur la pointe extérieure du coude (du même côté que le pouce quand la paume est tournée vers le plafond) on parle d’épicondylite latérale, fréquemment aussi appelé tennis elbow. Lorsque le site problématique se trouve sur la pointe interne (du côté du petit doigt, toujours la paume vers le plafond), il s’agit d’une épicondylite médiale, aussi surnommée golf elbow. Il est possible de souffrir des deux formes de tendinite en même temps.
Signes et symptômes
La douleur ressentie est habituellement sourde et lancinante au repos. Elle devient plus intense lors des activités qui sollicitent la musculature du tendon concerné, comme tenir un objet à bout de bras, agripper fermement, écrire avec un crayon ou un clavier. Lorsque les limitations persistent longtemps, on peut perdre de l’endurance pour les tâches nécessitant l’avant-bras et la main. Il est habituellement possible de reproduire la douleur en appuyant tout près de la pointe du coude latérale ou médiale, là où le tendon s’insère sur l’os.
Développement de la pathologie
La genèse de cette blessure est souvent associée à un déséquilibre entre, d’une part, une sollicitation excessive de la musculature qui contrôle le poignet et les doigts ou, d’autre part, une capacité de récupération compromise de la personne qui développe ce trouble. Des efforts trop intenses ou trop prolongés sont souvent responsables de l’apparition initiale de l’épicondylite.
Toutefois, peut-être paradoxalement, la littérature révèle que solliciter trop peu l’articulation est aussi un facteur de risque de développer cette tendinopathie. Comme pour les autres tendinites, il est possible de développer une épicondylalgie en raison de facteurs métaboliques liés aux habitudes de vie telle que la sédentarité. Bref, quand il s’agit d’exercices, trop c’est comme pas assez!
Prise en charge
Même si l’épicondylite est fréquente, elle se soigne généralement bien pourvu qu’on adopte les bons comportements et que l’on fasse preuve d’un peu de patience. Les études récentes révèlent qu’environ 80 % des gens récupéreront complètement avec des modalités conventionnelles comme la gestion des activités aggravantes et la réalisation d’exercices. En règle générale, plus la pathologie perdure, plus cela peut prendre de temps pour la désamorcer. Par exemple, la forme aiguë prend environ 6 à 12 semaines à guérir, tandis que la forme persistante peut prendre de trois à six mois avant que des améliorations notables soient constatées, selon les recherches.
Commencer par gérer la douleur
Initialement, plusieurs modalités peuvent nous aider à mieux gérer la douleur. Parmi celles-ci, on retrouve l’application de chaleur ou de froid, la prise de médicaments (acétaminophène ou anti-inflammatoire non stéroïdien) ou l’application de crèmes analgésiques, le port intermittent d’un bracelet épicondylien, la réalisation d’exercices isométriques (contractions contre un objet immobile), les thérapies manuelles (massage, ostéopathie, etc.) ou l’acupuncture. Également, si vous constatez que certains mouvements effectués pour votre travail ou la pratique d’un sport ont tendance à aggraver vos symptômes, il faudra songer à réorganiser votre horaire, votre environnement de travail ou votre intensité à l’entraînement pendant la période de guérison. Dans de rares cas aigus, l’injection de cortisone peut aussi calmer les symptômes.
Puis, renforcer graduellement les tendons
Il s’agit d’une étape clé pour se rétablir d’une tendinite du coude. Une fois la douleur initiale bien gérée, il est important de s’appliquer à son reconditionnement. En effet, une étude a montré qu’une combinaison de thérapie manuelle (par exemple, le massage des muscles s’attachant au coude) et d’exercices de renforcement graduel réalisés à la maison permet d’augmenter les chances de résolution du problème et d’améliorer la gestion de la douleur et la fonctionnalité chez les gens atteints d’une épicondylite.
Même si les mécanismes physiologiques exacts responsables de ces améliorations sont encore mal compris, réaliser des exercices de renforcement graduel demeure peu couteux, autant en temps qu’en argent, ce qui en fait un outil thérapeutique fort intéressant.
En général, on devrait commencer à réaliser des exercices de renforcement lorsque la douleur au repos est disparue ou faible et que la douleur en réalisant les exercices demeure bien gérable (par exemple, pas plus que 3 sur 10 sur une échelle d’intensité de la douleur). Les exercices de renforcement, lorsque faits avec suffisamment d’intensité, soit assez pour créer de la fatigue, devraient être réalisés environ trois fois par semaine ou une fois tous les trois jours. En effet, une étude récente a démontré qu’un tendon peut mettre jusqu’à 72 heures pour récupérer après une sollicitation importante par l’exercice.
La sélection d’exercices sera différente selon si l’on cherche à se rétablir d’une épicondylite latérale ou médiale. Pour la première, ce sont les tendons des extenseurs qu’il faudra renforcer très graduellement. Des extensions des poignets avec de petits poids libre ou encore des extensions des doigts avec un élastique conçu à cet effet sont souvent les exercices les plus utiles.
Quant à l’épicondylite médiale, elle nécessitera un renforcement des muscles responsables de fléchir le poignet et de serrer les doigts. Des poids libres et des poignées pour travailler votre force de préhension pourront vous aider à vous rétablir. Dans les deux cas, l’augmentation du nombre de répétitions et les charges utilisées doit être très graduelle afin de renforcer les tendons tout en continuant de contrôler la douleur. Il est normal que vos symptômes augmentent légèrement après une séance d’exercices. Toutefois, ils devraient revenir au niveau de base dans une période inférieure à 24 heures. Si ce n’est pas le cas, c’est probablement un signe que l’intensité des exercices est trop élevée pour le moment. Ne vous découragez surtout pas. Diminuez un peu le nombre de répétitions ou la charge et recommencez lorsque la douleur sera de retour au niveau de base. Il peut être utile de consulter un physiothérapeute ou un kinésiologue pour aider à paramétrer adéquatement les exercices.
Persévérez et surtout ne vous découragez pas!
La patience est de mise avec la majorité des cas d’épicondylalgies. D’après les recherches récentes, le temps de guérison varie beaucoup parmi la population. Par exemple, une étude de 2022 a permis de montrer que, à chaque tranche de trois mois, 50 % des gens souffrant d’épicondylalgie rapportent une résolution complète ou des améliorations marquées de leurs symptômes. Autrement dit, après trois mois, 50 % des gens rapporteront aller beaucoup mieux. Trois mois plus tard, 50 % des gens qui n’ont pas eu d’améliorations au bout des trois premiers mois rapporteront à leur tour des améliorations… et ainsi de suite. Après un an, 90 % des gens étaient complètement libres de tous symptômes. Donc, oui, même si vous faites tout correctement, c’est normal si ça prend du temps. Il ne faut pas surtout pas vous décourager.
Fait intéressant, une fois que l’épicondylite est complètement « guérie », c’est-à-dire que plus aucune douleur ou limitation n’est présente, un examen par échographie démontrera encore la même lésion sur le tendon que vue initialement. Ce qu’il faut en retenir? La capacité fonctionnelle demeure, de loin, plus importante que l’aspect du tendon observé lors des examens médicaux.
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Références
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