Publié le 7 février 2022
Écrit par Anny Schneider, auteure et herboriste-thérapeute accréditée
Le mot drogue vient de l’allemand « trocknen », qui signifie « sécher ». Ceci s’applique aux plantes médicinales, ainsi accessibles toute l’année, comme aux légumes et aux fruits séchés, technique ancestrale essentielle à la survie des nomades cueilleurs-pêcheurs nordiques que furent nos ancêtres pas si lointains.
Atouts et bémols des fruits séchés
Accessibles presque partout et en toutes saisons, contrairement aux fruits frais, les fruits séchés se gardent jusqu’à un an, quand ils sont bien conservés.
Faciles à transporter, ils font le bonheur des promeneurs, des randonneurs (en ski de fond, en cette saison de luminosité retrouvée) et des autres sportifs qui requièrent beaucoup d’énergie et recherchent des aliments calorifiques, mais faciles à transporter.
Ils contiennent autour du tiers de leur poids en eau, mais sont d’autant plus concentrés en glucides, ainsi qu’en minéraux et en certaines vitamines liposolubles (A, D, E).
La plupart perdent de leur couleur au séchage, mais leur saveur est souvent plus concentrée. Il faut éviter d’acheter ceux qui sont trop colorés, car ils recèlent souvent des colorants et des sulfites potentiellement allergènes.
Par exemple, les abricots, les pêches et les mangues du commerce, toujours pré-ensachés, en contiennent presque systématiquement. Lisez les étiquettes !
Voici d’autres précautions à prendre pour profiter au maximum de leurs qualités :
Pour bien les digérer, sans ballonnements ni crampes, essayez de les consommer seuls, ou encore combinés à des graines et à des noix. Si vous les utilisez en cuisine, par exemple dans des carrés aux dattes, un gâteau aux fruits ou un « kugelhof » aux raisins, faites-les d’abord tremper dans de l’eau, de l’eau-de-vie ou du jus de fruits.
Ribambelle des fruits séchés du monde entier
Puisqu’il faut abréger ce sujet si vaste ainsi que le texte, j’escamote sciemment les petits fruits indigènes, plus rares et quasiment introuvables sur le marché traditionnel : amélanches, aronies, aubépines, camarines, chicoutés, épine-vinette, framboises, mûres, pimbinas, sorbiers, sureaux, etc. Ceux-ci ont tous été utilisés d’une manière ou d’une autre dans les pâtes de fruits ajoutées au pemmican ou à son équivalent, avec la viande séchée consommée l’hiver par nos ancêtres nomades cueilleurs.
Mais quel luxe, cette offre de variétés connaissons-nous depuis au moins un demi-siècle sur ce continent ! Gratitude pour la terre nourricière et les ouvriers qui génèrent toutes ces goûteuses ressources !
Techniques de déshydratation classiques et leurs bénéfices
Comme partout en cuisine, voire en phytothérapie, le faire soi-même est toujours meilleur.
La plupart des fruits contiennent au moins 80 % d’eau, et si la déshydratation en diminue le poids et le volume ainsi que la teneur en enzymes et en vitamines hydrosolubles, elle en concentre aussi les glucides et les minéraux.
Un déshydrateur, même petit, désormais accessible à bon prix sur le marché, est le meilleur outil, outre le soleil d’été, pour conserver et concentrer de façon durable l’essence des fruits. Sinon, un four conventionnel fonctionne aussi. Il faut nettoyer, dénoyauter et couper les fruits assez finement.
Pour préserver leurs couleurs, on peut les arroser de jus de citron. Ensuite, on doit les étaler sur une lèchefrite et laisser le four à moins de 70 ℃ pendant 5 à 10 heures, selon le fruit choisi et sa grosseur.
Une fois les fruits séchés, les entreposer dans un bocal de verre, dans un endroit sombre et sec.
Fruits séchés du monde entier, accessibles dans nos épiceries bien garnies
Abricots : fruits des climats tempérés et méditerranéens d’origine, l’abricot est un bon exemple de fruit parfois meilleur séché et réhydraté, car toujours cueilli très mûr à cet effet. Séché, on y retrouve plus de fibres, de glucides et de vitamine A. Ceux du commerce, très orangés, sont traités aux sulfites, sinon ils brunissent naturellement.
Agrumes : citron, cédrat, mandarine, orange, pamplemousse. On connaît surtout leurs écorces confites, très utilisées en pâtisserie, mais même la pulpe est utilisée. Coupés en tranches fines et séchés au four ou au déshydrateur, les agrumes se conservent au moins une année. Délicieux dans un gâteau, sinon dans une tisane ou un punch aux fruits, leur zeste ajoute un goût fruité spécifique à chaque espèce.
Ananas : faits avec des fruits très mûrs et frais, les ananas déshydratés et ensuite réhydratés avec un jus ou un alcool fin rehausseront le goût de votre gâteau, voire de votre jambon, certifiés bios, évidemment.
Bananes : plus sucrées que les bananes fraîches, celles-ci renferment deux fois plus de glucides, mais aussi de potassium. On retrouve aussi leur variante salée et huilée sous la forme de plantains séchés. À consommer seules, ou avec des noix et des graines, en collation nutritive et pratique.
Bleuets : aussi appelés myrtilles en Europe, ces petits fruits si riches en antioxydants et en polyphénols rajoutent un goût et une couleur uniques à vos salades, à vos gâteaux et à vos tisanes. Concentrés en acides organiques, en flavonoïdes de même qu’en chrome, en fer et en cuivre, ils peuvent aussi contribuer à réguler la glycémie, à fortifier la vue et à calmer les intestins irrités.
Canneberges : le Québec étant un des plus gros producteurs de canneberges, hélas parfois aux dépens des tourbières, on en trouve facilement des fraîches, surtout en fin d’automne, au temps des récoltes. Déshydratées et sucrées au sirop d’érable ou au sucre raffiné, elles seront moins efficaces comme antioxydant ou antiseptique urinaire. En traitement, elles s’intègrent bien à une cure diurétique, en tisane, combinées avec la guimauve, la prêle ou le romarin. Même déshydratées, elles restent riches en arbutine et en principes amers.
Cassis : cette petite baie noire si aromatique donne une confiture, un sirop ou une liqueur au goût délicieux, et est de plus en plus cultivée et transformée au Québec. Outre sa haute teneur en anthocyanes et en fer, le cassis régule la cortisone produite par les surrénales.
Cerises : merveilleux fruit anti-inflammatoire, il est aussi un facteur pro générateur de mélatonine, les cerises noires surtout, même celles du cerisier de Virginie, plus faciles à déshydrater avec le noyau, mais au fort goût d’amande amère. Offertes séchées et dénoyautées en magasin naturel. Bien plus coûteuses que les cerises confites au sucre, mais tellement plus saines !
Dattes : c’est le fruit mythique du Moyen-Orient. Très riche en glucides, mais aussi en fer et en magnésium, c’est une gâterie riche en sucres rapidement assimilables appréciée des randonneurs et des sprinteurs.
Figues : elles contiennent beaucoup d’enzymes et de vitamines, en plus de fibres assimilables par l’entremise de ses graines. Ce fruit renferme aussi des mucilages et beaucoup de minéraux : calcium, magnésium, phosphore, fer et manganèse, triplés au séchage.
Fraises : ce petit fruit si délicieux gagne en saveur même déshydraté. Dans un gâteau, en cocktail ou en tisane, la fraise perd des vitamines et des enzymes, mais continue autrement à réjouir le palais, grâce aux huiles aromatiques qu’elle concentre, même au séchage.
Gojis : petit fruit rouge ovoïde très présent dans les montagnes indiennes, il est classé parmi les champions de l’indice Orac. Autant par son aspect que par ses qualités intrinsèques, il recèle des caractéristiques toniques amères et digestives comparables à celles de l’épine-vinette.
Mangues : riche en caroténoïdes, ce délicieux fruit tropical en fait une délicieuse collation, voire un ajout intéressant dans un cocktail ou un mocktail tropical. Choisir une mangue bio et de culture éthique, sinon elle contient trop de sulfites et de pesticides potentiellement très allergènes.
Papayes : cet autre gros fruit tropical est très concentré en enzymes digestifs et en provitamine A. La papaye est antivirale, stomachique, cicatrisante et même vermifuge. Plus difficilement accessible certifiée biologique et très longue à déshydrater.
Pêches : il est conseillé de le peler avant de le faire sécher, mais ce fruit très méditerranéen perd beaucoup de volume au séchage. Sa saveur reste toutefois presque intacte, voire sublimée. Il est important de réhydrater la pêche avant son utilisation. Elle contient des acides organiques, et beaucoup de soufre et de potassium.
Pommes : nos pommes séchées, si aisées à cultiver et à trouver sous nos cieux, doivent être choisies bien mûres, biologiques, et il faut garder leur pelure, ce qui ajoute texture, saveurs et fibres. Sa pectine, ses acides organiques et son potassium ne varient presque pas sur le plan de la valeur nutritive.
Poires : combien sont délicieuses les poires bien mûres, qui gardent même leur arôme une fois séchées ! Riches en lévulose très assimilable, en potassium, et même en arbutine et en huile essentielle, les poires sont anti-inflammatoires et diurétiques.
Prunes : dans ma contrée d’enfance, nous avions une quarantaine de pruniers et, chaque automne, nous faisions sécher des plateaux de prunes sur des claies de bois au grenier. Les pruneaux sont très riches en mucilages, en fer et en magnésium. Les pruneaux séchés, appelés quetsches dans mon ancien pays, sont reconnus comme étant un excellent laxatif végétal. Il serait bon de sauver et de réhabiliter les pruniers indigènes du Canada et d’en cultiver d’autres grâce aux greffons rustiques, mieux adaptés aux changements climatiques et à nos latitudes.
Raisins : qu’ils soient locaux, de Corinthe ou de variété Sultana, les raisins secs sont appréciés des petits et des grands, idéalement dégustés seuls ou en collation. Les mincemeats, les tartes aux raisins, les brioches ou les kugelhofs en contiennent des quantités variables selon les recettes. Les raisins, même séchés, contiennent des polyphénols, dont le resvératrol, beaucoup de minéraux, et bien sûr des glucides très assimilables.