Herbes magiques du solstice d’été

Publié le 8 juin 2022
Écrit par Anny Schneider, auteure et herboriste-thérapeute accréditée

Herbes magiques du solstice d’été

 

Les herbes de la Saint-Jean gardent leurs vertus tout l’an.

Adage populaire

 

La journée la plus longue de l’année marque le début de l’éclosion de plusieurs plantes à feuilles ou à fleurs. Depuis longtemps, les herboristes, les druides et les autres guérisseurs en herbe choisissent cette journée pour faire des récoltes de plantes particulièrement vibrantes.

Qu’on en fabrique des élixirs floraux, des bouquets, des coussins aromatiques protecteurs, des bouquets à fumiger ou à brûler dans le feu de la Saint-Jean, les plantes dites « herbes de la Saint-Jean », nombreuses à porter cette appellation, sont les mêmes un peu partout, en Occident, du moins.

 

Herbes sacrées du solstice d’été

Dans le monde entier, mais en Europe surtout, on fête le solstice d’été depuis des temps immémoriaux, journée la plus longue de l’année, comme symbole du triomphe de la lumière-chaleur fertilisante nécessaire à de belles récoltes.

Comme bien des fêtes d’origine païenne, elle a été récupérée par l’Église catholique romaine, qui a choisi de la consacrer à Jean le Baptiste, l’ermite fou illuminé du désert, précurseur du Sauveur. Qui plus est, cette fête sera plus tard désignée comme la fête nationale du Québec !

Néanmoins, encore aujourd’hui, dans bien des municipalités, on érige d’immenses bûchers pour les « Johannisfirs », le plus souvent au sommet d’une montagne, en des lieux désignés comme sacrés depuis le fond des âges de croyances animistes. Sur la colline face à mon village d’alors, on a brûlé en victimes expiatoires plusieurs dizaines de femmes sages et autres dits sorciers qui dérangeaient les autorités officielles, cléricales et médicales en place.

Selon les régions, avant et après l’Inquisition, les rituels changeaient, mais tout se passait autour d’un immense bûcher, et on organisait des concours de chant avec un coq comme récompense. Les vaillants fiancés sautaient par-dessus le feu en jurant un amour éternel et ardent à leur partenaire.

Au Québec aussi, dès le début de la colonie, les feux de la Saint-Jean étaient des occasions de rassemblements festifs. Cette continuité des pow-wow était pour les Autochtones, puis les colons, l’occasion de se courtiser et d’échanger des nouvelles sur les mariages, les naissances et les décès, sans oublier de célébrer l’été enfin arrivé, en joie et en musique, jusque tard dans la nuit.

 

Rituels avec les plantes de la Saint-Jean

Une tradition celtique consistait à cueillir, avec un couteau ou une serpe d’or, au lever du soleil du solstice, pieds nus et à reculons, plusieurs des plantes considérées comme sacrées.

Une autre pratique dictait de les cueillir la veille du solstice, de les garder près du feu dans une cruche d’eau et de s’en laver le visage au matin de la Saint-Jean pour garder un teint lumineux toute l’année.

Le rituel le plus courant était d’en faire un bouquet et de le jeter dans le feu en nommant toutes les maladies ou tous les travers dont on voulait se débarrasser.

Plusieurs en faisaient un bouquet, qu’ils accrochaient derrière leur porte d’entrée, pour protéger leur foyer des méchants, des importuns et des mauvais esprits.

La plupart de ces plantes sont également aromatiques et aseptisent l’air, simplement en les séchant ou en les brûlant.

 

Usages et vertus des sept herbes majeures sacrées de la Saint-Jean

Achillée millefeuille (Achillea millefolium)

L’achillée est une plante de protection de nature plutôt féminine.

En élixir floral, ou simplement en méditant de près tout en fixant sa forme de parasol protecteur immaculé, elle aurait aussi le pouvoir d’augmenter nos capacités de concentration et de préciser les meilleurs objectifs à suivre.

Ses denses ombelles blanches sauraient nous protéger contre les émanations négatives, que ce soient des intentions belliqueuses d’autres personnes ou des ondes électromagnétiques nuisibles. En laisser pousser ou en cultiver près de chez soi est une excellente idée.

En tisane ou en teinture mère, cette chère herbe à dindes combat les fièvres intenses et les chaleurs de ces dames, mais aussi les hémorragies de tous types, même utérines. On peut la boire en tisane (une petite sommité par tasse), refroidie de préférence, et même appliquer ses feuilles écrasées sur une plaie pour arrêter le sang. Au Québec, sa tisane a sauvé des milliers de vies durant les épidémies de grippe asiatique ou espagnole. Elle apaise la fièvre que provoquent les infections.

 

Armoise vulgaire (Artemisia vulgaris)

Dédiée depuis l’Antiquité à Artémis, ou Diane, déesse de la chasse, cette plante profitait aux femmes, qui en faisaient des couronnes auxquelles on ajoutait les autres plantes sacrées, pour danser autour du feu de la Saint-Jean en invoquant l’amour, la fertilité et la protection pour toute l’année.

Elle pousse dans nombre de terrains vagues et de sols pauvres. Celle que l’on appelle aussi « herbe de feu » ou « herbe aux sorcières », à cause de ses effets abortifs en haute dose, est utilisée depuis des millénaires pour nettoyer le sang et se débarrasser des parasites. Elle combat l’anémie et soigne la diarrhée et les douleurs menstruelles. Placée dans les souliers avant les grandes marches, elle protège des ampoules et de l’excès de sudation.

 

Joubarbe des toits (Sempervivum tectorum)

Cultivée sur les toits et les murets des maisons, la joubarbe aurait la capacité d’éloigner la foudre.

Depuis le Moyen Âge, on utilise sa feuille, fraîchement écrasée, comme l’aloès, pour son pouvoir cicatrisant contre les brûlures, les piqûres d’insectes et les plaies.

En interne, on peut l’ajouter, crue, à une salade, mais en petite quantité vu ses effets laxatifs dus à la présence d’alcaloïdes purgatifs.

 

Lierre terrestre (Glecoma hederacea)

Le lierre terrestre est une des premières plantes à fleurir dans nos pelouses. On l’appelle également « couronne de terre » ou « courroie de Saint-Jean ».

Même sainte Hildegarde conseillait de s’en tresser des couronnes à porter en cas de migraines, tout en la buvant en tisane.

Ce couvre-sol très vivace au parfum camphré s’utilise frais bouilli, en décoction brève, ou séché, pour en faire des tisanes contre le rhume, les allergies et toutes sortes d’infections, des intestins aux sinus.

Grâce à ses vertus sternutatoires, on peut même inspirer par le nez sa poudre, séchée, pour le déboucher et soulager certaines céphalées.

Prise en cure prolongée, elle agit aussi comme draineur des métaux lourds.

Les abeilles adorent butiner ses fleurettes violettes, très nombreuses dès le mois de mai.

 

Marguerite (Chrysanthemum leucanthemum)

Selon plusieurs croyances, de jeunes prêtresses en portaient des colliers tressés pour s’attirer les bonnes grâces des esprits de la nature veillant à la maturation des récoltes. Les jeunes feuilles dentelées de la marguerite apparaissent dès la fonte des neiges et se mangent telles quelles, bien rincées dans de l’eau vinaigrée.

Les boutons floraux peuvent se mariner dans un bon vinaigre comme les câpres. Le cœur, ou capitule, de tubules jaunes peut s’ajouter à une salade, ainsi que le capitule blanc, émiettés, pour la garnir.

Qui ne connaît pas cet usage traditionnel qui est d’en arracher les ligules en fredonnant cette ritournelle : il/elle m’aime un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout ?

La fleur de marguerite est également un beau mandala à fixer, pour nous recentrer dans notre priorité, de la conscience de soi à l’empathie réaliste.

 

Millepertuis (Hypericum perforatum)

Également appelé « herbe de Saint-Jean », « herbe à mille trous », « herbe aux brûlures » ou « herbe aux coupures », le millepertuis a toujours symbolisé la victoire de la lumière sur les ténèbres.

On l’appelle aussi « chasse-diable », pour faire référence au fait qu’il dissiperait la mélancolie des êtres tourmentés. Des centaines d’études ont démontré son efficacité semblable aux antidépresseurs, sans leurs effets secondaires.

Cette fleur de la Saint-Jean se cueille une corolle étoilée à la fois, dès la fin juin, pendant tout l’été, et se boit en infusion, contre la dépression, les maux de tête et même les défaillances du système immunitaire d’origine hépatique.

En externe, on emploie les boutons floraux macérés dans de l’huile contre les brûlures et les névralgies.

 

Sauge des prés ou officinale

La sauge des prés (Salvia pratensis) est très présente dans les friches sauvages et les prairies grasses du nord de l’Europe, et la sauge officinale (Salvia officinalis) est vivace au jardin jusqu’à la limite boréale, si elle est bien abritée.

Moins concentrée en huiles essentielles que la sauge officinale, celle des prés est aussi un bon antiseptique des muqueuses, un tonique général et un antisudorifique.

La sauge est une plante purificatrice, c’est celle qui sauve, qui répare, qui nettoie et qui ôte les douleurs vives. Depuis des millénaires, elle se retrouve en officine pharmaceutique, car elle est reconnue pour ses nombreuses vertus assainissantes, calmantes et cicatrisantes, comme le rappelle son nom latin « officinalis », soit utilisée dans l’officine de l’apothicaire.

 

Liste non exhaustive de ces autres plantes sacrées de la Saint-Jean, selon les régions où elles croissent naturellement : l’angélique, la chélidoine, le fenouil, la menthe, le myrte, la rose, le thym, le romarin, le serpolet, la verveine.

En réalité, toutes les plantes cueillies au solstice dans un sol sain sont particulièrement puissantes.

 

Joyeuse fête de la Saint-Jean à tous mes concitoyens et à toutes mes concitoyennes !

Gavons-nous de joie partagée, de lumière et de bonnes herbes vibrantes !