La décompression myofasciale avec ventouses

Publié le 7 avril 2022
Écrit par Francis Létourneau

La décompression myofasciale avec ventouses

Dans mon article précédent, j’abordais le volet historique et culturel des ventouses thérapeutiques. En nous faufilant à travers les époques, nous avons amorcé notre voyage par l’Asie, pour continuer avec l’Égypte et la Grèce antique, en passant par l’Afrique et l’Amérique autochtone, pour ensuite le terminer en Europe.

Cette excursion nous avait permis d’apprécier comment plusieurs cultures utilisaient à leur façon cet outil thérapeutique des plus intéressants. Pour cette deuxième et dernière partie sur le sujet, nous aborderons l’aspect moderne, soit les ventouses dans les années 2000.

 

Nous verrons plusieurs éléments très intéressants :

  • Que signifie « décompression myofasciale » ?
  • Qui pratique cette technique au Québec ?
  •  Quels en sont les objectifs et quand mon thérapeute pourrait-il l’utiliser ?

 

Sans plus tarder, plongeons dans le vif du sujet !

 

La décompression myofasciale… que cela peut-il bien signifier ?

Tout d’abord, nous retrouvons trois termes, dont le premier est « décompression ». Lorsque votre massothérapeute applique une pression dans votre dos avec ses mains ou son coude sur un nœud musculaire, nous parlons de « pression positive ». Cependant, lorsque les ventouses sont appliquées dans votre dos, elles ont un effet de succion, que nous pouvons appeler « pression négative » ou « décompression ». Votre peau, vos fascias et vos muscles sont alors tirés vers le haut plutôt qu’ils subissent une pression.

Pour continuer, que veut dire « myofasciale » ? En fait, nous pouvons séparer le mot en deux, en commençant avec le mot « myo », qui est un préfixe venant du grec signifiant tout simplement « muscle ».

Ici, il s’agit de nos muscles squelettiques, qui ont pour fonction de mouvoir une partie de notre corps. Pensons à nos fameux pectoraux et biceps, pour les amateurs de gym, aux masséters, quand vient le temps de mastiquer, ou à nos mollets, qui nous sont bien utiles pendant une randonnée en montagne, pour ne nommer que ceux-ci.

 

Ces muscles squelettiques possèdent trois membranes de tissus conjonctifs :

1- l’épimysium, représentant la couche externe enveloppant le muscle ;

2- le périmysium, englobant des groupes de fibres musculaires dans le muscle ;

3- l’endomysium, entourant une fibre musculaire.

 

Cela nous amène au terme « fascial », qui fait référence aux tissus conjonctifs qui composent le fascia. Les fascias sont présents dans tout notre corps sous la peau et plus profondément aussi. Ils enveloppent les muscles, les tendons et les organes tout en soutenant notre squelette et en unifiant les différentes parties de notre corps.

Ils possèdent plusieurs fonctions, dont la compartimentation des muscles et aussi la transmission de la force. Les fascias sont organisés selon des chaînes fonctionnelles, que nous appelons « méridiens myofasciaux ». Ceux-ci ont une ressemblance impressionnante avec les méridiens tendino-musculaires en acupuncture.

Les fascias sont capables de se contracter et d’exercer une influence sur la dynamique musculaire. Leur innervation sensitive participe à la proprioception, qui est la perception, consciente ou non, des différentes parties du corps dans l’espace, autant statique qu’en mouvement. Les fascias participent aussi à la nociception, qui est, pour sa part, la perception des stimulations qui génèrent de la douleur. Sans signal de douleur pour nous avertir, nous pourrions nous blesser davantage.

Les fascias ont été longtemps considérés comme des éléments du corps humain représentant peu d’intérêt ou, disons-le ainsi, étant plutôt mal compris. Notre trame fasciale corporelle est souvent comparée à une combinaison de plongée, et une restriction dans une zone pourrait avoir un impact sur la qualité du mouvement ou l’apparition d’inconforts même à une certaine distance du site de la restriction tissulaire.

Le fascia, cette substance organique que plusieurs comparent à une toile d’araignée ou à de la barbe à papa, est de plus en plus étudié et compris. Mais je ne le vous cache pas, il en reste beaucoup à découvrir à son sujet ! Pour nourrir votre curiosité, je vous invite à consulter sur YouTube ces deux excellents documentaires : Promenades sous la peau (Dr Jean-Claude Guimberteau) et Les alliés cachés de notre organisme : les fascias (ARTE).

Côté lecture, la référence est sans aucun doute Anatomy Trains, de Thomas Myers. La troisième édition est disponible en français, et la quatrième édition, soit la plus récente, devrait l’être sous peu. J’ai justement eu l’occasion d’interviewer M. Myers en octobre 2021 lors de son passage à Montréal. L’Institut Axis a eu l’honneur d’organiser sa venue pour 2 formations, qui ont attiré près de 100 professionnels de la santé, au Centre Sheraton, du centre-ville de Montréal ! C’était une fin de semaine inoubliable pour les passionnés de fascia comme nous !

 

Qui pratique la décompression myofasciale avec ventouses au Québec ?

Plusieurs thérapeutes utilisent cette technique au Québec. Les premiers professionnels à qui nous pensons sont les acupuncteurs. Ceux-ci apprennent cette technique d’emblée dans leur formation de base au Collège de Rosemont depuis toujours. Pendant longtemps, ils ont été les seuls à apprendre cette technique, ce qui n’est plus le cas depuis quelques années déjà, car d’autres thérapeutes l’apprennent aussi dans leur formation de base.

Ensuite, parmi les professionnels et les thérapeutes utilisant les ventouses thérapeutiques, nous pouvons penser aux thérapeutes sportifs, aux ostéopathes, aux physiothérapeutes, aux technologues en physiothérapie et aux massothérapeutes. Règle générale, la grande majorité de ceux-ci utilisent des ventouses souples et transparentes, car elles sont d’une très belle polyvalence pour effectuer une multitude de techniques.

Avec ses partenariats, Atlas Médic et la Fédération québécoise des massothérapeutes (FQM), Institut Axis a formé plus de 1 400 professionnels de la santé et thérapeutes sur la technique de décompression myofasciale avec ventouses depuis 2017.

 

Les trois grandes catégories de ventouses utilisées par les acupuncteurs

Les ventouses en silicone : transparentes et souples, elles représentent le modèle le plus polyvalent. En effet, elles permettent de bien s’ajuster à plusieurs techniques et formes de corps. De plus, il est possible de les glisser aisément, et même de les laisser fixes et de bouger facilement une partie du corps.

Les ventouses en plastique avec une pompe : en comparaison avec le modèle précédent, les ventouses sont rigides, alors il est impossible de les pincer pour modifier leur forme quand nous souhaitons les glisser dans des endroits plus petits, comme vers le coude ou le poignet, par exemple. Elles permettent une succion très forte. Cependant, ce n’est pas toujours bon d’avoir plus de succion, car cela peut endommager les tissus chez certaines personnes (peau, muscles, vaisseaux, etc.).

Les ventouses en verre activées par le feu : cette forme plus traditionnelle de ventouses est toute une expérience impressionnante en soi ! La chaleur des ventouses en verre apporte une détente et un confort très intéressants. Cependant, cette technique demande beaucoup plus de dextérité et de précaution, à cause de l’usage d’une flamme nue.

 

Les fameuses marques de ventouses et les manifestations tissulaires

Qui n’a pas vu ou entendu parler des marques que les ventouses peuvent laisser ! Ce sont ces fameux ronds qui sont parfois un peu rougeâtres ou légèrement foncés et qui peuvent rester visibles en moyenne de deux à sept jours. Il faut garder en tête que les marques de ventouses n’apparaissent pas automatiquement chaque fois, bien au contraire. Il y a plusieurs raisons qui font que des marques peuvent apparaître ou non :

  •  la durée d’installation des ventouses sur le corps ;
  •  l’intensité de la succion dans la ventouse ;
  •  la préparation de la peau au préalable ;
  •  l’état de santé de la personne qui les reçoit ;
  •  le nombre de fois que la personne a reçu des ventouses dans cette zone récemment.

 

Est-il nécessaire d’avoir des marques de ventouses pour confirmer l’efficacité de l’intervention ? Selon moi, non. Selon certaines approches, les marques ne seraient que des ecchymoses. Selon la médecine chinoise, le type de coloration, la température et la durée de celles-ci seraient des sources de renseignements sur l’état de santé de la personne.

Une chose qui est certaine, c’est que nous devrions obtenir plus d’études scientifiques qui analysent de façon précise ces marques à l’aide de différents moyens technologiques et de prélèvements. Cela nous permettrait d’avoir une idée juste, afin de confirmer ou d’infirmer nos croyances.

Cependant, certaines manifestations que je trouve très pertinentes en clinique existent, comme celles où les tissus sont collés. Plutôt que la peau forme un dôme sous la ventouse, il arrive que nous obtenions des formes irrégulières ! Est-ce la peau qui est collée sur le muscle ? Le fascia collé sur la peau ou le muscle ? Encore là, c’est difficile à dire à l’œil, et surtout que c’est du cas par cas.

Afin de se résorber et de former un dôme parfait à nouveau, le décollement peut prendre plusieurs séances, selon l’ancienneté du problème, et le niveau d’hydratation et d’activité physique du client. Ces zones de restrictions tissulaires et d’adhérences s’accompagnent souvent de différentes problèmes, telles que des inconforts, de la douleur (pensons aux cicatrices) et de la diminution de l’amplitude de mouvement.

 

Les avantages des ventouses

En plus de travailler sur les restrictions tissulaires et les adhérences, comme mentionné précédemment, les ventouses pratiquées par des professionnels de la santé dûment formés peuvent procurer plusieurs avantages, comme l’amélioration de la circulation, la diminution des tensions musculaires, la diminution de l’apparence de la cellulite, l’apport augmenté de sang dans une région, pour ne nommer que ceux-ci.

Il existe plusieurs façons de se servir des ventouses, et il en est de même pour les motifs de consultation. En clinique, elles sont souvent un excellent allié dans différentes problèmes de santé, telles que les tendinopathies, les douleurs lombaires, les céphalées de tension, la fasciite plantaire, les douleurs aux épaules et lors d’un massage de récupération après un entraînement ou une compétition, par exemple. Elles peuvent aussi favoriser un bel état de relaxation. Rares sont les clients qui n’en redemandent pas à leur prochain rendez-vous !

 

La conclusion

Comme vous avez pu le constater à travers ces deux articles, le sujet des ventouses est passionnant ! Que ce soit par son histoire, par le façonnement de chaque culture des interventions thérapeutiques avec ce même instrument et par la diversité de ses applications, les ventouses resteront fort probablement un héritage mondial à tout jamais ! Quand allez-vous les essayer ?