La santé environnementale intérieure

Publié le 15 octobre 2018
Écrit par Sylvie Leblanc, n.d.

La santé environnementale intérieure

Avec l’automne et le temps plus frais, nos habitudes changent. Certaines personnes qui avaient vu plusieurs symptômes s’estomper durant la saison d’été pourraient bien les voir réapparaître avec la fermeture des fenêtres et le chauffage des logis.

 

Si vous ou un membre de votre famille souffrez de façon cyclique de bronchites, de rhinites, de sécrétions dans l’arrière-gorge (enrouement), d’irritations de la gorge, le « ite » parade, quoi, il se peut que la pollution intérieure de votre logis y soit pour quelque chose.

En 2012, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) déclarait que la pollution de l’air était maintenant reconnue comme le principal risque environnemental pour la santé dans le monde. Celle-ci serait responsable de 7 millions de décès annuels sur la planète (ce qui représente 1 décès sur 8), dont 4,3 millions causés par la pollution intérieure. La pollution n’est pas seulement extérieure, détrompez-vous.

La pollution intérieure constitue une préoccupation croissante pour plusieurs raisons. Tout d’abord, depuis un certain nombre d’années, nous sommes devenus maîtres en matière d’isolation afin de diminuer la consommation en énergie, ce qui réduit fortement les infiltrations d’air. Et ce qui a pour effet, de facto, de réduire le renouvellement d’air. Par conséquent, cela réduit aussi l’évacuation des polluants intérieurs, soit par un manque d’aération, un dysfonctionnement ou un entretien insuffisant des systèmes de ventilation.

Ce phénomène affecte plus particulièrement les enfants, les personnes âgées et les sujets asthmatiques ou souffrant de divers problèmes reliés au système respiratoire, voire cardiovasculaire.

 

Qui a dit : « Poussière qui roule n’amasse pas mousse » ?

Nous sommes un peu à l’image du petit personnage « Pig-Pen », qui se promène avec son aura de poussière, dans les bandes dessinées de Schultz Peanuts et Charlie Brown. Dans The Secret Life of Dust de Hannah Holmes, il est mentionné que nous traînons avec nous un nuage de poussière personnelle, de fibres textiles, de squames de peau, de particules ramassées au travail, etc. Notre petit nuage nous suit et dépose ses traces partout où nous passons. Ces particules sont d’ailleurs exploitées par la science d’investigation plus progressiste, un peu comme une empreinte organique unique et personnelle.

Selon le professeur en chimie environnementale Dan Jaffe de l’Université de Washington, « il n’existe aucun ailleurs. Les ordures de tout le monde vont quelque part. »

Si l’on se fie au problème environnemental des plastiques très médiatisé à l’heure actuelle, imaginez un peu toutes les composantes chimiques non seulement dans les océans, mais aussi volatiles dans l’air ambiant, qui se promènent en particules fines et se trouvent emmitouflés dans la poussière. Or, une grande part des poussières d’origine industrielle mesurent moins de 2,5 microns. Les poussières de pesticides mesurent de 0,5 à 10 microns. Pour vous donner un sens des proportions, un cheveu mesure environ 100 microns. Ce qui fait que la majorité des poussières et principes qui pourraient être allergènes dans la poussière sont imperceptibles à l’œil nu.

Selon Marc Geet Éthier, dans l’ouvrage Zéro toxique, les petits moutons de poussières et de particules sous la causeuse ou sous les électroménagers peuvent cacher des millions d’allergènes et de produits chimiques ; certains pourraient même être mutagènes (retardateurs de flammes provenant de votre vieux fauteuil, pesticides provenant des antipuces de vos animaux, particules de fumée provenant de la cuisson intensive des viandes), sans compter les moisissures, acariens, etc. Tout ce microscopique monde est innocemment distribué partout dans nos logis. Malgré nous, ils sont aussi quelquefois rendus biodisponibles au nom de la propreté ! Il devient important, si votre famille compte des membres sensibles aux microparticules, aux acariens, à la poussière, aux moisissures, etc. d’avoir des filtres efficaces pour l’air ambiant, mais aussi de nettoyer les conduits d’aération, les échangeurs d’air, les conduits de chauffage à air propulsé, les conduits de sécheuse à linge et même les filtres de balayeuses. Tous ces éléments peuvent transporter et même diffuser des particules fines dans l’air de votre logis dans la poussière ambiante. Qu’on se le tienne pour dit, certaines personnes qui souffrent d’allergies respiratoires ne sont pas faites pour faire le ménage !

 

Les acariens, ce petit monde qui provoque des allergies

Les acariens font partie de la famille des arachnides. Saviez-vous qu’un grain de poussière peut contenir jusqu’à 10 000 acariens ? Et vous ne dormez jamais seul, car ils seraient jusqu’à deux millions en votre compagnie dans votre lit ! L’automne et l’hiver sont des périodes de l’année propice aux acariens, où l’humidité et la chaleur de nos maisons très bien isolées forment un climat favorable à leur prolifération.

Comme il existe deux côtés à une médaille, le froid de nos hivers peut aussi leur être fatal. Il est donc recommandé de faire respirer dehors au grand froid les couettes, les oreillers et la literie. Vous pouvez les mettre dans des enveloppes plastifiées pour de nombreuses heures. Il en va de même avec les coussins ou petits lits de minou ou pitou qui peuvent devenir un véhicule intéressant pour les acariens. Les allergies à ces petites bestioles peuvent se présenter sous la forme d’eczéma, d’éternuements répétitifs, d’écoulement nasal ou de congestion, d’asthme, de picotements dans les yeux et la gorge ou d’une fatigue intense. Ces réactions allergiques sont principalement dues aux protéines présentes dans les déjections et aux petits cadavres dans la poussière. Ils sont donc allergènes même après leur mort ; raison de plus d’avoir une literie changée et propre au moins une fois par semaine, particulièrement pour les asthmatiques. Certaines literies et couettes ou housses anti-acariens sont aussi en vente dans les magasins. Méfiez-vous des charmantes peluches pour les enfants, elles sont souvent truffées d’acariens. Faites-leur faire régulièrement un petit voyage en « Sibérie québécoise » dans un sac pour literie, suivi d’un coup de balayeuse. Certaines huiles essentielles sur les oreillers et matelas peuvent avoir, dans une certaine mesure, un effet dissuasif en changeant les odeurs ambiantes qui, semble-t-il, diminuent la libido des reproducteurs acariens. La littérature mentionne que les huiles de lilas des Indes, l’huile de graines de neem (le margousier, très utilisé en médecine ayurvédique), l’huile d’arbre à thé (tea tree), l’huile de lavande et l’huile d’eucalyptus sont utilisées pour réduire la prolifération des acariens. Le bicarbonate de soude est aussi utilisé comme acaricide directement sur le matelas et même les oreillers pour combattre les acariens.

Avec un hydromètre, mesurez l’humidité dans la maison ; les acariens raffolent des milieux humides. Grâce au climatiseur central et au déshumidificateur, gardez le niveau hydro-statique sous les 50 %.

 

Les moisissures et les milieux habitables en saison froide

Nos bâtiments sont tellement bien isolés que beaucoup de moisissures et champignons peuvent s’y développer, particulièrement en hiver. L’humidité, les infiltrations d’eau et le manque d’aération en sont les principales causes. Avec le réchauffement climatique, nos hivers voient passer de plus en plus de redoux, sans compter les niveaux des plans d’eau qui augmentent. Ce problème devient préoccupant et peut devenir dévastateur ; parlez-en à ceux qui ont dû quitter leur résidence pour cause de moisissures toxiques ou champignons comme la mérule pleureuse. Certaines moisissures et certains champignons ne sont pas qu’allergènes, mais peuvent aussi être toxiques.

Pour lutter efficacement contre les moisissures, il faut bien aérer l’habitation et laisser entrer les rayons du soleil ; ils ne sont pas qu’utiles au moral et à notre chimie interne, il est prouvé que les rayons du soleil sont efficaces pour lutter contre l’humidité. De plus, le chauffage passif vous permet d’économiser de l’énergie. Encore ici, certaines huiles essentielles sont actives pour contrer les moisissures et les fongus : l’huile de théier (tea tree ou Melaleuca alternifolia), de lavande, de citronnelle, de géranium, etc. Notez que l’extrait de pépins de pamplemousse liquide est aussi intéressant par rapport aux foyers de moisissures et pour assainir le milieu lors de propagation de moisissures.

Chez les personnes sensibles aux moisissures, les constructions écologiques sont parfaites. Avec des matériaux nobles et naturels, une bonne circulation d’air et un chauffage passif, elles sont un atout à long terme, renseignez-vous ! Attention au chauffage au bois, car certaines moisissures peuvent contaminer le bois de chauffage, et la fumée, avec ses micro-particules, peut affecter les asthmatiques et sujets aux allergies respiratoires.

Quelques considérations seraient de mise afin de ne pas rapporter avec vous, à partir de votre milieu de travail ou de l’extérieur, des particules ou éléments volatils pouvant créer des réactions, surtout si vous ou un membre de votre famille souffrez d’allergies respiratoires ou d’asthme. Les éléments à surveiller sont : certaines colles industrielles (présentes dans certains meubles et planchers, etc.), certaines laques, certaines peintures, certains solvants, certains produits reliés aux soudures, certains parfums dits d’ambiance, certains fixatifs ou produits de coloration, certains parfums, certains produits nettoyants industriels, le chlore, etc.

Mieux vaut se changer avant d’entrer à la maison et observer quelques mesures simples, comme :

  • laisser ses chaussures sur le paillasson ou à l’entrée ;
  • changer vos vêtements de travail selon le milieu (rénovations, ferme, endroits pouvant être contaminés avec des moisissures, des acariens, des pollens divers, des animaux, de la poussière, des parfums, des détergents commerciaux contenant des phtalates, du formaldéhyde, etc.) ;
  • laver ses vêtements à l’eau chaude, etc.

En 2015, un groupe de 21 jeunes Américains et Américaines a décidé de poursuivre le gouvernement en raison du réchauffement climatique. Dans l’affaire Juliana contre États-Unis, les plaignants ont affirmé que le gouvernement avait violé « le droit de vie, de liberté et de propreté des jeunes générations » en adoptant des politiques promouvant l’utilisation d’énergies fossiles, malgré les études mettant en cause le rôle des émissions de CO2 dans le processus de réchauffement climatique.

Dans les faits, l’affaire sera jugée au tribunal le 29 octobre prochain. J’ai hâte de voir si la santé et le droit à la liberté et à la propreté auront préséance sur les valeurs des lobbys.

En avril dernier, la jeunesse colombienne a réussi à convaincre la Cour Suprême de justice de son pays de revenir sur la décision de ne pas donner suite à une affaire mettant en cause le gouvernement. Les jeunes plaignants et plaignantes affirmaient que la déforestation de l’Amazonie, qui est considérée comme un des poumons de la planète, menaçait leur droit constitutionnel de bénéficier d’un environnement sain. La Cour suprême de justice colombienne a décrété que la partie colombienne de l’Amazonie était considérée comme une personne morale et que le gouvernement avait donc le devoir de protéger cet espace. Ce mouvement a aussi touché la Norvège, la Belgique et les Pays-Bas.

Lorsque je constate la résilience des jeunes générations quant à la pollution, je me dis que nous devons prendre des actions immédiates et irrévocables, pour la santé de tous, pour la santé de la planète, et mettre de l’avant un milieu de vie sans pollution intérieure et extérieure.

 

RÉFÉRENCES

Holmes, Hannah. The Secret Life of Dust: From the Cosmos to the Kitchen Counter, the Big Consequences of Little Things, Wiley-Blackwell, 2001.

Geet Éthier, Marc. Zéro toxique, pourquoi et comment se protéger, Éditions du Trécarré, 2005, 287 pages.

http://www.slate.fr/story/165050/enfants-monde-entier-attaquent-justice-gou- vernements-rechauffement-climatique?utm_source=Ownpage&_ope=ey JndWlkIjoiNGJiNzZjMTRmMzdjNDgwNGViODgyNjE3ZWQxMDk1NjEifQ

www.gaïapresse.ca http://faculty.washington.edu/djaffe/

http://www.lapresse.ca/vivre/sante/200810/13/01-29010-lhuile-essentielle-serait-efficace-contre-les-moisissures.php,

http://www.habitation.gouv.qc.ca/fiches_de_projet/fiches_techniques/inspection_en_cas_de_presence_de_moisissures.html,