Publié le 9 octobre 2017
Écrit par Sylvie Rousseau, nd.a.
Les chercheurs dans le domaine de la nutrition ne cessent de se questionner sur la possibilité que nous avons de contrôler le vieillissement grâce à nos choix alimentaires. Selon leurs dires, ce ne sont pas les années qui détériorent notre corps, mais plutôt le régime alimentaire et le mode de vie que nous choisissons.
Ils affirment qu’il serait possible de ralentir la dégradation progressive du corps due au vieillissement et que nous serions capables de vivre longtemps et en santé. Ils associent ce phénomène à l’effet cumulatif des carences alimentaires. Même si le vieillissement est un processus continu et inévitable, le corps a la capacité de se garder en santé longtemps si les bons choix alimentaires sont faits. Consommer des aliments riches en éléments nutritifs permet à nos milliards de cellules de fonctionner au maximum de leur capacité, ainsi que de se réparer et de se régénérer.
L’alimentation devient pour bon nombre de gens non seulement un plaisir et un besoin essentiel, mais aussi un gage de santé et de forme. Hippocrate disait : « Que ton aliment soit ton médicament et que ton médicament soit ton aliment. » Aujourd’hui, on commence à découvrir toute la véracité de ses dires. Entre autres, on a démontré la valeur d’un grand nombre de substances d’origine végétale, dont le lycopène dans la tomate, la lutéine dans la myrtille ou le resvératrol dans le vin rouge, ce dernier ayant la capacité de nous protéger du vieillissement et des maladies dégénératives. La consommation régulière de fruits et de légumes nous protège d’un nombre incalculable de problèmes de santé.
LES NORMES ALIMENTAIRES DANS LE MONDE
Diverses sociétés ont établi des normes de santé minimale pour garder la population en santé, ce qui a donné naissance à ce qu’on appelle les « guides alimentaires ». Certains guides sont toutefois beaucoup plus intéressants que d’autres, tout simplement parce qu’ils ont livré la marchandise. Les deux exemples les plus frappants sont ceux des Japonais et des Méditerranéens, qui jouissent d’une santé globale de beaucoup supérieure à celle de nombreuses populations. Plus particulièrement, les Japonais jouissent d’une des plus grandes longévités au monde.
En regardant le guide alimentaire asiatique de plus près, on constate qu’on accorde d’abord une importance aux légumes, aux algues, aux aliments céréaliers, puis viennent les protéines, surtout végétales, comme les légumineuses. Les produits laitiers sont pratiquement inexistants et il y a très peu de place pour les sucres, les fritures et le café. En ce qui concerne le régime méditerranéen, on constate que les fruits et les légumes, tout comme les produits céréaliers, sont à l’honneur. Suivent les légumineuses, le poisson, la volaille et les gras naturels, notamment l’huile d’olive et les noix. Le yaourt et le fromage, surtout de chèvre, s’y trouvent en très petite quantité, ainsi que les sucres.
LE GUIDE ALIMENTAIRE CANADIEN
De notre côté, le guide alimentaire canadien actuel valorise beaucoup les céréales, recommandant 5 à 12 portions, puis les légumes et les fruits (5 à 10 portions). Viennent ensuite les produits laitiers, qui tiennent une place importante avec une recommandation tournant autour de 2 à 4 portions et finalement, les viandes et substituts (2 à 3 portions). On y trouve peu d’information sur la quantité et les types de gras à privilégier.
Nos experts officiels de la nutrition, soit les diététistes, ont comparé ce guide, lors de sa refonte (La Presse, 2 novembre 2002), aux recommandations officielles du professeur Willet, de Harvard, qui sont plus en lien avec les guides asiatique et méditerranéen. Le président de l’Ordre professionnel des diététistes du Québec, M. Paul-Guy Duhamel, indiquait que le Guide alimentaire canadien ne fait pas la différence en ce qui concerne la qualité des aliments, par exemple les céréales entières par rapport aux céréales raffinées. On constate la même situation pour les types de gras et les protéines recommandées.
Il ajoutait de plus : « Mais, cet outil, le guide alimentaire, n’est pas nécessairement un consensus scientifique, mais un consensus politique. » En effet, beaucoup de personnes dont les intérêts ne sont pas toujours en santé publique ont voulu mettre leur grain de sel dans l’établissement de ce que devrait être la politique officielle du gouvernement en matière de nutrition. Il cite l’exemple du lobby exercé par les producteurs de viande rouge ne voulant pas reconnaître la différence entre les différents types de viandes. Les producteurs de produits laitiers ont aussi influencé à la hausse les recommandations gouvernementales pour la consommation des produits laitiers alors que les chercheurs de Harvard croient que l’adulte moyen n’a pas besoin d’autant de produits laitiers.
DES GUIDES ALIMENTAIRES EN RÉPONSE AUX RECOMMANDATIONS OFFICIELLES DE 2008
Différents groupes, dont la Fondation de l’École d’enseignement supérieur de naturopathie du Québec (EESNQ), soucieux de pallier les lacunes des recommandations officielles, ont alors établi des normes alimentaires avec le guide alimentaire dit naturopathique. Celui-ci s’avère intéressant, car il fait effectivement la distinction entre ce qu’est un aliment de qualité ou non, tout en tenant compte des besoins quantitatifs d’un individu. Il présente certaines catégories d’aliments en lien avec leur apport nutritionnel, soit les produits vitalisants, dont les fruits, les légumes et les germinations, les produits énergisants, dont les légumes racines, les œufs, les huiles et les graines, les produits réparateurs, où on retrouve les légumineuses et les oléagineux, et finalement, les produits de tolérance, qui recoupent les céréales entières (hypoallergènes), le yogourt, le fromage, la volaille et le poisson. Il mentionne l’importance de tenir compte des besoins particuliers en fonction du tempérament de l’individu. Je dirais qu’il est très complet et reflète la réalité en naturopathie, c’est-à-dire qu’il n’y a rien de simple dans la compréhension de la santé humaine.
La Fondation pour l’avancement de la recherche anti-âge a également établi ses recommandations sous le nom de guide alimentaire anti-âge. Celui-ci explique en détail ce qu’est un aliment de qualité et la façon dont les repas devraient être organisés. Il mentionne à cet effet le rapport 50-25-25, soit 50 % de légumes (et un peu de fruits), 25 % de protéines et 25 % de céréales entières, sans oublier une petite quantité de bons gras et oléagineux. Ce type de régime peut aider à ramener l’équilibre hormonal par son influence directe sur la production d’insuline et limiter la sarcopénie, une condition en lien avec la perte musculaire et le vieillissement.
PRISE DEUX POUR UN GUIDE ALIMENTAIRE CANADIEN AMÉLIORÉ
Bonne nouvelle, neuf ans après sa dernière parution, un nouveau guide alimentaire canadien est en marche et devrait aboutir au plus tard en 2019. En effet, le rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie recommandait à Santé Canada, en mars 2016, de réviser le guide rapidement, car il est dépassé. Il demandait cette fois l’exclusion de représentants de l’industrie agroalimentaire dans le processus de renouvellement du guide.
Ottawa a manifesté de grandes intentions à la refonte complète du guide alimentaire, dont l’intention d’éliminer les gras trans des produits transformés et de réduire leur teneur en sel, la volonté de mieux étiqueter les aliments et de limiter la publicité d’aliments malsains destinée aux enfants. On le souhaite plus pertinent, pratique et dans un langage simple, facile à comprendre et à mémoriser. Les messages pourront être saisis en un coup d’œil : moins de gras saturés et plus de fibres, moins de viande et plus de légumes, moins d’aliments transformés.
Du côté des professionnels de l’alimentation, on sent l’urgence de voir le remplacement de l’actuelle version. Lors de la présentation de Santé Canada au congrès annuel de l’Ordre professionnel des diététistes du Québec à l’automne 2016, quelques témoignages ont été très éloquents à ce sujet, dont celui de la nutritionniste Hélène Laurendeau : « Ce guide, c’est une honte à ma profession. C’est tellement déconnecté d’où nous sommes rendus. » On espère donc que le futur guide sera à la hauteur des attentes des différents partenaires dans le domaine de la santé.
L’ALIMENTATION ET LE VIEILLISSEMENT
Il est certain que l’on ne peut échapper à l’emprise du temps ni modifier son bagage génétique, mais indépendamment de notre âge, nous avons la capacité de jouir d’une meilleure santé en décidant de mettre en pratique de bonnes habitudes alimentaires, soit en consommant des fruits et légumes biologiques frais et colorés, des protéines maigres, des céréales entières (hypoallergènes) et des bons gras, et en limitant les aliments qui font du tort à notre corps comme le sel de table, le sucre, les condiments chimiques, les aliments frits, les produits laitiers gras ou les produits de boulangerie commerciale.
RÉFÉRENCES
GRACI, Sam. Les superaliments, Chenelière/McGraw-Hill.
HAYES, Dr Donald. 7 habits of healthy aging, Actual age.
« Quels intérêts sert le guide ? » La Presse, samedi 23 novembre 2002.
MAGNY, Jean-Claude. Le Guide alimentaire naturopathique : la clé de l’alimentation santé, Fondation É.E.S.N.Q., 1997.
RODET, Jean-Claude. L’assiette Vitalité, Fondation pour l’avancement de la recherche anti-âge, 2002.
http://www.lapresse.ca/actualites/201611/25/01-5045417-refonte-du-guide-ali-mentaire-sante-canada-prend-ses-distances-de-lindustrie.php
http://www.lapresse.ca/actualites/sante/201609/25/01-5024346-sante-canada-mijote-un-nouveau-guide-alimentaire.php
http://www.lapresse.ca/actualites/sante/201610/24/01-5033596-un-nouveau-guide-alimentaire-canadien-au-plus-tard-en-2019.php