Publié le 8 mars 2020
Écrit par Sylvie Rousseau, nd.a.
La recherche sur la génétique amorcée en 1990 avec le projet du génome humain a ouvert la porte à une multitude d’applications sur la santé humaine. On a entre autres découvert l’univers de l’épigénétique, ou l’expression des gènes, les facteurs qui l’influencent et comment la changer par notre mode de vie.
En effet, on a démontré que les gènes sont pratiquement tous identiques d’un humain à l’autre, mais ce sont les petites variations entre chacun qui peuvent faire la différence. En effet, un seul nucléotide disposé dans une position spécifique sur un gène appelé « polymorphisme nucléotidique » (SNP) peut favoriser l’expression d’une maladie, lorsqu’exposé à certains facteurs environnementaux.
Il est possible de changer son épigénétique par l’alimentation, le sommeil, notre réponse au stress, l’exposition aux toxines et la prise de suppléments naturels notamment. Les tests génétiques, de plus en plus accessibles, nous permettent de connaître nos polymorphismes génétiques et de trouver le bon mode d’emploi pour optimiser le fonctionnement de ceux-ci.
Diverses personnalités sous l’angle des SNP
Le Dr Ben Lynch, un expert en nutrigénomique, mentionne que certaines variations génétiques sont d’une grande importance pour la santé humaine. Il a aussi observé que ceux-ci ont un impact sur notre personnalité et notre façon de réagir à l’environnement extérieur.
Par exemple, un SNP touchant la catéchol-O-méthyltransférase ou COMT (un gène agissant sur les neurotransmetteurs et les hormones) a un impact sur notre capacité à se concentrer et sur la façon dont le corps métabolise les œstrogènes. Si la COMT est de type lent (une tendance à dégrader lentement les neurotransmetteurs assurant un niveau élevé de ceux-ci dans le cerveau), la personne peut mener plusieurs projets de front et bien marcher sous pression. Les stimulants, dont le café, sont nécessaires pour faire face à la pression. Elle est exigeante envers elle-même et si elle ne finalise pas tout ce qu’elle a entrepris, elle peut devenir anxieuse, s’irriter facilement et souffrir d’insomnie.
Si le COMT est de type rapide, la personne, à l’opposé, a tendance à faire du coq à l’âne et peut avoir de la difficulté à terminer une tâche. Celle-ci peut souffrir de déficit d’attention avec ou sans hyperactivité.
Un SNP en lien avec la monoamine oxidase A ou MAOA (un gène agissant aussi sur les neurotransmetteurs) influence notre humeur et notre attirance pour le grignotage. Si le MAOA est lent, la personne a une énergie débordante, une bonne estime de soi. Elle est très productive et joyeuse. Mais celle-ci peut aussi avoir des sautes d’humeur, de l’irritabilité, et peut être agressive et réagir trop impulsivement.
Si la MAOA est de type rapide (les neurotransmetteurs sont vite dégradés, abaissant dramatiquement le niveau de ces médiateurs dans le cerveau), le panier d’épicerie de la personne est rempli de chocolat et de glucides de toutes sortes (pain, pâtes, céréales…). Elle sent beaucoup de bienfaits à manger ces glucides, mais peut souffrir d’hypoglycémie, l’amenant à manger encore plus de ces aliments jusqu’à l’enfermer dans la spirale des régimes yoyo et la précipiter dans les troubles d’obésité.
Un SNP dans l’oxyde nitrique synthase 3 ou NOS3 (en lien avec la santé cardiaque) amène chez l’individu plus de risques de troubles cardiovasculaires, dont les migraines, les maladies de cœur et la démence. Celui-ci a besoin d’être actif physiquement et en contact avec la nature pour rester en santé.
Un SNP dans la phosphatidyléthanolamine N-méthyltransférase ou PEMT (le gène qui protège le foie) est caractéristique de troubles de la vésicule biliaire et de douleurs musculaires.
Avec une diète végétarienne, la personne souffre de pertes de mémoire, de fatigue, et peut se retrouver avec un cerveau embrouillé. Comme omnivore, elle se sent beaucoup plus énergique, est très active physiquement et plus fonctionnelle mentalement. Mais elle doit faire attention aux aliments riches en glucides pour éviter de développer une stéatose hépatique (foie gras).
Retour sur la théorie des humeurs
Les typologies décrites par la génétique m’ont rappelé mon tout premier article publié dans Vitalité Québec (juin 2000) sur la théorie des humeurs ou tempéraments d’Hippocrate. J’ai eu envie de faire un petit retour sur cette typologie ancestrale.
En effet, celui qu’on appelait le « père de la médecine », Hippocrate, avait observé, il y a de ça deux millénaires, la gente humaine et en avait dégagé quatre grands tempéraments représentant le mélange des humeurs fondamentales (fluides du corps), soit le sang, la bile jaune, la bile noire et le flegme (lymphe) chez les individus. Chaque tempérament avait ses propres caractéristiques physiologiques, psychologiques et comportementales.
Le sanguin (sang), heureux et jovial, bénéficie de la force de son système cardiovasculaire. Il a besoin de grand air et d’exercice pour maintenir sa santé. Le bilieux (bile jaune), actif et enclin à la colère, préserve sa santé grâce à son instinct dominant, le système musculosquelettique, et ses faiblesses se situent au niveau du foie. Il a aussi besoin d’exercice pour rester en santé. Le nerveux (bile noire), cérébral et mélancolique, fonctionne par le biais de stimulants, dont l’excitation intellectuelle et les élans émotifs. S’il en est privé, il peut développer des problèmes de névrose ou d’intoxication cérébrale. Finalement, le lymphatique (flegme), calme et imperturbable, est un individu gourmand, indolent, pratique, matérialiste. Il a de remarquables capacités digestives. Il est toutefois plus à risque de développer des maladies touchant les tissus, comme l’obésité. Y voyez-vous quelques ressemblances avec les typologies précédentes ? La génétique vient-elle confirmer ce que les anciens avaient observé dans l’antiquité ?
Hygiène vitale et nutrigénomique
Hippocrate proposait une hygiène vitale et une alimentation adaptées aux tempéraments pour retrouver la santé. Aujourd’hui, beaucoup d’acteurs dans le domaine de la médecine naturelle, dont le Dr Lynch, proposent aussi des changements dans le mode de vie et l’alimentation pour optimiser sa santé. Comme quoi le message reste toujours pareil. Voici, en quelques mots, l’essentiel des changements à intégrer à votre vie pour retrouver l’homéostasie :
La médecine du futur doit s’adapter aux nouvelles avenues que nous offre l’univers de l’épigénétique. Elle doit devenir une médecine personnalisée et prioriser les facteurs environnementaux et le mode de vie pour influencer positivement l’expression de nos gènes. Toutefois, en 2020, on peut affirmer, sans prétention, que la médecine naturelle est déjà entrée dans cette nouvelle ère !
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