Publié le 25 juin 2023
Écrit par Louis Lapointe et Yves Prescott
La présence de restaurants spécialisés dans les dumplings s’impose de plus en plus dans notre paysage gastronomique. Mais qu’entend-on exactement par le mot « dumpling » ?
Plusieurs définitions ont été mises de l’avant, mais celle pouvant le mieux répondre à cette question serait une pâte farcie d’ingrédients salés et, plus rarement, sucrés. On pense aux samosas, aux won-ton et aux raviolis comme étant de bons exemples de ce genre de préparation culinaire.
De nombreuses théories ont été mises de l’avant pour tenter de retracer l’origine des raviolis. Cette recette apparaît pour la première fois en Italie au 14e siècle, alors que, selon d’autres sources, ils se manifestent pour la première fois dans un recueil de recettes de la Rome antique : l’Apicius. Peu importe la théorie retenue, les raviolis se caractérisent par une importante part d’œufs dans la préparation de la pâte. Ce plat, mis en conserve au 20e siècle, constituera la ration des soldats italiens lors de la Première Guerre mondiale.
Proche parent des raviolis, les mantous sont dégustés en Turquie, bien que l’accompagnement classique soit une sauce à base de yogourt. Ces mantous seront adoptés le long de la Route de la soie et trouveront une place de choix dans les traditions culinaires afghanes. Le voyage de cette pâte farcie de viande se terminera en Corée, où l’agneau sera remplacé par du porc, auquel on aura mélangé du tofu, des oignons verts et parfois du kimchi (cette marinade de chou emblématique de la cuisine coréenne). Ces mantous sont incontournables lors des fêtes du Nouvel An lunaire, tout comme le sont ses proches parents, les jiaozi, qui sont aussi servis en Chine pour célébrer l’arrivée de la nouvelle année.
Non seulement la farce de ces dumplings d’Extrême-Orient varie d’une région à l’autre, mais la pâte inclut parfois de l’huile de sésame (les jiaozi du Japon), alors que les cuistots chinois préfèrent une préparation simple, à base d’eau et de farine. La consistance de la pâte serait, selon les experts, d’une importance capitale : si, en touchant votre lobe d’oreille, ce dernier ressemble à la consistance de la pâte, le résultat sera probablement excellent. Chez les Mongols et les Tibétains, des dumplings fortement apparentés sont consommés à l’année et, en règle générale, on les fait cuire à la vapeur. Le porc est ici remplacé par l’agneau (Mongolie) et la viande de yack (Tibet). Certains historiens de l’art culinaire croient que ces pâtes farcies auraient été rapportées en Europe par Marco Polo.
Les dumplings les mieux connus, en dehors du sous-continent indien, sont, sans conteste, les samosas, bien que de nombreux autres, rarement disponibles chez nous, soient faits à base de noix de coco, de crevettes ou de noix de pistaches.
Les dumplings ont la cote d’amour en Ukraine, en Russie et en Pologne, où on les désigne sous le nom de « pierogis » (dérivé du mot russe « piru », qui signifie « festivités »). Ce plat de la cuisine populaire aurait laissé sa trace dès le 17e siècle, lors de la publication d’un recueil de cuisine. La farce peut être faite à base de chou, de champignons, de choucroute, de pommes de terre, de fromage ou de viande. Après la cuisson, on les nappera de crème sure, d’aneth et d’oignons frits. Compte tenu de l’importance des pierogis pour la diaspora d’Europe de l’Est, on a même créé une Journée nationale du pierogi, le 8 octobre. Cette recette paysanne convient aussi à de nombreux desserts à base de gelée de roses, de cerises et de bleuets, et elle s’adapte aussi à de nombreuses soupes. Les pierogis (ou leurs variantes) sont également connus sous le nom de « vareniki » et de « kreplach ».
Mais qu’en est-il de la France ? Le terme « quenelle », employé outre-Atlantique, n’est pas véritablement synonyme de « dumpling » : de forme cylindrique, la quenelle est pochée dans l’eau bouillante et on la consomme en France depuis le milieu du 18e siècle. Le mot « quenelle » s’apparente au terme « Knödel » : terme allemand qui est plus ou moins l’équivalent de « pain perdu » (notre pain doré). Ce « plat du pauvre » occupe une place marginale dans la cuisine de l’Hexagone, bien que, depuis 1907, il s’inscrive au rang des spécialités de la ville de Lyon.
En Amérique latine, deux types de dumplings ont la cote d’amour, soit les tamales et les empanadas. Les tamales sont faits de semoule de maïs et sont cuits à la vapeur dans une feuille de maïs ou de bananier. Ils sont farcis de mille et une façons et sont parfois servis comme desserts. Aux Antilles, on désigne sous l’appellation « pasteles » ce qu’on appelle « tamales » en Amérique du Sud.
Les empanadas, quant à eux, sont la plupart du temps préparés avec de la farine de blé, et la farce est un mélange de porc, d’olives et d’œuf cuit dur. Ils sont frits et plus rarement cuits au four. Dans un tel cas, on ajoute un corps gras à la pâte.
Peu de recettes de dumplings nous parviennent d’Afrique, exception faite des Madombi et des Dombolo, d’Afrique australe. Ces pâtes bouillies (non farcies) servent d’accompagnement à un ragoût (ce concept est également populaire dans de nombreuses régions des États-Unis). Certaines préparations semblables aux plats africains déjà cités sont nées aux États-Unis lors de la Grande Dépression. D’autres, plus sophistiquées, ont été adoptées par les Américains et sont directement inspirées des traditions asiatiques, voire latino-américaines.
En résumé, les dumplings peuvent être de petite taille, comme ceux de Turquie, ou de dimensions plus considérables, comme les empanadas. Qu’ils soient végétariens ou carnés, ils sont parfois servis dans une soupe, la plupart du temps comme plat principal ou, plus rarement, comme dessert. On les associe à la cuisine populaire, bien qu’un restaurant new-yorkais (Golden Gate) ait, récemment, offert, pour un temps limité, une assiette de 16 dumplings de truffes blanches pour l’équivalent de 6 000 dollars canadiens.
Mais, sans conteste, la cuisine cantonaise (Hong Kong) témoigne d’un exceptionnel savoir-faire en la matière. Un repas de dim sum saura vous en convaincre !