Les Low-Tech : des solutions technologiques qimples, pour un avenir plus vert

Publié le 15 septembre 2019
Écrit par Gabriel Parent-Leblanc. B. Sc., M. Env.

Les Low-Tech : des solutions technologiques qimples, pour un avenir plus vert

L’être humain s’est toujours fié à son intelligence pour développer des technologies et concevoir des outils pour solutionner ses problèmes. Cela explique pourquoi tant de personnes se disent, encore aujourd’hui, que l’humanité est en sécurité, malgré l’urgence climatique à laquelle nous devons faire face.

 

Devant la crise environnementale et aux problèmes sociaux de notre temps, tels que le réchauffement climatique, la montée du niveau de la mer, une perte importante et jamais vue de biodiversité (qui s’apparente à une extinction massive), la pollution par le plastique non biodégradable partout sur la planète (y compris dans notre corps), et bien plus encore, la réaction du commun des mortels ressemble souvent à « ce n’est pas grave, nous allons trou ver des solutions »

Est-ce que c’est ce que vous vous dites aussi ? Et si je vous annonçais que les solutions actuellement sur la table sont trop peu efficaces devant l’ampleur des problèmes, en plus d’être possiblement développées dans la mauvaise direction !

Effectivement, pratiquement toutes les solutions développées jusqu’à maintenant pour résoudre les problématiques environnementales peuvent être définies comme étant des technologies complexes, peu accessibles et demandant énormément de ressources et d’énergie.

Prenons, par exemple, la voiture électrique. Cette merveille technologique émet 65 % moins de gaz à effet de serre (GES) comparativement à une voiture conventionnelle à essence, et ce, après avoir parcouru 150 000 km (Schepper, 2019). Elle représente donc une excellente alternative à la voiture à essence, surtout ici au Québec où 99 % de notre électricité provient de sources renouvelables. Quel est le hic, me direz-vous ? Il n’y a pas assez de métaux rares pour construire suffisamment de voitures électriques pour remplacer toutes les voitures à essence.

Les dernières études sur le sujet révèlent que pour remplacer les deux milliards de véhicules à essence par des véhicules électriques à travers le monde, « la production annuelle de Néodyme et Dysprosium devrait augmenter de 70 % et la quantité de cuivre et de cobalt produite devrait respectivement plus que doubler et tripler », et ce, pour l’entièreté de la période allant jusqu’à 2050 (traduction libre d’Alter, 2019).

 

Je pourrais vous présenter un autre exemple quasi identique, soit les panneaux solaires photovoltaïques et les éoliennes, mais passons plutôt au sujet du présent article, soit les low-tech. Comme le dit textuellement leur nom, ces technologies vont à l’inverse de la tendance actuelle et reviennent à la base, sans pour autant être moins efficaces. On parle ici d’appareils simples à construire (Do it yourself ou DIY), qui demandent peu d’investissement (tant au niveau monétaire que de celui des ressources) et qui sont faciles à réparer.

Je vais vous présenter, dans cet article, quelques exemples de low-tech, principalement celles qui sont utilisées par le Low-tech Lab. Véritable référence dans ce domaine, cette organisation française a mis en œuvre plusieurs projets dans les dernières années pour documenter, tester et partager de nombreuses technologies. Leur dernier projet, « l’habitat low-tech », est en fait une micromaison sur roues où l’on a intégré une douzaine de technologies simples, durables et accessibles.

 

Chauffe-air solaire en ardoise

Le but de cet appareil est de « transformer le rayonnement solaire en chaleur grâce à ce qu’on appelle un corps noir (p. ex. le goudron très chaud l’été ou encore le tableau de bord d’une voiture garée en plein soleil) ».

Cette transformation se fait de manière très simple : le rayonnement solaire réchauffe la surface foncée (dans ce cas-ci, de l’ardoise), et l’air de l’habitation y est aspiré et réchauffé. En effet, par un « effet de thermosiphon, l’air chaud va naturellement monter, créant ainsi un tirage aspirant l’air de l’habitat par le bas du capteur ».

Pour obtenir le tutoriel complet de cet appareil :

https://lowtechlab.org/wiki/Chauffage_solaire_version_ardoise

 

Chauffe-air solaire en ardoise

Un appareil utilisant le même principe existe au Québec, il s’agit du Chinook.Il représente une solution très intéressante si jamais vous n’avez pas le goût de construire votre propre chauffe-air solaire, comme nos deux amis ingénieurs français !

En prime, le produit a été conçu et éprouvé pour le climat québécois… Transformer gratuitement l’énergie du soleil en chaleur, assurément une technologie à adopter !

 

Pour obtenir plus de détails :

https://ecosolaris.com/chauffe- air/

 

Biodigesteur domestique

Le but du biodigesteur est de produire du gaz naturel combustible et du fertilisant à partir de nos déchets organiques. Cette technologie permet de réaliser de la cuisson à l’aide du gaz naturel produit par la décomposition de vos restants de table. Le processus est rendu possible grâce à la décomposition de la matière, et il produit même du compost ! Assez impressionnant, non !

 

Pour obtenir le tutoriel complet de cet appareil :

https://lowtechlab.org/wiki/Biodigesteur_domestique

 

Biodigesteur, le homebiogas.

Comme pour le chauffe-air solaire, vous pouvez vous procurer une version commerciale du biodigesteur, le HomeBiogas.

Le système n’est malheureusement pas adapté au climat québécois, car les micro-organismes transformant les rebuts de table en gaz et compost ont besoin de chaleur pour vivre et bien performer.

Seule solution pour nous au Québec : l’utiliser dans un endroit isolé et chauffé. Donc possible, mais, avouons-le quelque peu contraignante !

C’est tout de même une technologie très intéressante qui mérite d’être utilisée un peu partout !

 

Pour obtenir plus de détails :

https://www.homebiogas.com

 

Phytoépuration des eaux usées

Le but de la phytoépuration est d’assainir les eaux usées d’une résidence à l’aide de filtres naturels et de plantes filtrantes.

La nature fait si bien les choses… Les bactéries présentes dans le sol et les végétaux sont capables de capter tous les nutriments et les polluants que l’on retrouve dans nos eaux usées, pourvu que nous ne les mélangions pas avec les eaux d’égout.

 

Pour obtenir le tutoriel complet de cet appareil :

https://lowtechlab.org/wiki/Phytoépuration_eaux_usées

 

 

Toilette au compost

Une solution low-tech à cette problématique consiste à utiliser la toilette au compost, une low-tech que nos amis utilisent également dans « l’habitation low-tech » ! En séparant les eaux noires (toilette) et les eaux grises (lavabo, laveuse, douche, etc.), il est tellement plus facile de traiter ces eaux usées sans polluer l’environnement… Et à un coût tellement plus bas (on l’oublie, mais on paie à fort prix le traitement — partiel — de nos eaux usées) !

Le but de la toilette au compost est de disposer de nos déjections sans utiliser (et polluer) l’eau potable.

Il existe plusieurs modèles différents de toilette au compost sur le marché et vous pouvez également construire la vôtre facilement, puisque c’est une low-tech !

 

Pour obtenir le tutoriel complet de cet appareil :

https://lowtechlab.org/wiki/Toilettesèches_familiales

Ou

https://www.habitationsmicro.com/produit/la-grande-revolution-de-la-micromaison-livre-tiny-house-book/

 

 

Douche à recyclage d’eau

Le but de cette douche est de réduire la consommation d’eau potable et de diminuer la quantité d’énergie nécessaire pour chauffer cette eau en la filtrant et en la recirculant.

L’appareil est relativement complexe pour être considéré comme une low-tech, mais je l’intègre simplement dans ma liste pour illustrer le génie derrière le concept. Celui-ci nous provient de Jason Selvarajan, un Finlandais, et son projet se nomme Showerloop (https://showerloop.org/).

Selon le Finlandais, une douche à recyclage d’eau « permet une réduction de la consommation d’eau de 90 % et une diminution de la consommation d’énergie pour la chauffer de l’ordre de 70 à 90 % pour une douche de 10 minutes où le débit est de 10 l/min » (traduction libre de Showerloop, s.d.).

 

Pour obtenir le tutoriel complet de cet appareil : http://lowtechlab.org/wiki/Douche_à_recyclage

https://showerloop.org/make-it

 

Bref, comme le bon vieux dicton nous le rappelle, « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué » ? Pour résoudre les problèmes de notre monde moderne, peut-être devrions-nous envisager des technologies simples, durables et accessibles, plutôt que des solutions complexes, difficilement réparables et inabordables. Après tout, c’est toujours le même modèle sociétal, celui qui nous rend malades à petit feu, qui est derrière la production de ces gadgets révolutionnaires qu’on nous vend pour résoudre tous nos problèmes. Combattre le capitalisme et son plan pour tous nous endormir et nous dire que tout va bien aller (le développement durable) n’est possible qu’à travers la décroissance. Osons consommer moins et utiliser notre génie pour construire et réparer de nos mains des appareils simples, car les autorités ne le feront pas pour nous. Peut-être un jour s’il y a de l’argent à faire pour sauver la planète, mais j’en doute fortement.

 

Les toilettes à compost

Bien que ces appareils soient très simples d’utilisation et règlent les problématiques de pollution de l’eau et du cycle de la matière, ils sont très peu utilisés au Québec. En plus d’une réglementation désuète qui ne la permet que très rarement, c’est également notre phobie de l’aspect sanitaire de la chose qui en est la cause. Et c’est tout à fait compréhensible, car la gestion de nos excréments et urine n’a rien de bien séduisant ! Mais, au-delà de notre dédain, on retrouve une solution tout à fait appropriée, et ce, pour de nombreuses raisons.

Quand vous tirez la chasse d’eau, vous payez quelqu’un pour disposer de vos déchets. Vous payez aussi pour l’eau potable, pour l’électricité et pour les coûts de traitement de l’eau usée, et vous contribuez également aux problèmes environnementaux reliés à ce traitement.

Lorsque vous utilisez une toilette au compost, vous êtes payés pour la petite quantité de travail effectuée en recyclant vos matières organiques. Votre paiement vient sous forme de compost.

L’avantage majeur de la toilette au compost réside dans sa simplicité. Nul besoin d’installer un réseau complexe de plomberie ou une installation septique, et de payer pour ces installations, avec un appareil aussi simple à installer. Au lieu de cela, on travaille avec la nature grâce au processus du compostage. Celui-ci s’appuie sur l’utilisation de différents organismes (bactéries, insectes, vers de terre, etc.) pour décomposer la matière. En présence de bonnes conditions (aération, température, humidité), ces organismes décomposent la matière et la transforment en compost, un amendement riche en humus et donc très utile dans les jardins et les plates-bandes. En fait, si vous jardinez le moindrement, vous êtes déjà au courant de l’utilité du compost et vous payez sûrement très cher pour en ajouter dans votre jardin…

 

Extrait de mon livre

La grande révolution de la micromaison disponible au www.habitationsmicro.com/produit/la-grande-revolution-de-la-micromaisonlivre-tiny-house-book/

 

Les toilettes à eau et le cycle de la matière

Si les usines de traitement des eaux usées sont si peu efficaces, c’est en partie à cause du système « tout-à-l’égout », où les eaux industrielles, les eaux de ruissellement, les eaux grises (bain, douche, lavabo) et les eaux noires (toilette) sont mélangées puis traitées. Ce cocktail ne simplifie qu’en apparence les choses, car une fois mélangé, le tout représente un volume énorme de matière qui doit être traité à grands frais dans les usines d’épuration.

Et si on sortait du mode conventionnel un moment ? Tant sur le plan individuel qu’en société, nous sommes trop souvent sur le pilote automatique, et analyser nos comportements de temps à autre ne pourrait être que bénéfique. Dans le cas qui nous intéresse, mentionnons que nous allons à la toilette de six à huit fois par jour, et que nos déjections sont transportées vers un système de traitement grâce à de l’eau potable. Cette utilisation représente une quantité incroyable d’eau, soit 30 % de notre consommation quotidienne, ou environ 127 litres pour un Québécois moyen.

Or, même si les excréments représentent seulement 1 % du volume des eaux usées, ils contiennent la majorité des éléments à traiter, soit 99 % des bactéries, 90 % du phosphore et 98 % de l’azote. En mélangeant nos déchets métaboliques à l’eau potable, nous ne polluons pas seulement cette ressource, mais aussi tous les écosystèmes situés en aval des systèmes de traitement des eaux usées.

Ce faisant, nous créons également une rupture dans le cycle naturel de la matière organique. En effet, nos déchets métaboliques sont constitués de toute la matière que nous ingérons par l’alimentation, après avoir été plus ou moins transformés pour capter l’énergie et les nutriments dont nous avons besoin. Plutôt que de retourner cette matière dans le sol d’où les aliments proviennent, nous la diluons dans l’eau.

Toutefois, comme pour n’importe quelle ressource, s’il n’y a que des extrants sans un réinvestissement dans le système, celui-ci ne pourra demeurer productif bien longtemps… Ce n’est donc pas pour rien qu’il y a, partout autour du globe, une dégradation constante des terres arables ! Au lieu de favoriser le retour à la terre de cette matière organique, l’agriculture moderne injecte des fertilisants industriels dommageables pour la santé bactérienne des sols qui sont la plupart du temps lessivés par la pluie, par manque de protection riveraine.

Alors que les terres arables se vident de leur potentiel à accueillir la vie, nos milieux aquatiques étouffent… C’est carrément le monde à l’envers !

 

Extrait de mon livre

La grande révolution de la micromaison disponible au

www.habitationsmi-cro.com/produit/la-grande-revolution-de-la-micromaison-livre-tiny-house-book/

 

Références

ALTER, L. Why electric cars won’t save us: There are not enough resources to build them. Treehugger. 2019.

[En ligne] https://www.treehugger.com/cars/why-elec- tric-cars-wont-save-us-there-are-not-enough-resources- build-them.html (page consultée le 17 juin 2019)

GAUTHIER, P. La faisabilité d’une transition énergétique. Conférence donnée dans le cadre du Forum social mondial. 2016. [En ligne] https://www.youtube.com/watch?v=K7WANe44fEc (page consultée le 20 juin 2019).

LOW-TECH LAB. Habitat low-tech. s.d. [En ligne] https://lowtechlab.org/wiki/Habitat_Pilote (page consultée le 17 juin 2019).

SCHEPPER, B. Présentation de l’analyse de cycle de vie à travers l’exemple de la voiture électrique. Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS).

[En ligne] https://iris-recherche.qc.ca/blogue/pre- sentation-de-l-analyse-de-cycle-de-vie-a-travers-l- exemple-de-la-voiture-electrique

(page consultée le 17 juin 2019).

SHOWERLOOP. Real-time filtration, purification, recycling & heat recovery system for showers. Made in Finland, for Earth. s.d. [En ligne] https://showerloop.org/ (page cosultée le 20 juin 2019).