Les secrets cachés de la vitamine soleil !

Publié le 21 janvier 2016
Écrit par Dre Valérie Conway

Les secrets cachés de la vitamine soleil !

Stimulation du système immunitaire, prévention de l’asthme et du rachitisme chez l’enfant, traitement du psoriasis, maintien de la santé osseuse et dentaire, protection contre le cancer et maintien de la santé cardiovasculaire ; la vitamine d n’a pas fini de nous révéler l’ensemble de ses secrets !

 

LA FAMEUSE VITAMINE D est sécrétée de façon naturelle par le corps à la suite d’une exposition aux rayons solaires, ce qui explique son titre de « vitamine soleil ». La vitamine D joue plusieurs rôles au sein de l’organisme, principalement au niveau de la santé osseuse en permettant à notre organisme d’absorber le calcium et le phosphore nécessaires au maintien de notre densité osseuse. En pleine saison hivernale, avec la baisse des heures d’ensoleillement lui étant associée, doit-on entreprendre systématiquement une supplémentation en vitamine D ? Passons ensemble en revue le profil de la fameuse vitamine soleil afin de mieux répondre à cette question.

 

Vitamine D3 : la vitamine soleil !

La vitamine D fait partie des composés dits « liposolubles» en raison de son caractère soluble dans les corps graisseux. Ainsi, on la retrouve de façon concentrée exclusivement dans les aliments riches en composés lipidiques tels que les poissons gras, le lait et les jaunes d’oeuf.

De façon plus exacte, la vitamine D existe sous cinq formes dénotées de D1 à D5, dont les plus communes sont la vitamine D2 (ergocalciférol) des végétaux et la vitamine D3 (cholécalciférol) produite chez les animaux. D’un point de vue biochimique, la vitamine D3 est synthétisée de façon cutanée à partir d’un dérivé du cholestérol, la provitamine D3. Sous l’action des rayons UVB du soleil, la provitamine D3 de l’épiderme est transformée en prévitamine D3 puis convertie en vitamine D3 avant de passer dans la circulation sanguine.

C’est ensuite que la vitamine D3 est convertie en calcidiol par le foie, et finalement en calcitriol par les reins, soit la forme biologiquement active dans l’organisme [1]. Si 80 à 90 % de l’apport journalier en vitamine D3 est comblé par ce processus de photosynthèse [2], nos aliments fournissent généralement les 10 à 20 % restants. À noter que s’il est possible pour notre corps de biotransformer la vitamine D2 végétale en vitamine D3 pour combler ses besoins, c’est sous sa forme animale (cholécalciférol) que la vitamine D est la plus assimilable par l’intestin, et donc la plus efficace dans l’organisme.

 

Les aliments : une bonne source de vitamine D ?

Les sources alimentaires naturelles de vitamine D se limitent aux poissons gras, aux jaunes d’oeufs et, en moindre mesure, aux champignons. Puisque peu d’aliments consommés en quantité importante contiennent de la vitamine D, il est désormais obligatoire ou autorisé pour plusieurs produits alimentaires d’être enrichis en vitamine D3 par mesure de santé publique (consulter le tableau 1, pour en savoir plus). À cet effet, Santé Canada estime que l’apport quotidien en vitamine D d’origine alimentaire provient majoritairement de la consommation de produits obligatoirement enrichis au Canada, soit le lait de vache et la margarine.

 

Les bienfaits méconnus de la vitamine D

Le rôle le mieux connu de la vitamine D3 est certainement le maintien de la santé osseuse. Pourtant, de plus en plus d’investigations cliniques ont permis de mettre en lumière le caractère multifonctionnel de la vitamine soleil allant bien au-delà du simple maintien de la densité osseuse [3]. La vitamine D3 interviendrait par exemple dans la régulation de l’insuline, la prévention des pathologies cardiovasculaires, des maladies auto-immunes, de l’hypertension et de l’obésité, en plus de jouer un rôle probable dans le développement de diverses pathologies neurodégénératives [4]. L’hypothèse la plus souvent relatée impliquerait la capacité du calcitriol, le métabolite actif de la vitamine D3, à réguler la transcription de plusieurs gènes de notre organisme. C’est suivant l’activation ou la répression de certains gènes que la vitamine soleil induirait la production de métabolites aux propriétés antivirales, anti-infectieuses, antiprolifératives, antitumorales et immunomodulatrices [3, 5].

 

Apports nutritionnels recommandés en vigueur au canada

L’institut américain de médecine (IOM) a révisé à la hausse en 2010 les apports nutritionnels de référence (ANREF) concernant la vitamine D3. Depuis, les apports nutritionnels recommandés (ANR) ont triplé, en considération des besoins en vitamine D pour le maintien de la santé osseuse suivant une exposition minimale au soleil [6]. Le tableau 2 vous expose le sommaire des ANREF, soit les apports nutritionnels quotidiens recommandés (ANR), l’apport nutritionnel suffisant (AS) ainsi que les apports quotidiens maximaux tolérés (AMT).

Puisque la vitamine D est un micronutriment soluble dans les graisses – comme les vitamines A, E et K –, il existe un intervalle de concentrations tolérables sécuritaires assez étroit expliquant l’importance du respect de l’apport journalier maximal tolérable. Une exposition à un excès de vitamine D peut d’ailleurs induire des problématiques de santé graves telles que l’hypercalcémie chronique, les calculs rénaux, des dépôts de calcium et de phosphore dans les organes et les tissus mous. Pour ces raisons, l’IOM ne maintient pas les bienfaits pour la santé d’un apport journalier en vitamine D3 supérieur à l’ANR.

 

Les populations à risque de déficit en vitamine soleil

Malgré les révisions à la hausse des apports recommandés et l’enrichissement obligatoire de plusieurs produits au Canada, il est important de savoir que la déficience en vitamine D est une condition en pleine croissance, entre autres en raison du vieillissement de la population mondiale. En effet, la capacité de l’organisme à absorber ou à synthétiser la vitamine D diminue avec l’âge ! À cet effet, Ostéoporose Canada recommande un apport journalier bonifié fixé entre 800 à 2 000 UI chez les aînés de plus de 50 ans. De même, les végétaliens stricts ou les crudivores, qui ne consomment ni viande, ni poisson, ni oeufs, ni produits laitiers, sont considérés à haut risque de carence en vitamine soleil. Certains troubles d’absorption du système digestif, dont la pancréatite ou les troubles biliaires de même que certaines maladies telles que la fibrose kystique, la maladie coeliaque ou la colite ulcéreuse, ont comme conséquence de limiter l’absorption des vitamines liposolubles, dont la vitamine D, ce qui explique la classification à risque de cette population [8]. Même chose chez le nourrisson allaité au sein, chez qui une supplémentation est toujours recommandée en raison de la déficience naturelle du lait maternel en vitamine D3.

 

Une supplémentation systématique pour tous ?

La prévalence de taux sanguins en deçà des valeurs recommandées de 50 nmol / L est estimée entre 25 et 30 % dans la population canadienne, et ce, malgré les mesures de santé publique mise en place au Canada ! Selon plusieurs experts, à partir de l’équinoxe d’automne, il serait nécessaire d’avoir systématiquement recours à une supplémentation en vitamine D3 pour les populations vivant au nord du 40e parallèle. C’est que chez ces populations, la force des rayonnements UVB est nettement insuffisante en automne et en hiver afin d’amorcer la fabrication cutanée de vitamine D3. De plus, avec la baisse de température, le port de vêtements chauds représente une barrière supplémentaire venant limiter davantage la capa cité de notre organisme à subvenir à son besoin en vitamine D3.

Malgré l’absence de consensus, plusieurs experts qualifient la dose fixée par Santé Canada de nettement insuffisante ! Pour plusieurs, cet apport devrait être haussé à 2000 UI chez l’adulte, soit la moitié de l’apport journalier maximal tolérable, ou encore, selon d’autres, varier autour de 50 UI par kilogramme de poids corporel. De son côté, la Société canadienne du cancer recommande à tous une supplémentation journalière de 1000 UI en automne et en hiver. Considérant les risques potentiels liés à une consommation excédant l’apport maximal tolérable, le moyen le plus sécuritaire de vous protéger contre l’excès ou la carence en vitamine D est d’avoir recours à un dosage sanguin et d’initier une supplémentation si votre taux plasmatique de vitamine D3 est inférieur à la norme fixée de 50 nmol / L. Par ailleurs, sachez que les évidences cliniques suggèrent que des taux sanguins de moins de 120 nmol / L sont associés à plusieurs maladies et que la concentration optimale se situerait plutôt autour de 150 nmol/L, soit trois fois plus que la valeur recommandée !

 

En conclusion

Plusieurs professionnels de la santé estiment que malgré les progrès amenés par les révisions des apports nutritionnels de référence en 2010, les nouvelles recommandations sont nettement insuffisantes pour assurer une réelle prévention du diabète, du cancer, des maladies cardiovasculaires ou des maladies auto-immunes. Le problème est que ces recommandations sont strictement basées sur le maintien de la santé osseuse et non sur le potentiel de prévention des pathologies ci-haut mentionnées. Quoi qu’il en soit, la supplémentation en vitamine soleil (1000 IU) durant toute l’année devrait être considérée chez l’adulte à risque de carence en vitamine D, ainsi qu’en automne et en hiver pour l’ensemble de la population vivant en zone nordique.

Bien que les cas de surdosage de vitamine D soient rares, la solution la plus sécuritaire reste de faire mesurer annuellement votre taux sanguin de vitamine D3 par votre médecin de famille.

 

RÉFÉRENCES

  1. DEEB, K.K., D.L. TRUMP, et C.S. JOHNSON. « Vitamin D signalling pathways in cancer: potential for anticancer therapeutics », Nat Rev Cancer, 2007. 7(9): p. 684-700.
  2. MITHAL, A., et coll. « Global vitamin D status and determinants of hypovitaminosis D », Osteoporosis International, 2009. 20(11): p. 1807-1820.
  3. BAZ-HECHT, M. et A.B. GOLDFINE. « The impact of vitamin D deficiency on diabetes and cardiovascular risk », Current Opinion in Endocrinology, Diabetes and Obesity, 2010. 17(2): 113-119.
  4. KUBIS, A.M. et A. PIWOWAR. « The new insight on the regulatory role of the vitamin D3 in metabolic pathways characteristic for cancerogenesis and neurodegenerative diseases », Ageing Research Reviews.
  5. IRURETAGOYENA, M., et coll. « Immune Response Modulation by Vitamin D: Role in Systemic Lupus Erythematosus », Front Immunol, 2015. 6(513).
  6. SANTÉ CANADA. La vitamine D et le calcium : Révision des Apports nutritionnels de référence, 2012.
  7. SANTÉ CANADA. Tableaux des apports nutritionnels de référence (ANREF), 2010.
  8. SATIA, M., et coll. « A randomized two way cross over study for comparison of absorption of vitamin D3 buccal spray and soft gelatin capsule formulation in healthy subjects and in patients with intestinal malabsorption », Nutrition Journal, 2015. 14(1): p. 114.