Publié le 1 septembre 2024
Écrit par Louis Lapointe et Yves Prescott
Si l’on voyage à l’étranger, il est bon de connaître les tabous culinaires et les traditions que les individus de passage sont idéalement tenus de connaître. On a cru que certaines entités, que ce soit Zeus Xenois ou saint Christophe étaient en mesure de protéger les voyageurs et les étrangers lors de leurs pérégrinations.
La relation entre hôte et invité se manifeste de nombreuses façons de par le monde, mais dans de nombreux cas, l’hospitalité est un devoir et l’invité jouit habituellement d’attentions particulières.
En Amérique
Les Premières Nations étaient soucieuses de nourrir leurs invités afin que personne ne quitte une demeure le ventre vide. La tradition du Potlatch, née sur la côte Ouest de l’Amérique du Nord, est certes prétexte à de grands banquets, bien qu’elle ait été illégale au Canada entre 1884 et 1951. Le prestige – pour ceux qui les parrainent encore de nos jours – est d’autant plus grand que les organisateurs distribuent à tout un chacun de nombreux cadeaux, dont un flacon d’huile du poisson-chandelle (aussi connu sous le nom d’« eulakame »). Ce poisson, extrêmement gras, serait en voie de disparition, et ce, pour des raisons qui ne font pas l’unanimité ; le réchauffement climatique reste néanmoins le grand favori au banc des accusés.
Au Québec, l’assiette du « quêteux » illustre une autre forme d’hospitalité : à une époque révolue, le mendiant pouvait passer la nuit chez l’habitant et consommait le même repas que les membres de la famille. Certains foyers, moins accueillants, se contentaient de lui remettre quelques denrées, dont un petit pot de miel ou quelques feuilles de tabac.
En Afrique
En Afrique subsaharienne, un peu à l’image du « quêteux » d’antan, on peut rendre visite à l’improviste à des parents ou à des amis, et c’est pourquoi, la maîtresse de maison prépare toujours une plus grande quantité de nourriture que nécessaire aux besoins quotidiens. Si l’invité vient d’un pays étranger, on dit que les Ghanéens, par exemple, feront tous les efforts nécessaires pour se procurer des victuailles importées, afin que cette personne ne se sente pas trop dépaysée. Ailleurs en Afrique de l’Ouest, et plus marginalement en Afrique centrale, on offrira des noix de kola, jadis utilisées dans la fabrication de boissons gazeuses génériquement connues sous l’appellation de « cola ».
Au nord du Sahara, on sert obligatoirement le thé à la menthe aux invités qui auront apporté des douceurs ou du sucre dans des récipients qui leur seront éventuellement remis et ayant été préalablement remplis de biscuits ou de bonbons. Toutefois, cette tradition semble s’étioler en raison de l’usage de plus en plus répandu des contenants jetables…
Si le thé est la boisson de choix au Maghreb, en Éthiopie, le café fait l’objet d’un culte particulier et sa préparation va de la torréfaction des fèves au service de cette boisson dans de petites tasses dépourvues d’anses ; les convives y ajouteront du sucre, du sel ou du beurre clarifié, ce pays étant en effet ponctué de particularismes régionaux solidement implantés. Ne reculant devant rien pour plaire aux invités, cette cérémonie fondamentale à la culture éthiopienne baigne aussi dans une lourde odeur d’encens.
Quelques impairs
En Hongrie, entrechoquer les verres avant la consommation de boissons alcoolisées est tabou ; en effet, ce geste évoque l’exécution – par les Autrichiens – de héros nationaux ayant lutté pour l’émancipation de leur pays en 1848.
Dans les nombreux autres pays où les boissons alcoolisées dominent, il faut savoir que chez les Russes, par exemple, refuser un verre de vodka ne sera guère apprécié de vos hôtes, qui vous auront également offert du pain et du sel à votre arrivée. Cette pratique d’offrir une miche de pain à un visiteur est fort répandue et est pratiquée tant par les chrétiens orthodoxes, que les habitants des États baltes que dans la culture juive. En Égypte, par contre, il est très mal vu pour un invité d’ajouter du sel à un plat qui vient de nous être servi ; on percevra ce geste comme étant la preuve que les mets qui vous sont offerts sont fades et inadéquats.
Dans la zone Pacifique Sud, le kava, boisson intoxicante, faite à partir de racines de poivre, témoigne d’idéaux de bonté et d’hospitalité. Cette boisson se consomme toujours en groupe, bien qu’elle soit aussi disponible chez nous. Cet extrait de plante est vendu en poudre et a été temporairement retiré des tablettes il y a une vingtaine d’années. En dehors de l’Océanie, elle se consomme – avec parcimonie – comme cure pour vaincre l’insomnie, ou simplement dans le but de promouvoir la relaxation.
Le voyage et les découvertes
Si vous êtes de passage au Japon, vous aurez remarqué que les distinctions entre les classes sociales ne sont pas toujours évidentes. Néanmoins, les cadeaux que les Nippons apportent chez des parents ou des amis peuvent atteindre des sommes mirobolantes et viendront préciser la classe sociale à laquelle on appartient. On pense, entre autres, à des melons mis en vente à 100 dollars pièce ou encore à des fraises « albinos » vendues environ 12 dollars… l’unité !
Les pique-assiettes doivent prendre note que dans le sud des États-Unis, l’hospitalité prend un tout autre sens que celles précédemment citées, dans la mesure où ce sont des qualités morales, telles la gentillesse ou l’aide apportée aux touristes qui en définissent les paramètres, et non le partage d’une bonne table.
Ceux et celles qui ont voyagé en Inde auront constaté que les sucreries, faites à base de lait, de beurre et de sucre, font partie de toutes cérémonies, qu’il s’agisse d’une fête religieuse, d’un mariage ou d’une réunion entre parents et amis. Ces sucreries sont offertes dans le but de raffermir l’amitié et la solidarité entre les individus.
En conclusion
Règle générale, le devoir d’hospitalité tend à disparaître dans les sociétés industrialisées, alors qu’aujourd’hui encore, les peuples vivant en marge de l’occidentalisation sont fiers de partager (sans que ce soit toujours parfaitement désintéressé) ce qu’il y a de meilleur dans leur foyer avec ceux et celles qui s’aventureront chez eux.