Publié le 16 octobre 2016
Écrit par Daniel-J. Crisafi, nd.a., m.h., ph. d.
On m’a diagnostiqué de l’ostéopénie il y a quelques semaines. Or, ma mère s’est cassée le fémur l’hiver passé en tombant. Cet accident l’a invalidée pendant plusieurs mois, elle commence à peine à récupérer, et ce, très lentement. Que puis-je faire de façon naturelle pour m’aider à prévenir l’ostéoporose ?
Merci pour votre question. Malgré le fait que l’ostéoporose soit un état squelettique ayant comme conséquence des effets débilitants, il est possible de la prévenir, de la ralentir et même de la renverser. Commençons par le commencement, une définition.
Le terme « ostéopénie » est utilisé lorsqu’il y a jusqu’à 11 % de baisse de la densité osseuse. « L’ostéopénie est une faiblesse de l’os qui n’est pas tout à fait normale et qui n’est pas suffisamment grave pour justifier le terme d’“ostéoporose” » . Au-delà de 11 % de baisse de la densité osseuse, il est question d’ostéoporose. L’ostéoporose est donc un état de dégénérescence de l’os – non une maladie – caractérisée par une perte de la densité osseuse, et qui peut mener à des fractures souvent débilitantes.
Dans bien des cas, femmes et hommes perdent leur autonomie à cause d’une fracture osseuse due à l’ostéoporose. Du point de vue financier, cette fragilisation osseuse coûte très cher. En effet, le coût annuel pour traiter l’ostéoporose et ses fractures est estimé à 1,9 milliard de dollars, selon Ostéoporose Canada. Environ 10 % des gens âgés de 40 ans ou plus ont reçu un diagnostic d’ostéoporose et 8 % ont subi une fracture ostéoporotique.
Plusieurs facteurs militent pour créer cette baisse de densité osseuse. Notons que les facteurs les plus importants sont :
Regardons ces facteurs « ostéoporotiques » plus en détail.
ÂGE ET SEXE
Tous les autres facteurs étant égaux, l’âge et le sexe jouent un rôle important dans le développement de l’ostéoporose. Même si ce sont des facteurs fixes, l’âge tout au moins, j’aimerais noter quelques points par rapport à ceux-ci.
La masse osseuse atteint son seuil maximal entre 25 et 30 ans. Après cette période d’âge, il y a une baisse graduelle de la densité osseuse. Il y a trois points à retenir. Premièrement, il est important d’augmenter la masse osseuse autant que possible avant cet âge. Des études norvégiennes ont démontré que les enfants et adolescents sédentaires arrivent à l’âge auquel la masse osseuse baisse avec un handicap. Ils n’ont pas développé une masse osseuse suffisante. Enfants et adolescents devraient donc être encouragés à faire de l’activité physique quotidiennement. Deuxièmement, si la masse osseuse baisse inévitablement après 30 ans, nous devrions faire de plus grands efforts pour gérer correctement les facteurs qui affectent le métabolisme osseux à partir de cet âge. Le dernier point est assez évident ; si la perte de la densité osseuse est inévitable, ce n’est pas une raison pour l’accélérer. S’il y a déjà quelques flammes, n’ajoutons pas de l’essence au feu. Si la perte de la densité osseuse est inévitable, la vitesse et la sévérité à laquelle elle a lieu sont par contre très modifiables.
LES HORMONES
Malgré le fait que nous mettions l’accent sur l’œstrogène lorsqu’il est question d’ostéoporose, plusieurs autres hormones sont aussi impliquées. Les androgènes jouent un rôle important dans le métabolisme osseux aussi bien chez la femme que chez l’homme. Ces hormones « masculines » sont produites chez les deux sexes, et leur production baisse aussi chez les deux, tout comme celle de l’œstrogène chez la femme. La progestérone, quant à elle, est une hormone produite chez la femme et dont l’un des rôles est d’assurer la gestation. Elle joue aussi, tout comme l’œstrogène, un rôle dans le métabolisme osseux.
La baisse de l’œstrogène chez la femme ménopausée est généralement considérée comme étant le facteur hormonal le plus important, lorsqu’il est question d’ostéoporose. Or, il est intéressant de noter que dans plusieurs régions du monde, les femmes ménopausées ont moins de fractures que les femmes nord-américaines ou européennes. Autre fait intéressant, c’est dans les pays où elles sont généralement plus actives physiquement, et donc où le risque de fractures devrait être plus élevé, que les femmes subissent le moins de fractures. Les statistiques suggèrent en plus que lorsqu’une société améliore son « niveau de vie », amélioration selon nos standards de pays industrialisés, le taux de fractures augmente. Pourquoi mise-t-on tant sur la thérapie de remplacement hormonal, lorsqu’il est question d’ostéoporose ? Le Dr André ira jusqu’à écrire : « Dans la prévention du risque fracturaire, le rapport bénéfice / risque de la THS (thérapie hormonale de substitution), quel que soit le produit envisagé, est défavorable sur la base des données actuellement disponibles. »
En ce qui concerne les androgènes, la situation est différente. En effet, des études ont démontré que l’exercice physique augmente de façon mesurable les androgènes chez les hommes aussi bien que chez les femmes. Ces effets sont surtout évidents avec les exercices de résistance .
Nous y reviendrons.
Œstrogènes phytothérapeutiques
Certaines plantes ont démontré des effets positifs sur l’équilibre hormonal féminin. Celles-ci contiennent des œstrogènes de plantes, ou phytoœstrogènes, lesquels peuvent améliorer le métabolisme osseux sans pour autant avoir les effets nocifs des œstrogènes de remplacement. Il faut admettre qu’ils ne sont pas aussi biologiquement actifs que les œstrogènes de remplacement, mais l’utilisation de ces derniers n’est pas toujours aussi efficace que l’on veut nous le faire croire.
Parmi les aliments ayant un niveau élevé de phytoœstrogènes, notons toutes les légumineuses, dont le soya en particulier ainsi que les graines de lin. Des plantes telles que le trèfle rouge et l’actée àgrappesnoires ontaussidémontrédeseffets positifs sur le plan de l’amélioration des niveaux d’œstrogènes chez les femmes ménopausées. Finalement, dans des études animales, un champignon, le Cordyceps, a démontré d’excellents effets contre l’ostéoporose associée aux changements hormonaux de la ménopause .
Il existe encore beaucoup de controverse au sujet de la consommation de soya et de graines de lin chez les femmes qui ont reçu le diagnostic d’un cancer du sein hormonodépendant. Faute de preuves concluantes de part et d’autre, je préfère pécher par excès de prudence et suggérer que celles-ci s’abstiennent de consommer du soya ou des graines de lin.
EXERCICE DE RÉSISTANCE
Peu de facteurs ont un effet aussi important pour assurer la santé des os. En effet, le corps ne maintient la masse osseuse (tout comme la masse musculaire) que s’il doit le faire afin de contrecarrer les effets de la gravité. Pas de gravité, pas de maintien de la masse osseuse. C’est pour cela que les personnes alitées, tout comme les astronautes vivant en apesanteur, perdent de la masse osseuse . Sans besoin de résister à la gravité, nul besoin de masse osseuse. C’est ici que l’exercice joue un rôle primordial. En effet, l’exercice, surtout l’exercice de résistance, augmente « artificiellement » la gravité. Ayant plus de « stress » gravitationnel, le corps s’efforce de maintenir sa masse osseuse aussi bien que musculaire.
Fait intéressant, une étude publiée dans la revue de l’American College of Sports Medicine a démontré que l’exercice de résistance (haltères et machines) avait des effets sur la masse osseuse indépendamment du remplacement hormonal ou de la prise de suppléments de calcium. Consultons le tableau récapitulatif ci-contre: Une question qui ressort de cette étude est « Comment se fait-il que les individus du groupe 4, qui prenaient des suppléments de calcium aient eu une baisse de leur masse osseuse ? » La réponse repose sur les études chez les astronautes. Si vous ne faites pas suffisamment d’activité physique, votre corps n’utilise pas le calcium pour maintenir sa masse osseuse. Le calcium est certes important, mais le corps ne l’utilise pas s’il ne pense pas en avoir besoin.
Donc, si vous voulez avoir un impact positif sur votre masse osseuse, il faut augmenter les stress que celle-ci subit avec des exercices de résistance. Pas de résistance, pas de masse !
POURQUOI NE PAS MARCHER, COURIR OU NAGER ?
L’eau nous offre beaucoup moins de stress gravitationnel. En effet, nous pouvons flotter dans l’eau. Nager, quoi qu’excellent sur les plans musculaire et cardiovasculaire, n’est pas l’exercice à privilégier afin d’augmenter la masse osseuse. Quant à la marche ou la course, celles-ci n’ont que peu d’effets sur la masse osseuse.
CONCLUSION
S’il y a une chose à retenir de cette première partie de l’article, c’est que l’exercice joue un rôle primordial dans la prévention de l’ostéoporose. Vous pouvez avoir un niveau hormonal adéquat et une alimentation saine, mais si vous ne faites pas d’exercice, vous n’aiderez pas votre masse osseuse. Par contre, si vous faites suffisamment d’exercice afin de stimuler votre masse osseuse mais que vous ne donnez pas à votre corps les matériaux requis afin de construire ces mêmes os, vous serez en déficit. La prochaine partie de cet article abordera donc les facteurs nutritionnels essentiels à la densité osseuse. Et non, le calcium n’aura pas priorité !
RÉFÉRENCES
Disponibles à la demande du lecteur.
Exercice de résistance
L’exercice de résistance est toute forme d’exercice qui force les muscles squelettiques à se contracter. Il implique une résistance contre laquelle on doit forcer.
Une résistance est une résistance et un poids un poids, donc toute résistance, que ce soit notre poids corporel, des bandes élastiques, des poids et haltères ou des boîtes de conserve aura un effet bénéfique sur la masse aussi bien osseuse que musculaire chez la femme comme
chez l’homme.
Quelques points à retenir