Publié le 27 janvier 2023
Écrit par Sylvie Leblanc, n.d.
Avez-vous déjà remarqué, mes cuistots, que notre alimentation varie en fonction des saisons ?
En raison de notre situation géographique nordique, nous ne consommons vraiment pas le même genre de menu l’été et l’hiver. C’est normal, car, avec les froids de janvier, il nous faut une alimentation remplie d’énergie pour maintenir notre température corporelle afin de bien profiter de l’hiver.
Et si on comparait notre mode alimentaire à celui des pays nordiques afin de voir comment eux aussi assurent la vitalité dans leur nordicité, mes cuistots, ça vous dit ?
Pour bien vivre l’hiver, il faut adopter le « régime nordique », un mode d’alimentation qui assure une espérance de vie plus élevée, tout en prônant une alimentation locale ainsi que des valeurs santé pour l’économie et l’écologie des régions nordiques. Ce type d’alimentation nous provient des pays scandinaves tels que la Finlande, la Norvège, la Suède et le Danemark. Le régime alimentaire des Scandinaves permet de vivre plus longtemps et en bonne santé. La qualité de la nourriture, la sensibilité aux saisons et à la culture biologique, la résistance aux tendances étrangères (et à la restauration rapide, notamment) : les Nordiques ont tout bon !
D’ailleurs, plusieurs aliments « bidon » : colorants, aliments transgéniques, gras trans, sont bannis en vertu de législations en place dans les pays scandinaves. L’alimentation saine, ils prennent ça très au sérieux là-bas, et avec raison !
De nombreuses recherches ont d’ailleurs permis de constater que ces populations ont une durée de vie bien supérieure à la moyenne des pays du reste du monde, malgré le froid.
En effet, les Scandinaves ont une tout autre manière de s’alimenter. Ils privilégient tout ce qui est riche en matières grasses et en omégas 3, les antioxydants, ainsi que les aliments avec un taux élevé de vitamine D. Les spécialistes en nutrition et en santé qui ont effectué des études sur le sujet s’accordent pour dire que ce type de régime prévient les risques d’obésité, de cholestérol, de maladies cardiovasculaires et de diabète. Le premier but du régime nordique est surtout d’avoir une santé de fer, pour ainsi augmenter son espérance de vie. À long terme, ce type d’alimentation contribue à remodeler et à restructurer le corps et l’organisme. Sans compter que les sources de gras marins, remplies de vitamine D et d’omégas 3, sont formidables pour contrer la dépression saisonnière, que j’appelle le « syndrome d’hibernation de l’ours » et qui affecte plusieurs de nos congénères.
Voici donc la liste, non exhaustive, des aliments qui entrent dans la composition des repas scandinaves : tous les produits sources de bonnes graisses comme l’huile de canola bio, l’huile de tournesol bio et les poissons gras (comme le hareng, le maquereau ou le saumon). Il y a également la morue nordique (Groenland) et la truite, qui sont des poissons plus maigres, mais particulièrement riches en protéines, à consommer plusieurs fois par semaine. Pour les protéines, mis à part les poissons et les mollusques, les Scandinaves privilégient les œufs fermiers et bios, les produits laitiers bios et locaux. Ils sont aussi friands de volailles plus sauvages telles l’oie et la pintade. Le gibier est préféré, selon la croyance que les viandes d’élevage sont moins saines que les viandes sauvages. Ainsi, le wapiti, le lapin ou le renne apportent des protéines de choix, à raison de deux fois par semaine.
Dans leur alimentation quotidienne, ces descendants des Vikings incluent aussi les céréales. L’orge, le seigle, le sarrasin, l’épeautre ou l’avoine sont les favoris. Pour ce qui est des légumes, souvent fermentés ou marinés, on retrouve le chou (la choucroute et d’autres produits fermentés), les oignons, les betteraves, les courges d’hiver et les carottes, qui représentent les sources d’antioxydants les plus répandues dans la cuisine nordique.
Ils consomment aussi les petites pousses faites maison, comme la mâche ou les fines herbes, en salades. Enfin, il y a les différentes baies, comme les mûres, le cassis ou les myrtilles (chez nous, ce sont des bleuets), les airelles (chez nous, on parle plutôt des canneberges), les baies de sureau, les groseilles et les pommes, qui sont non seulement de bonnes sources d’antioxydants, mais également de vitamines.
Voilà donc des légumes et des petits fruits qui ressemblent beaucoup à nos cultures locales et traditionnelles. L’aspect écolo de ce régime préconise des produits de saison et locaux.
Les Norvégiens, les Islandais, les Suédois, les Finlandais et d’autres populations nordiques attaquent la journée avec un méga petit déjeuner. Prêts à attaquer la journée de façon viking ?
Le poisson (fumé ou frais) occupe une place de choix dans l’alimentation scandinave, particulièrement au petit déjeuner : du saumon fumé, du hareng et des œufs de poissons ou des œufs de poules sur des craquelins ou des gaufrettes assaisonnées, souvent aux graines de carvi, ou sur du pain de seigle très mince (spécialité finlandaise), avec du beurre, du fromage à pâte cuite ou du fromage frais. On peut aussi trouver sur la table du « porridge » (gruau), du pain d’épices et ce qu’on appelle ici des danoises (ces pâtisseries fourrées de confiture aux baies régionales, de fruits secs ou de crème d’amande), pour la touche sucrée.
On accompagne tout cela d’un thé ou d’une tisane : lorsqu’il fait froid, une boisson chaude est toujours la bienvenue !
Les smorrebrods
Pour vous mettre en appétit, mes conquérants de l’hiver, voici quelques suggestions de gueuletons d’inspiration scandinave.
Les Scandinaves sont passés maîtres dans l’art de la tartine pour déjeuner, dîner et souper, avec ou sans petite soupe, pour accompagner ou non les mets cuisinés en casserole.
Le smorrebrod est un classique au Danemark et en Scandinavie ! Voici comment faire votre version à la maison, pour un petit dîner qui fera des jaloux. C’est comme faire un pique-nique, en plein hiver.
En danois, smor signifie « beurre », et brod, « pain ». À la base, les smorrebrods sont donc des tartines beurrées auxquelles on ajoute les garnitures qu’on a sous la main.
Traditionnellement, on utilise le fameux pain de seigle au levain dense et texturé finlandais, ou rugbrod. Puisqu’il est plutôt difficile à trouver ici, pour une version à la suédoise, optez pour des craquelins à base de seigle, de type Wasa ou Ryvita, ou encore les croquantes gaufrettes du Pain des fleurs sans gluten au sarrasin, que j’adore !
Des ingrédients simples, colorés et de qualité sont la clé pour garnir votre smorrebrod. L’idée, c’est de le mettre en valeur et de le présenter de façon élégante et savoureuse. Pas étonnant que le smorrebrod soit une vraie vedette sur Instagram, sérieux !
Variez vos smorrebrods au gré des saisons : de beaux restants d’asperges au printemps, des herbes fraîches en été, des tranches de pommes en automne, et des rondelles de betteraves cuites en hiver… Amusez-vous à faire toutes sortes de combinaisons !
En famille ou entre amis, c’est comme un brunch à toute heure du jour, pour se rassasier. Bref, seule votre imagination, mes cuistots, dirigera la création de vos tartines « touski » ! Qui a dit que créer un petit lunch était compliqué !
Les aliments qui réchauffent
Voyons d’autres éléments du monde alimentaire qui procurent de la chaleur en hiver. Selon plusieurs ressources scientifiques, les épices sont des aliments favorisant la chaleur corporelle. Bien entendu, la grande majorité des épices ne sont pas de productions locales, mais d’usages traditionnels : la cannelle combat activement la sensation de froid en stimulant la circulation sanguine, notamment aux extrémités de l’organisme. N’oublions pas le gingembre et le curcuma !
Le poivre, comme le piment de Cayenne, contient de la capsaïcine, une molécule qui stimule la circulation sanguine et provoque un réchauffement de l’organisme. De plus, en activant la digestion, elle a pour effet d’augmenter mécaniquement la température corporelle.
Du côté des aromates, l’ail contient une forme naturelle de soufre alimentaire qui réchauffe l’organisme et qui possède des propriétés antioxydantes, soit le MSM (méthyle sulfonyle méthane).
Saviez-vous que la moutarde, un autre condiment, active la circulation sanguine et entraîne un afflux de chaleur dans tout le corps ? Cet afflux de chaleur, qui favorise la décongestion des voies aériennes, s’avère d’ailleurs bien utile en cas de rhume. Vos parents ou vos grands-parents, mes cuistots, connaissent peut-être les cataplasmes de moutarde en cas d’infections des voies respiratoires (petite peau fine s’abstenir) !
Abordons maintenant les aliments qui nous satisfont d’un point de vue gustatif, tout en créant un effet de thermogénèse (mécanisme de production et de régulation de chaleur de l’organisme).
Les champignons, qui en plus d’avoir la saveur « umami », provoquent des sécrétions enzymatiques qui facilitent la digestion des protéines et assurent une régulation de la glycémie.
Imaginez, mes cuistots, que, selon plusieurs sources, il semblerait que la raclette est un des menus qui réchauffent le plus ! La raclette est originaire de la Suisse, un autre pays où les montagnes et la neige enchantent, et n’oublions pas la fameuse fondue au fromage suisse. La raclette agit de deux façons sur la chaleur : d’une part, sa haute valeur calorique augmente la production d’énergie, ce qui favorise la thermogénèse, et, d’autre part, la chaleur diffusée par les aliments procure une sensation de bien-être et réduit notablement la sensation de froid. Bien entendu, il ne faut pas être intolérant au lactose ou aux protéines bovines pour profiter de ces effets de chaleur !
Dans les légumes, la citrouille ou le potiron (courges d’hiver) sont reconnus pour favoriser la circulation, ce qui a pour effet d’augmenter la température corporelle. En outre, puisque ce sont des légumes assimilés à un féculent, ils libèrent de l’énergie au fil de la journée et permettent au corps de conserver une température optimale. En soupe, farcies ou gratinées, les courges s’apprêtent d’une multitude de façons.
Parlant de soupe, bien entendu, les potages, les soupes gratinées, les chaudrées et les soupes de légumes sont des mets qui favorisent la chaleur. Les soupes permettent, grâce à leur richesse en légumes, d’apporter les nutriments et les antioxydants nécessaires à l’organisme tout en augmentant la température corporelle. Il est bien connu que le bouillon de poulet a des pouvoirs « magiques ». Le bouillon de poulet, ou bouillon d’os, est sans aucun doute un incontournable pour guérir n’importe quel rhume, n’importe quelle gastro ou déprime. Il semblerait même que l’effet bénéfique est accentué lorsqu’une autre personne le prépare pour vous, c’est sûrement la valeur « chaleur humaine » ajoutée !
Bien sûr, les boissons chaudes, les tisanes épicées et les chocolats chauds de qualité sont des compagnons de choix à emporter avec soi en toute occasion pour profiter de l’hiver.
Bref, manger de façon nordique, c’est consommer des aliments simples, bons pour la santé, de saison, biologiques et locaux, écologiques (car ne venant pas de loin), et faciles à trouver. C’est composer des menus équilibrés avec de bonnes protéines, de bons glucides et de bons gras. C’est cuisiner soi-même, gage d’anti-malbouffe et d’économies. C’est aussi renouer avec la nature, dans le respect des saisons.
Et surtout, c’est manger ensemble, attablés, dans la joie et la bonne humeur, plutôt que chacun dans son coin, à n’importe quelle heure, avec pour seul objectif de se remplir le ventre. Du pur bon sens, en somme, et c’est tellement plus près de notre héritage traditionnel en matière d’alimentation et de notre terroir. Et si on mangeait comme les Vikings pour rester en santé et au chaud, qu’en pensez-vous en ce début de l’hiver, mes cuistots ?
RÉFÉRENCES :
«La diète scandinave», Trina Hahnemann, Éditions de l’Homme, 2011, 143 pages