Nutrition évolutive des chiens – PARTIE 1

Publié le 15 janvier 2019
Écrit par Adaptation d’extraits de l’ouvrage d’Ian Billinghurst intitulé « Pointing the Bone at Cancer ».

Nutrition évolutive des chiens – PARTIE 1
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L’évolution canine… notre guide le plus fiable en matière de nutrition canine.

Cet article est une adaptation d’extraits de l’ouvrage d’Ian Billinghurst intitulé « Pointing the Bone at Cancer ». Il y résume les leçons que nous donne l’évolution — à propos de l’alimentation des chiens — pour une santé et une longévité maximales.

Introduction

Est-ce que quelqu’un comprend vraiment, exactement, ce que nos chiens devraient manger quotidiennement et pour la vie ? Comment pouvons-nous le savoir ? Pour un biologiste de l’évolution, la réponse est (ou devrait être !) simple. Il reviendra sur le passé et déterminera ce que les chiens ont mangé tout au long de l’évolution, les aliments qui ont façonné leur génome et qui ont fait d’eux ce qu’ils sont aujourd’hui, nutritionnellement parlant. Au cours de ce processus, nous recherchons des aliments plutôt que des nutriments, tout l’éventail d’aliments crus entiers, dont nos chiens ont besoin à la suite de leur évolution.

Quand on considère le rôle que joue l’évolution dans la détermination des besoins nutritionnels d’une espèce, il est important de bien comprendre que le processus évolutif n’a pas pris fin à un moment précis du passé, mais que l’évolution se poursuit encore aujourd’hui. Alors, qu’est-ce que cela veut dire pour les chiens, maintenant ?

Il est généralement admis que le chien et le loup d’aujourd’hui ont eu un ancêtre commun — un loup — qui a vécu il y a entre 100 et 200 000 ans. C’est ce qui favorise la croyance, dans certains milieux, selon laquelle l’« alimentation du loup » est l’alimentation que nous devrions donner à nos chiens aujourd’hui. Cependant, l’évolution a produit un certain nombre de changements chez le chien, de sorte que l’alimentation canine optimale d’aujourd’hui ne correspond pas exactement à l’alimentation requise ni par le loup d’aujourd’hui ni par leur ancêtre commun.

La première question que l’on peut se poser est donc : « Dans quelle mesure le régime alimentaire du loup d’autrefois devrait-il influencer le génome nutritionnel — les besoins nutritionnels — du chien d’aujourd’hui ? »

Pour trouver la réponse, nous nous penchons sur les mitochondries de nos chiens, ces organites cellulaires qui fournissent de l’énergie aux cellules. Ces centrales énergétiques cellulaires nous sont transmises, que nous soyons des chiens, des chats ou des humains, uniquement par notre mère, et comme les mitochondries étaient autrefois des parasites bactériens, elles ont leur propre ADN, et l’ADN mitochondrial se transforme à un rythme connu au fil de l’évolution.

Cela nous permet de comparer l’ADN mitochondrial du loup d’aujourd’hui et celui du chien moderne et, à partir des différences, de déterminer leur degré de parenté. Cette démarche nous permet de découvrir que le chien et le loup d’aujourd’hui sont étroitement liés. Il en ressort clairement que l’alimentation ancestrale du loup — composée principalement d’aliments d’origine animale — devrait influer le plus sur ce que nous devrions donner à manger à nos chiens aujourd’hui. Cependant, comme il est indiqué, ce n’est pas si simple. Nous devons aussi examiner toute l’histoire de l’évolution des chiens qui se compose de cinq époques consécutives, chacune ayant influencé, à des degrés divers, ce que nous devrions donner à manger à nos chiens aujourd’hui. Ces cinq époques sont les suivantes :

  • L’ère du « préattachement » à l’homme ;
  • L’ère du « suiveur de campement » ;
  • L’ère de la « domestication » ;
  • L’ère du « développement de la race » ;
  • L’ère de l’«alimentation moderne pour animaux de compagnie ».

 

1.L’ère du « préattachement » à l’homme

Cette période a commencé, à tout le moins, il y a environ 200 millions d’années, avec l’apparition des premiers vrais mammifères qui étaient insectivores. Il convient de noter que ces animaux ne mangeaient pas de grains cuits, bien que les insectes qu’ils consommaient pouvaient contenir des grains (crus) partiellement digérés dans leur appareil digestif.

Il y a environ un million d’années sont apparus les premiers vrais loups. Ceux-ci étaient principalement des chasseurs qui tuaient et mangeaient la carcasse entière de leur proie. Parfois, cela pouvait inclure des matières végétales présentes dans l’intestin de la proie, surtout quand le gibier se faisait rare. Ils étaient aussi des charognards qui mangeaient les restes de victimes d’autres animaux, principalement des os et peut-être une partie du contenu intestinal. Étant opportunistes, ces loups pouvaient exister comme omnivores, mangeant de l’écorce, de l’herbe, des fruits, des baies, etc., pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois, en fait, tout ce qui pouvait leur permettre de survivre en période difficile. Or, les périodes difficiles étaient normales dans la vie du loup de l’époque, tout comme maintenant. Ce loup ancien était donc un omnivore carnivore, un charognard et un opportuniste. Cependant, s’il y a une chose que le loup ne mangeait pas, c’était une nourriture à base de grains cuits.

Compte tenu de l’extrême durée de cette période d’adaptation nutritionnelle qui a « précédé l’attachement à l’homme » et de l’étroit degré de parenté qui existe entre ce loup ancien et le chien d’aujourd’hui, nous devons conclure que cette première époque est celle qui a eu le plus d’impact sur ce que les chiens devraient manger de nos jours.

Cela signifie que le chien d’aujourd’hui, ayant hérité de la plus grande partie du génome nutritionnel de cet ancien loup, a évolué en tant que mangeur d’aliments crus, et nécessiterait une alimentation à base de carcasses crues entières. Il est donc, un omnivore et non un carnivore strict. Faites la comparaison avec le chat— qui est un carnivore strict — adapté au modèle dit « proie entière ». Cela n’est pas valable pour le chien.

Cette période a pris fin il y a environ 100 000 à 200 000 ans.

2.L’ère du « suiveur du campement »

Certains loups ont commencé à pister des humains nomades et à fourrager dans les restes de leurs trophées de chasse, une excellente façon de vivre et de survivre. Ces loups étaient moins craintifs et acceptaient mieux les humains ; l’évolution se chargeait de sélectionner les loups satisfaits d’adopter un mode de vie plus proche du charognard et moins du chasseur, consommant moins de nourriture fraîche et entière et davantage de vieilles carcasses pourries, des os et le contenu intestinal des proies. Ces traits psychologiques et nutritionnels ont créé une distinction entre ce groupe de loups et ceux qui ne suivaient pas les campements. Cela dit, eux non plus ne mangeaient toujours pas beaucoup d’aliments cuits et pas du tout de grains cuits. Il est important de noter qu’ils avaient alors tendance à se reproduire au sein de leur propre groupe de suiveurs de campement. Cette période s’est achevée il y a environ 15 000 ans. C’est à ce moment qu’est apparue la troisième ère, au cours de laquelle sont survenus les changements les plus formidables dans le génome nutritionnel de ces « loups qui se transformaient en chiens ».

 

3.L’ère de la « domestication »

Cette troisième ère a été marquée par l’émergence du chien moderne. À cette époque, l’humanité commençait à manquer de gros gibier qu’elle chassait depuis 400 000 ans et passait graduellement du mode de vie de chasseur-cueilleur à celui d’agriculteur. Les humains se sont mis à dépendre de plus en plus des grains, ainsi que des moutons, des chèvres et du bétail domestiqué. Au cours de cette période d’évolution extrêmement courte, les humains sont passés d’une alimentation riche en gibier sauvage, en poisson et en sauvagine, comportant quelques légumes, fruits et noix, à une alimentation largement basée sur les produits céréaliers.

Les restes osseux d’humains de cette période montrent une forte diminution de la taille d’environ 6 pouces (15 cm) et une augmentation spectaculaire des processus dégénératifs comme l’arthrite. À cette époque, en raison d’une source alimentaire relativement fiable et constante (les grains), la population humaine a connu un essor spectaculaire. Cette situation s’est accompagnée d’une augmentation inévitable de déchets qui formaient un amas à l’extérieur de chaque établissement humain. Ce dépotoir était très attrayant pour les loups qui suivaient les campements. C’est alors qu’ils ont commencé à se reproduire à proximité des humains. Leur régime alimentaire est devenu très différent de celui des autres loups, beaucoup plus riche en os crus auxquels restaient attachés des morceaux de viande et de cartilage, plus riche en matières végétales, et dans divers états de décomposition, incluant le contenu stomacal des ruminants.

 

Par ailleurs, il y aurait eu très peu ou pas du tout de déchets céréaliers.

En l’espace de quelques milliers d’années, ces décharges ont amorcé la rapide évolution du loup en chien. Cette transformation s’est produite, nous le savons maintenant, parce que ces décharges ont causé une sélection naturelle des loups qui avaient le trait psychologique de la « convivialité ». Les gènes de « courte distance de fuite ») se sont accompagnés de certains traits physiques, dont un raccourcissement de la mâchoire, un changement proportionnel de la dentition, une tête en forme de dôme plus prononcé et des modifications à la couleur du pelage, à la longueur des pattes et même au cycle reproducteur. Tout cela s’est produit sans effort conscient de la part de ces premiers humains. Au fil du temps, les traits de convivialité, de familiarité et d’acceptation de la présence des humains se sont ancrés plus profondément et plus fermement dans le génome de ces « loups qui se transformaient en chiens ».

Il n’a fallu que de 10 000 à 15 000 ans de changements génétiques sur les décharges de l’humanité pour créer un animal qui était devenu moins chasseur, plus charognard, plus omnivore et plus coprophage (se nourrissant d’excréments) et dont l’alimentation dépendait beaucoup plus de l’humain. Cependant, ces changements du génome nutritionnel de nos chiens n’ont pas eu d’impacts majeurs sur la physiologie de base des chiens. En effet, les chiens sont restés adaptés à la nourriture crue et se sont encore plus adaptés à la nourriture contaminée par des bactéries.

Bien que ces animaux soient maintenant plus en mesure de digérer les féculents, leur corps est resté incapable de s’adapter aux conséquences physiologiques et métaboliques de la consommation de masses d’aliments solubles riches en glucides, particulièrement les grains riches en gluten.

Cette ère s’est terminée il y a environ 2000 à 3000 ans.

 

4.L’ère du « développement de la race »

Cette époque a duré jusqu’à 2000 ans pour certaines races et moins de 100 ans pour d’autres. De plus, étant donné la brièveté de la période en termes d’évolution, son impact sur les besoins nutritionnels du chien moderne a été négligeable. De plus, les différences alimentaires ou les changements survenus au cours de cette période ont été minimes, les aliments restant crus et surtout d’origine animale. En outre, permettez-moi de le souligner, les grains cuits (glucides) ont continué de représenter un élément minime ou totalement absent de l’alimentation de la plupart des races de chiens pendant cette période. Nous sommes donc forcés de conclure que cette ère de « développement de la race » a produit très peu de changements génétiques dans le génome nutritionnel canin.

5.L’ère de l’« alimentation moderne pour animaux de compagnie »

Cette ère, celle de la fausse nourriture industrielle, a commencé réellement pendant la grande dépression des années 1930 et s’est poursuivie jusqu’à nos jours. C’est l’époque la moins importante sur le plan de l’influence sur le génome nutritionnel canin ; elle représente un simple « clin d’œil » dans l’évolution. Malheureusement, ce régime a marqué le début d’une période de vieillissement et de dégénérescence, les chiens étant incapables de s’adapter à un changement nutritionnel d’une ampleur qu’ils n’avaient jamais connue auparavant. Cette cinquième ère nutritionnelle, celle des aliments transformés pour animaux de compagnie, n’a pas laissé la possibilité de sélectionner des chiens dont le génome pouvait favoriser les aliments transformés, si de tels animaux existaient. C’est en partie parce que les troubles de santé causés par ces aliments ont surtout une incidence sur les années qui suivent la reproduction et bon nombre des troubles associés à la reproduction sont surmontés par des changements dans les pratiques d’élevage et des interventions de la médecine vétérinaire moderne.

En bref, cette ère de la fausse nourriture industrielle moderne pour animaux de compagnie n’a eu aucun impact sur le génome nutritionnel du chien moderne.

 

Qu’avons-nous appris ?

Compte tenu de l’évolution du génome nutritionnel canin décrit ci-dessus, nous sommes maintenant en mesure de concevoir un programme nutritionnel sain pour nos chiens modernes. Dans la deuxième partie de cet article, en nous fondant sur l’évolution de nos chiens telle qu’elle vient d’être expliquée, nous présenterons les bases de l’alimentation crue.