Peut-on se protéger naturellement de la malaria dans les pays à risque ?

Publié le 9 mars 2017
Écrit par Sylvie Rousseau, nd.a.

Peut-on se protéger naturellement de la malaria dans les pays à risque ?

En 2012, on a recensé environ 207 millions de personnes atteintes de malaria et 627 000 en sont décédées. Avec ce palmarès, le paludisme, aussi appelé malaria, reste la parasitose la plus importante au monde.

 

Les zones les plus à risque sont l’Asie, l’Afrique et l’Amérique latine, mais plusde80%descassurviennentenAfriquesubsaharienne. Cette maladie a été découverte en 1880 à l’hôpital militaire de Constantine (en Algérie), par Alphonse Laveran (prix Nobel de physiologie en 1907). On croyait à l’époque que les marécages, avec leur air stagnant, étaient responsables de la propagation de la maladie. Le médecin Ronald Ross prouva par la suite que les moustiques étaient les vecteurs de la malaria. Le frottis sanguin et la goutte épaisse sont les deux examens qui permettent de diagnostiquer le paludisme et d’en identifier l’espèce.

Avec les voyageurs de plus en plus nombreux qui visitent des régions éloignées où cette maladie est répandue, le paludisme est devenu un nouveau problème de santé. Certaines régions sont endémiques alors que d’autres se retrouvent à risque seulement lors des saisons des pluies. En effet, ce type de saison permet aux moustiques de se reproduire et de proliférer dans les endroits marécageux. Alors que les résidents des régions à risque finissent par développer une immunité au paludisme au cours de leur vie, les voyageurs sont plus susceptibles d’en être infectés, puisque leur immunité contre ce parasite n’est pas encore développée.

 

LA PHYSIOLOGIE DU PALUDISME

Le paludisme est une maladie infectieuse causée par un parasite du genre Plasmodium. Il se propage par le biais de la piqûre de certaines espèces de moustiques qu’on dit anophèles, c’est à dire dont seule la femelle peut transmettre la maladie. Le parasite infecte les cellules hépatiques de la victime, puis circule dans le sang en colonisant les hématies et en les détruisant. Les œufs des parasites croissent dans les globules rouges et les détruisent en relâchant d’autres parasites qui perpétuent le cycle.

On a dénombré quatre espèces de plasmodiums pouvant se transmettre à l’humain. Le Plasmodium falciparum représente la forme la plus grave du paludisme et peut causer un nombre important de décès et les symptômes les plus sévères. Les autres formes ne sont pas mortelles. Elles provoquent plutôt des formes de paludisme bénignes. Parmi celles-ci, le Plasmodium vivax, se trouvant surtout en Asie, est moins dangereux, mais peut résider dans le foie et causer des rechutes jusqu’à trois ans plus tard. On en trouve deux autres formes surtout en Afrique, soit le Plasmodium malariae et le dernier, plus rare, le Plasmodium ovale, causant des symptômes typiques, mais pouvant rester dans le sang pendant plusieurs années et entraîner des formes bénignes de la malaria.

De façon générale, les symptômes apparaissent environ une dizaine de jours après la piqûre. Parmi ceux-ci, on note une fatigue généralisée, une perte d’appétit, des vertiges, des céphalées, des troubles digestifs comme des nausées, des vomissements, des douleurs abdominales et de la diarrhée, ainsi que des douleurs musculaires. La fièvre et les tremblements sont intermittents. Si elle n’est pas traitée rapidement, la malaria sous sa forme la plus dangereuse, le paludisme falciparum, peut causer de l’anémie, de la déshydratation, une insuffisance hépatique ou rénale, de l’inflammation au cerveau, une difficulté à respirer ou la mort.

 

L’ARMOISE ANNUELLE, UNE HERBE MÉDICINALE MERVEILLEUSE

L’armoise annuelle est une herbe médicinale qui appartient à la famille des astéracées. C’est un antiparasitaire très puissant et la meilleure arme connue à ce jour contre la malaria. Un de ses constituants est l’artémisinine, une des rares substances efficaces contre le dangereux Plasmodium falciparum. En effet, celle-ci bloque une enzyme qui permet au parasite de se développer. Elle crée aussi un complexe radicalaire avec le fer des globules rouges qui détruit les membranes des parasites et les tue.

Elle est utilisée en médecine traditionnelle chinoise depuis plus de 2000 ans. Mais ce sont les chercheurs militaires chinois qui, en 1967, ont découvert l’efficacité de l’armoise annuelle en observant les habitants d’une région de Chine qui se soignaient avec une décoction d’Artemisia annua aux premiers signes avant-coureurs de la malaria sans effets indésirables remarqués.

Cette découverte a été salutaire, car lors de la guerre du Vietnam, les épidémies de malaria se sont mises à apparaître à la suite de la construction de nombreux réseaux souterrains par l’armée nord-vietnamienne. Les moustiques transporteurs du paludisme pouvaient se reproduire sans difficulté dans ces tunnels humides, emportant de nombreux soldats dans la mort.

 

L’ARRIVÉE DES MÉDICAMENTS DE SYNTHÈSE DANS LE MONDE MODERNE

Dans le monde occidental, la quinine a été utilisée comme unique traitement contre la malaria du 17e au 20e siècle. En 1946, des molécules de synthèse ont été développées pour ce problème de santé, notamment la première, la chloroquine. Depuis, plusieurs médicaments de synthèse ont rejoint la chloroquine, soit la sulfadoxi-ne-pyriméthamine (Fansidar), la méfloquine (Lariam), l’atovaquone-proguanil (Malarone) et la doxycycline.

L’administration d’une seule molécule à la fois, ou monothérapie, a fait apparaître un problème de résistance du parasite aux médicaments, et c’est encore plus vrai pour le Plasmodium falciparum. Plus le protozoaire est exposé à un même médicament, plus celui-ci peut muter et rendre le médicament inefficace. Avec ce phénomène de résistance médicamenteuse, les laboratoires pharmaceutiques se sont alors mis à étudier de plus près le mode de fonctionnement de l’artémise !

On a alors vu apparaître la thérapie combinée à base d’artémisinine (ACT), soit une thérapie tertiaire utilisée dans les cas de paludisme simple. Elle est composée d’une molécule semi- synthétique dérivée de l’artémisinine et d’une autre molécule synthétique, soit la sulfadoxine-pyriméthamine (SP), qui augmente l’effet de la première molécule et aide à retarder l’apparition de résistance. C’est au KwaZulu-Natal, en 2000, qu’on a testé pour la première fois l’ACT. L’ACT a permis de réduire de 87 % le nombre de décès causés par le paludisme. En 2001, l’OMS a même déclaré que l’artémisinine représentait le plus grand espoir mondial contre le paludisme et recommande également de ne plus utiliser la monothérapie afin d’éviter les risques de résistance.

Ce tout dernier médicament permettant de traiter la malaria nous provient donc de Chine. C’est en effet en 1971 que des scientifiques chinois ont isolé l’ingrédient actif de l’artémise, soit l’artémisinine, qui constitue un médicament très efficace contre la malaria. Cette molécule n’a, à ce jour, produit aucune résistance connue de la part du Plasmodium.

 

LES RECOMMANDATIONS MÉDICALES CONCERNANT LES ANTIPALUDÉENS

Les médecins recommandent aux voyageurs de prendre les antipaludéens une à deux semaines avant de partir, pendant tout le voyage et jusqu’à quatre semaines après. Il faut savoir toutefois que ces médicaments de synthèse peuvent créer plusieurs effets indésirables, dont la nausée, les vomissements et des dérangements d’estomac. Il est important de vérifier si un antipaludéen est vraiment indiqué selon votre état de santé et l’endroit que vous visitez.

De nouvelles études ont également démontré les dangers de la méfloquine, notamment. En effet, chez les militaires déployés dans les pays à risque à qui on a administré ce médicament, plusieurs effets secondaires ont été confondus avec la réaction du stress post-traumatique. En 2013, la Food and Drug Administration (FDA) a ajouté une mise en garde concernant ce médicament, indiquant qu’il existe des risques d’effets à long terme et conseillant d’interrompre ce médicament en présence de symptômes neurologiques comme les étourdissements, la dépression, l’anxiété ou la paranoïa.

 

L’APPROCHE NATUROPATHIQUE

En naturopathie, on privilégie de renforcer l’immunité en préparation d’un voyage pour prévenir les risques d’infection. Certains nutriments, dont la vitamine A, la vitamine C, les probiotiques et les oméga-3 sont très efficaces pour renforcer le système immunitaire. De nombreuses herbes ont été répertoriées pour leurs effets antiparasitaires, dont la berbérine, l’ail, le gingembre, le curcuma, la feuille d’olivier et, assurément, l’armoise. Elles peuvent être utilisées en prévention et en alternance tout au long de votre voyage.

Utilisez également des stratégies pour éloigner les insectes. Par exemple, évitez les parfums et les cosmétiques. Le dioxyde de carbone (CO2), les œstrogènes, l’humidité, la sueur et la chaleur attirent également les moustiques. On suggère de prendre un supplément de vitamine B1, qui a un effet répulsif, tous les jours pendant vos vacances. Évitez d’aller à l’extérieur en fin de journée au moment où les insectes sont les plus actifs. Évitez les endroits où de l’eau stagnante s’est accumulée.

D’autres précautions peuvent être mises en place pour limiter votre risque. Disposer des moustiquaires au-dessus des lits, arroser de répulsif composé d’huiles essentielles dont la menthe pouliot, l’eucalyptus, la citronnelle et le géranium aux endroits ouverts, fermer les fenêtres le soir et bien vous couvrir lorsque vous dormez sont des gestes simples et efficaces à votre portée.

 

RÉFÉRENCES

1.BALCH, Phyllis A. CNC. Prescription for herbal xhealing, Avery, USA, 2002.

2.MERCURE, Philippe. Un échec grave des autorités canadiennes, La Presse +, 28 novembre 2016

3.http://www.naturalstandard.com/databases/conditions/all/condition-malaria.asp

4.http://fr.wikipedia.org/wiki/Paludisme