Publié le 1 mars 2021
Écrit par Chantal-Ann Dumas, ND.A.
Avec les années qui défilent, la population vieillissante et la situation actuelle, nous sommes nombreuses à nous sentir préoccupées par le déclin de notre capacité cognitive et l’éventuelle perte d’autonomie qui en découle inexorablement. Bien que le déclin cognitif soit plus répandu à mesure qu’on avance en âge, il ne devrait pas être considéré comme une conséquence inévitable du vieillissement. Un bon programme « cerveau en santé » comporte plusieurs volets qui dépassent le cadre de cet article, mais j’aborde ici cette importante thématique sous l’angle du glucose.
Déclin cognitif 101
La cognition est une combinaison de processus dans le cerveau qui comprend la capacité d’apprendre, de se souvenir et de prendre des décisions. Le déclin cognitif subjectif (DCS) est une forme de déficience cognitive et est considéré comme l’un des premiers symptômes notables de la maladie d’Alzheimer (MA) et des démences connexes. Il peut aller d’une déficience cognitive légère à la démence, et peut avoir un impact profond sur la santé et le bien-être de la personne affectée. Le DCS peut avoir des implications sur l’exécution des tâches quotidiennes telles que le ménage et la cuisine ou encore, sur la gestion d’une maladie chronique. Bien que nous ne disposions pas de statistiques plus récentes, l’Étude canadienne sur la santé et le vieillissement de 1991 révélait déjà qu’environ 17 % des Canadiens âgés de 65 ans ou plus souffraient d’une DCS. Du côté de nos voisins, le Center for Disease Control n’hésite pas à parler de véritable problème de santé publique.
Nutrition, cerveau et déclin cognitif
La fonction cérébrale optimale résulte d’interactions très complexes entre de nombreux facteurs génétiques et environnementaux, y compris l’apport alimentaire, l’activité physique, l’âge et le stress. Grâce aux progrès réalisés par l’épigénétique, nous connaissons de mieux en mieux les mécanismes sous-jacents impliqués dans cette condition. Plusieurs études ont établi un lien entre le type d’alimentation et certains aliments et nutriments ayant des effets bénéfiques ou néfastes sur la fonction cérébrale, la cognition et la démence. Par exemple, le rôle protecteur du populaire régime méditerranéen a été démontré ainsi que celui du maintien d’un taux énergétique optimal et de la consommation de poisson, de fruits, de légumes, de flavonoïdes, d’oméga-3, de zinc, de cuivre et des vitamines A, B, C, D et E.
L’impact du stress oxydatif
Le stress oxydatif produit par les radicaux libres joue un rôle clé dans les maladies liées à l’âge. Des études montrent que l’accumulation de dommages intracellulaires causés par les dérivés réactifs de l’oxygène (un type de radicaux libres) peut être impliquée dans l’affaiblissement fonctionnel des tissus vieillissants et contribuer au développement de la MA. Cela explique notamment les bienfaits associés au régime riche en antioxydants et à la supplémentation en antioxydants sur la protection de la fonction cérébrale.
L’impact de la glycémie
Au fil des ans, de nombreuses études ont établi un lien entre le taux de sucre élevé dans le sang et le déclin cognitif. Une nouvelle étude réalisée par une équipe de l’Imperial College de Londres a clairement établi la relation directe entre le taux d’hémoglobine glyquée (HbA1c) – une mesure du contrôle global de la glycémie – et le risque subséquent de déclin cognitif. L’étude a impliqué plus de 5 000 personnes âgées de plus de 50 ans chez qui les capacités cognitives ont été mesurées pendant 10 ans. Les résultats ont démontré que les participants présentant des taux de glycémie élevés étaient plus susceptibles d’obtenir de moins bons résultats aux tests de mémoire et de concentration. De façon significative, le taux de déclin cognitif était directement lié au statut HbA1c d’une personne, peu importe qu’elle soit diabétique ou non.
Métabolisme cérébral du glucose
Outre les plaques amyloïdes, la dégénérescence neurofibrillaire et le déclin cognitif, plusieurs changements, y compris l’inflammation, le stress oxydatif et la dysrégulation métabolique, affectent le cerveau des personnes diagnostiquées avec la MA. Des changements cérébraux associés au métabolisme du glucose sont observés des décennies avant que la maladie soit diagnostiquée et des réductions de l’utilisation du glucose corrèlent fortement avec le déclin cognitif chez ces personnes. En raison de ce lien étroit entre les effets du taux de glycémie chroniquement élevé et la MA, on qualifie maintenant souvent cette dernière de « diabète de type III ». La reconnaissance de l’impact de l’hyperglycémie sur la démence offre une approche et des perspectives entièrement nouvelles de la prévention.
Les produits de glycation avancée
L’un des effets les plus dommageables de l’hyperglycémie chronique est la formation de produits de glycation avancée (AGE pour Advanced Glycation End-Products). Les AGE se produisent lorsque les molécules de sucre réagissent chimiquement avec des protéines et d’autres biomolécules critiques, modifiant leur structure et altérant leur fonction.
Des études ont démontré que les AGE se lient à des récepteurs spécialisés de la surface cellulaire appelés RAGE (Advanced Glycation End-Products Receptors). L’interaction AGE/RAGE induit un stress oxydatif, active les réactions inflammatoires et favorise le dépôt des protéines bêta-amyloïdes toxiques associées à la MA. D’autre part, une forme de RAGE, appelée « RAGE soluble » (sRAGE) agit comme un leurre en piégeant les AGE et en les empêchant d’activer les RAGE liés aux cellules. Une étude récente a démontré que les personnes souffrant de déficience cognitive légère avaient un taux d’AGE plus élevé et des niveaux inférieurs de sRAGE. Il est donc essentiel de normaliser le taux de glycémie grâce à un régime alimentaire approprié et l’utilisation de suppléments nutritionnels afin de protéger le corps contre les effets nocifs des AGE et prévenir les dommages qu’ils induisent aux vaisseaux sanguins et au cerveau.
Bienfaits de la restriction calorique
La restriction de l’apport énergétique est une intervention très efficace contre le déclin cognitif fonctionnel lié à l’âge. Un des mécanismes par lesquels la restriction calorique exerce son action neuroprotectrice sur le cerveau vieillissant est la diminution du stress oxydatif et de l’apoptose (mort cellulaire). Bien qu’efficace, la restriction calorique n’est pas toujours facile ou pratique à mettre en application, et c’est là que les suppléments nutritionnels ciblés peuvent soutenir et complémenter les efforts.
Thiamine, benfotiamine et déclin cognitif
La thiamine (vitamine B1) joue un rôle clé dans le maintien d’une saine fonction cérébrale. Une carence en cette précieuse vitamine affecte la plupart des organes du corps, mais elle est particulièrement dommageable pour le cerveau où elle déclenche une cascade d’événements menant au stress oxydatif et à l’inflammation, importants contributeurs des maladies d’Alzheimer, de Parkinson ainsi qu’à d’autres associées à la démence.
La benfotiamine est une forme hautement biodisponible de thiamine dont l’innocuité et l’efficacité sont reconnues dans le cadre des troubles métaboliques. En plus de son importance pour la fonction cérébrale, la benfotiamine présente la double capacité de soutenir le métabolisme du glucose tout en offrant une protection contre les dommages induits par l’hyperglycémie. La benfotiamine empêche la formation des AGE et neutralise le stress oxydatif. Cette combinaison unique procure une puissante protection contre les lésions tissulaires et des vaisseaux sanguins, prévenant ainsi le processus inflammatoire qu’ils induisent et qui contribue au DCS.
Dans une étude clinique révolutionnaire impliquant des individus atteints de la MA légère à modérée, la supplémentation avec 300 mg/jour de benfotiamine durant 18 mois a produit une amélioration cognitive significative.
Conclusion
Nous pouvons certainement optimiser et protéger notre cerveau et notre système cognitif naturellement à mesure que nous avançons en âge. Idéalement, l’accent doit être mis sur l’apport énergétique optimal via une alimentation méditerranéenne équilibrée et la pratique d’activité physique. Toutefois, il peut s’avérer difficile, voire impossible, d’implémenter ces changements chez certaines personnes. L’accent sera alors mis sur certains suppléments ciblés. Pour des recommandations personnalisées, il vaut toujours mieux consulter une naturopathe agréée.
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