Publié le 27 septembre 2022
Écrit par Anny Schneider, herboriste thérapeute accréditée
« L’automne est une saison sage et de bon conseil. »
– La Minuit, Félix-Antoine Savard
Selon le bon ordre de la nature, l’automne est la saison des récoltes, des fruits, des graines et des racines. Bien sûr, vous y récolterez ce que vous aurez identifié, cueilli et semé ou pas, car sous nos cieux, l’hiver est long et la nature sera en veille pour des mois.
Cannages, confitures, cuirs de fruits et lactofermentations : dans la nature, au champ, à la fruiterie, au magasin naturel ou à la jardinerie, c’est le temps de faire vos provisions et transformations à prix abordable et pour une bien meilleure qualité !
Les plantes médicinales peuvent s’employer de mille manières : en cuisine comme aromate d’assaisonnement, en bouillon, en consommé, en pesto, en potage, en poudre, en sauce, en sel aux herbes, en pastilles, en sirop, etc. De façon thérapeutique, elles s’utilisent comme il est décrit dans bien des livres de phytothérapie, en plus de la pratique personnalisée de vos herboristes favoris !
Pour l’usage externe, on les utilise en concentré dans le bain, en compresses, en dentifrice, en poudre, en lotion, en encens, en huile essentielle ou végétale, comme vinaigre, en onguent, en teinture mère, en pastilles, en sirop et même en lavement !
Par ordre d’efficacité et d’accessibilité
La macération, avant et après une brève ébullition, en particulier des écorces, des racines et même des feuilles coriaces abrégera le temps de cuisson. Ce procédé est surtout utilisé pour rompre la barrière de cellulose, ou lignine, ainsi que mieux assimiler et digérer les plantes et leurs nutriments.
Quoi qu’en disent les crudivores, la maîtrise du feu a prolongé notre espérance de vie !
Les plantes sèches se gardent un an et se récoltent chaque année, comme le bon Dieu et mère Nature nous les offrent.
Ainsi, au cœur de l’hiver, vous dégusterez avec bonheur vos bonnes infusions de plantes récoltées l’été précédent, ramassées au jardin ou dans le pré.
Évidemment, les plantes les plus fraîches, entières et aromatiques seront les plus goûteuses et les plus efficaces, entre autres pour les systèmes digestif et immunitaire.
Les lamiacées (anciennes labiées) cultivées au jardin sont très précieuses : n’oubliez pas de faire vos cueillettes une journée ensoleillée autour du zénith : agastache, cataire, hysope, menthe, sauge, thym, etc.
Si vous avez raté les récoltes de l’été, achetez les plantes en vrac à votre magasin d’aliments naturels, certifiées bio et, si possible, cultivées dans la province. Une théière et une passoire sont des accessoires essentiels. Les sachets du commerce sont souvent faits de poudre d’herbes importées, dévitalisées et irradiées, et reviennent cinq fois plus chers que les plantes en vrac.
On utilise en général des plantes ayant été préséchées d’un à trois jours, plus particulièrement les racines : consoude, bardane, ortie, patience… Au bout d’un mois de macération et après les avoir filtrées, on peut solidifier l’huile sous forme d’onguent ou de cérat, en la diluant dans un cinquième du volume de cire d’abeille chauffée au bain-marie. Verser dans de petits pots de verre teinté avant de les étiqueter une fois refroidis.
Les broyer grossièrement 30 secondes dans un bon hachoir manuel si ce sont les racines, sinon dans un excellent robot. Ensuite, laisser macérer durant un mois (ou une lune) dans un pot Masson avec un couvercle de plastique alimentaire. Remuer tous les deux jours, surtout au début, pour éviter que les plantes ne surnagent et ne s’oxydent. Filtrer soigneusement, sans trop presser les plantes, dans une fine passoire de plastique ou un coton à fromage.
Rincer le pot à l’eau bouillante et remettre le liquide filtré dans le même pot, qui doit être conservé dans une pièce sèche, à l’abri de la lumière, dans un placard.
En consommer en cure de dix jours à un mois, dix gouttes trois fois par jour dans un demi-verre d’eau avant les repas pour une cure classique. Pour une situation aiguë, utiliser de trois à cinq gouttes à l’heure, selon l’âge et l’affection à traiter.
Différences entre les solvants des teintures mères
En général, les teintures mères au vinaigre et au vin restent actives de deux à trois ans, et celles préparées dans l’alcool jusqu’à cinq ans.
Racines sauvages et cultivées
Pour cueillir les racines, il faut des outils adéquats, de bons bras et choisir une journée ensoleillée, idéalement au déclin de la lune. Les racines sont une des parties de la plante qu’il faut laver. Il faut aussi brosser la terre qui les recouvre, avant de les découper et de les faire sécher au sec et à l’ombre, sinon au four à feu modéré ou au déshydrateur.
Bardane (Arctium lappa) : La racine de première année, cueillie en automne, se mange comme un légume ou en bouillon, a un goût délicieux et des vertus prébiotiques. Comme pour toutes les bisannuelles, l’énergie tout comme la sève se concentre ensuite dans les fleurs, les fruits et les graines. Elle est également utile, en décoction ou en teinture mère, pour le diabète et les problèmes de peau chroniques.
Chiendent (Agropyron repens) : On l’appelle la « peste des jardiniers » et pourtant, ses racines se boivent en décoction pour ses effets dissolvants par rapport aux pierres aux reins et à la vésicule, sans oublier l’arthrite, parfois due à un mauvais métabolisme des minéraux et de l’acide urique.
Patience (Rumex crispus et ou orbiculata) : On utilise la racine de première année pour ses effets antianémiques, laxatifs et dépuratifs. C’est aussi un tonique intestinal et utérin. Elle est très riche en fer, à preuve : elle est garnie de nombreuses graines couleur rouille qui attendent le printemps pour se ressemer.
Pissenlit (Taraxacum officinale) : La racine d’automne ou de printemps nettoie à merveille les reins. Comme son nom le dit, il faut éviter d’en boire le soir. Par ailleurs, elle est délicieuse au goût, a des effets prébiotiques, cholagogues, diurétiques et immunostimulants.
Graines nutritives et sources de vie :
Les graines représentent la concentration de la mémoire de l’espèce ainsi que leur avenir. Certaines plantes renferment parfois des dizaines de graines dans une capsule, un cône, une gousse ou une silique.
Chêne (Quercus et sp.) : ses fruits mûrs non vermoulus ont constitué une source de nutriments précieux pour nourrir les animaux et même les êtres humains, en période de disette et de guerre. Pour bien les digérer, il faut néanmoins les laisser sécher et ensuite les griller pour rendre ses tanins et sucres complexes plus assimilables.
Chénopode (Chenopodium album et sp.) : On lui doit l’expression « Ne jetez pas vos choux gras » ! Effectivement, cette adventice des jardins échappée de culture est extrêmement nutritive. On peut la faire cuire à la vapeur ou l’incorporer à une soupe. Ses graines mûres sont très riches en lipides et en protéines et représentent un bon aliment de survie en farine ou en soupe.
Ortie dioïque (Urtica dioïca) : Plante des friches riches, c’est une puissante dépurative du sang, diurétique et reminéralisante. Ses jeunes feuilles se mangent en potage ou se boivent en tisane. Ses graines sont riches en protéines et en minéraux et favorisent la repousse des cheveux. Ses fibres étaient tissées en une étoffe résistante.
Onagre (Oenothera Victorini) : Grande plante pourvue de siliques, qui contiennent de nombreuses graines riches en acides gras essentiels, meilleurs régulateurs hormonaux et immunitaires (phytostérols).
Vinaigrier (Rhus typhina) : Notre sumac donne des panicules pourpres poilues qui font de bons sirops pour la gorge irritée. La décoction des fruits (non vermoulus) a également des effets calmants. On peut les égrainer et les sécher pour en faire un assaisonnement acidulé intéressant.
Ceci est bien sûr une courte liste des plantes utiles à cueillir et à transformer pour passer un hiver en meilleure santé et plus goûteux.
Bonnes promenades, récoltes et transformations!