Réduire le risque de maladies du coeur

Publié le 15 septembre 2017
Écrit par Daniel-J. Crisafi, nd.a., m.h., ph. d.

Réduire le risque de maladies du coeur

Les Français prisent beaucoup la prise de magnésium (Veuillez excuser mon jeu de mots) pour aider à réduire le risque de maladies du cœur. Ce nutriment est-il vraiment utile à cet effet ? Si oui, où puis-je en obtenir dans mes aliments et de quelle façon dois-je me supplémenter, si nécessaire ?

 

Votre question tombe à point, étant donné l’augmentation constante des maladies cardiovasculaires. J’oserais ajouter de plus que le magnésium est probablement le principal nutriment de la santé du cœur.

Commençons par quelques mises au point. Premièrement, même si cet article met l’accent sur le magnésium et ses effets cardioprotecteurs, le magnésium n’est pas le seul nutriment qui joue un rôle sur le plan cardiovasculaire. En effet, plusieurs nutriments, dont la vitamine E, ont une fonction presque aussi importante que le magnésium lorsqu’il est question de la santé du système cardiovasculaire. De plus, la santé cardiovasculaire ne se limite pas qu’à une consommation adéquate de vitamines ou de minéraux. L’alimentation saine, l’exercice, le repos suffisant et une gestion adéquate du stress sont tous des facteurs essentiels à une santé cardiovasculaire hors pair.

Mais revenons au magnésium. Celui-ci est tellement important pour la santé cardiovasculaire que les auteurs d’un texte officiel de l’Association pharmaceutique américaine ont écrit « le magnésium est une superstar nutritionnelle lorsqu’il est question de santé cardiovasculaire » (Drugs Induce Nutrient Depletion Handbook). Peu de nutriments ont démontré un spectre aussi élargi d’effets sur la santé du cœur.

 

QU’EST-CE QUE LE MAGNÉSIUM ?

Le magnésium est l’un des minéraux les plus abondants dans le corps. Celui-ci participe à plus de 300 systèmes d’enzymes et joue un rôle crucial dans la production d’énergie et de l’équilibre hormonal, aussi bien que dans l’utilisation de la vitamine D et le maintien de la masse osseuse. Souvent méconnu à cause de la popularité de son antagoniste (et parfois agoniste), le calcium, le magnésium n’en est pas moins important. Son rôle sur la santé du système nerveux central est tel que l’Université d’Adélaïde (Australie)y a consacré un volume de 355 pages !

 

EFFETS CARDIOVASCULAIRES

Le magnésium joue un rôle essentiel dans la santé cardiovasculaire. Le système cardiovasculaire est composé du cœur et des vaisseaux sanguins, soit les artères et les veines.

Endothélium : l’endothélium, ou cellules endothéliales, tapisse la face interne des vaisseaux sanguins et lymphatiques. Ce sont donc des cellules qui sont en contact direct avec le sang (et la lymphe) et qui assurent l’intégrité de ces vaisseaux. Le magnésium est essentiel à la santé de ces cellules. Des chercheurs ont d’ailleurs avancé que l’utilisation de magnésium aide à prévenir et à traiter les dysfonctions des vaisseaux sanguins et, du fait même, à prévenir l’athérosclérose. De plus, des chercheurs ont découvert que la carence en magnésium est responsable de l’augmentation de l’inflammation dans ce groupe de tissus. Le magnésium exerce donc un effet anti-inflammatoire sur le plan vasculaire.

Tonicité vasculaire : les vaisseaux sanguins se contractent ou se dilatent par l’effet de muscles lisses. Le magnésium joue un rôle essentiel pour permettre la relaxation de ces muscles. Un manque en magnésium peut donc causer une plus grande contraction des muscles contrôlant les vaisseaux sanguins, ayant pour effet une augmentation de la pression artérielle. Nombre d’études ont démontré que le magnésium est indispensable à un contrôle normal de la pression artérielle.

Excitabilité du myocarde : le magnésium est un important relaxant musculaire. Le cœur est un muscle, le muscle le plus actif du corps. Le magnésium joue donc un rôle essentiel pour contrôler l’excitabilité du muscle cardiaque. La catégorie de médicaments les plus souvent utilisés pour traiter l’arythmie cardiaque, l’angine et l’hypertension artérielle est celle des inhibiteurs des canaux calciques. Ceux-ci empêchent l’activité du calcium (un stimulant musculaire) sur le plan du muscle cardiaque. Or, certains inhibiteurs des canaux calciques agissent en favorisant le transport du magnésium vers les cellules du muscle cardiaque et en favorisent l’absorption. Un nombre important d’études a d’ailleurs démontré que le magnésium a des effets semblables aux inhibiteurs des canaux calciques, sans pour autant en avoir les effets indésirables. Donc, le magnésium améliore les arythmies, la tachycardie et les fibrillations.

Cholestérol : des chercheurs à la State University of New York ont publié une étude comparative qui souligne que le magnésium agit aussi bien que les statines, les médicaments les plus souvent prescrits pour traiter l’hypercholestérolémie, pour réduire le taux de cholestérol. Elles notent entre autres que le magnésium a une action beaucoup plus complète que les statines, car il ne fait pas que réduire le cholestérol LDL. En effet, le magnésium augmente aussi le « bon » cholestérol, le HDL, et réduit les triglycérides.

Accident vasculaire cérébral et infarctus : le magnésium réduit les risques d’accident vasculaire cérébral et augmente les chances de survie après un infarctus. Des chercheurs ont d’ailleurs démontré que dans la majorité des cas, une carence en magnésium est impliquée dans les cas d’infarctus chez des personnes ayant un cœur en santé.

 

MAIS IL Y A PLUS !

« La carence en magnésium, même lorsqu’elle est de courte durée, a des conséquences sur la «machinerie» physiologique, moléculaire et biochimique des tissus et des cellules cardiovasculaires. » Voilà la conclusion d’une étude publiée en 2016 dans la prestigieuse revue Journal of Cardiovascular Diseases & Diagnosis. Selon les chercheurs, la carence en magnésium aurait des effets génotoxiques, c’est-à-dire que cette carence pourrait perturber l’information génétique cardiovasculaire. Cette hypothèse est d’une importance capitale dans notre compréhension du rôle de la nutrition magnésienne dans le développement de maladies cardiovasculaires. Elle suggère aussi qu’une des façons de réduire les risques de maladies cardiovasculaires dans la population est d’assurer un apport adéquat chez les enfants autant que chez les adultes.

 

CALCIUM ET MAGNÉSIUM

Si le magnésium est un stimulant cardiovasculaire, le calcium en est un excitant. C’est la raison pour laquelle certains médicaments cardiovasculaires ont pour objet de bloquer l’absorption du calcium dans les cellules du muscle cardiaque. Certains chercheurs, dont la Dre Rosanoff, ont souligné que l’augmentation de certains problèmes cardiovasculaires semble concorder avec l’augmentation du calcium dans notre alimentation. Comme le calcium et le magnésium doivent être en équilibre, l’augmentation alimentaire en calcium et la baisse en magnésium, observées depuis les années 1950, peuvent avoir eu des effets négatifs sur le système cardiovasculaire. Les fertilisants non biologiques ne contiennent généralement pas de magnésium, mais ils abondent en calcium. Cette situation a pour effet de réduire la concentration en magnésium des aliments. De plus, la consommation accrue de calcium alimentaire ou en forme de suppléments a augmenté encore plus ce déséquilibre entre ces deux minéraux. C’est cet excès de calcium en présence d’une quantité basse de magnésium qui explique probablement pourquoi une méta-analyse publiée en 2010 dans le prestigieux British Medical Journal avait avancé que les personnes prenant des suppléments de calcium avaient de 27 à 31 % plus de risque d’infarctus. De hauts niveaux de calcium requièrent aussi de hauts niveaux de magnésium.

 

ET LES ANALYSES SANGUINES ?

Les analyses sanguines généralement prescrites par les médecins ne contiennent pas de données sur le taux de magnésium. De plus, même si celui-ci était analysé, les niveaux sanguins de magnésium ne reflètent pas adéquatement les niveaux cellulaires de magnésium. En d’autres mots, le fait qu’il y ait suffisamment de magnésium dans le sang n’assure pas qu’il y en a assez dans les tissus qui en ont le plus besoin, dont ceux du système cardiovasculaire.

 

QUELLES SONT LES SOURCES ALIMENTAIRES DE MAGNÉSIUM ?

Le magnésium est présent dans une variété d’aliments de source végétale. Comme il est le minéral central dans la chlorophylle, on le retrouve dans tous les légumes verts. On le retrouve aussi dans les noix, les graines et les légumineuses. Le tableau suivant donne une appréciation des sources les plus importantes de magnésium en fonction de la quantité normale de consommation. À noter, les aliments de culture biologique contiennent généralement beaucoup plus de magnésium, car le magnésium est rarement présent dans les fertilisants standards. De plus, les niveaux de magnésium peuvent être plus bas lorsqu’un aliment est cuit dans de l’eau, car une partie du magnésium se retrouvera alors dans l’eau de cuisson. Fait intéressant à noter, le cacao pur est une excellente source de magnésium.

Il est important de souligner que la quantité de magnésium alimentaire est beaucoup plus basse qu’elle ne l’était il y a une centaine d’années. À titre d’exemple, le Council for Responsible Nutritiona démontré une baisse de 50 à 80 % du magnésium dans certains fruits et légumes, de 1919 à 1992. Cette baisse est due au fait qu’en agriculture, le magnésium n’est généralement pas utilisé comme fertilisant, que les pluies acides causent des pertes de magnésium dans le sol et que les aliments perdent du magnésium durant l’entreposage et le transport.

 

QUELS SONT SES ANTAGONISTES ?

Plusieurs médicaments peuvent soit réduire l’absorption de magnésium, soit en accroître l’élimination. Il va de soi que lorsqu’il est possible, il vaut mieux réduire ces médicaments, voire les éliminer. Par contre, lorsque leur élimination n’est pas possible, comme c’est le cas pour certains médicaments, il est conseillé d’augmenter la consommation de magnésium ou d’en supplémenter le régime alimentaire.

Certains facteurs augmentent nos besoins en magnésium. Ce sont soit des habitudes de vie, telles que la consommation d’alcool, soit des problèmes de santé, tels que le diabète.

Dans ces cas, il est souvent nécessaire de supplémenter son alimentation avec du magnésium afin d’en assurer un apport suffisant.

 

DOIT-ON SUPPLÉMENTER ?

Si vous consommez beaucoup de magnésium alimentaire, surtout de sources biologiques, et que vous avez peu de facteurs qui en augmentent le besoin, vous n’avez possiblement pas besoin de consommer des suppléments. Par contre, dans toutes les autres situations, la supplémentation en magnésium est de mise. De plus, si vous avez une « prédisposition génétique » pour certaines maladies cardiovasculaires ou si vous êtes atteint par certains symptômes cardiovasculaires, il est probablement nécessaire de compléter votre alimentation avec un supplément de magnésium. Il va de soi que si vous prenez un supplément de calcium, vous devriez aussi prendre un supplément de magnésium afin d’assurer un équilibre sain entre ces deux nutriments. Règle générale, ne dépassez pas 300 mg de magnésium par jour, sauf sur avis d’un professionnel de la santé. Une note importante, le supplément de magnésium doit être consommé au moins une heure avant ou deux heures après la prise d’antibiotiques. Les personnes ayant d’importantes pathologies rénales, à l’exception de pierres aux reins, ne devraient pas prendre de supplément de magnésium, sauf si celui-ci est prescrit par un professionnel de la santé.

 

CONCLUSION

Les maladies cardiovasculaires demeurent, avec le cancer, l’une des deux causes majeures de mortalité non accidentelle. Or, en constatant tout ce que le magnésium peut faire sur le plan cardiovasculaire, il est justifié de se demander pourquoi sa consommation n’est pas encouragée et pourquoi sa supplémentation n’est pas recommandée avec assiduité. Oui, le magnésium est en effet une superstar nutritionnelle lorsqu’il s’agit de santé cardiovasculaire et oui, nos cousins français ont en effet raison.

 

RÉFÉRENCES

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