Retrouver son énergie grâce aux épices exotiques

Publié le 20 mars 2017
Écrit par Anny SCHNEIDER, Auteure et herboriste-thérapeute accréditée

Retrouver son énergie grâce aux épices exotiques

Les épices recèlent toutes de la magie, même celles qu’on verse d’une main distraite tous les jours dans sa marmite. La maîtresse des épices Chitra Banerjee Divakaruni, alias Tilo.

Après un long hiver glacial, le manque de soleil chaud et de verdure fraîche inflige à beaucoup de Nordiques une fatigue de printemps qui, autrefois, correspondait au carême et à la diminution des réserves de provisions.

À cause de nos rythmes de vie et de productivité effrénés qui ne respectent plus le rythme des saisons ni des récoltes, les jeûnes prolongés comme les rituels chrétiens sont de moins en moins pratiqués, encore moins ceux d’abstinence.

Par contre, nous connaissons une grande abondance matérielle et avons désormais accès aux végétaux du monde entier toute l’année. Les épices venues des antipodes en sont les meilleurs exemples.

 

LES VOYAGES DES ÉPICES, UNE ÉPOPÉE MULTIMILLÉNAIRE

Depuis plus de trois millénaires avant notre ère, les Chinois et les Indiens utilisaient déjà les épices pour se soigner, cuisiner et conserver les aliments. Plus tard, les Égyptiens, les Grecs et les Romains ont importé et cultivé de nouvelles espèces issues des pays conquis. Dix siècles après Alexandrie, Venise devint un comptoir important, puis dès la Renaissance, les épices furent le prétexte d’explorations, voire de guerres coloniales.

Les expéditions portugaises, espagnoles, françaises puis britanniques ont eu comme enjeu les épices, parfois utilisées comme précieuse monnaie d’échange. Ils achetaient, ou même pillaient, et revendaient à prix fort les épices tropicales, devenues des enjeux de guerre. La cannelle, le gingembre, le clou de girofle et le poivre étaient les épices les plus coûteuses et recherchées, entre autres à cause de leur fort pouvoir de conservation des aliments et leurs effets bactéricides.

Au XVIe siècle, par exemple, une seule livre de gingembre, en France, équivalait au prix d’un esclave africain ! Les épices valaient leur pesant d’or ou d’âme, et leur importation se faisait au prix de plusieurs vies, quelle barbarie !

Rappelons aussi que le terme « épicier » vient du mot « épices », un des produits précieux que la plupart de nos ancêtres agriculteurs allaient quérir avec d’autres raretés que la terre locale ne pouvait produire.

Désormais, l’Inde et Ceylan sont les premiers producteurs d’épices, avec près de deux millions de tonnes produites par année, suivis de la Chine, qui fournit environ 20 %de la consommation mondiale. La plupart des épices nécessitent un long temps d’ensoleillement et de chaleur, ce qui limite leur production à l’hémisphère Sud. On en importe de plus en plus, les meilleures sont évidemment celles certifiées bios, en graines ou racines entières fraîches ou séchées, pilées ou moulues juste avant l’emploi en cuisine ou comme remède.

 

ÉPICES LES PLUS RENOMMÉES POUR LEUR GOÛT ET LEUR EFFICACITÉ

Apéritives, aromatiques, bactéricides, carminatives, digestives, diurétiques, galactagogues, pectorales, toniques ou révulsives, les épices font désormais partie de notre quotidien, de la cuisine à l’armoire de pharmacie.

Si vous en achetez, que ce soit dans un magasin ou une herboristerie, qu’elles soient certifiées toujours bios, seul gage de leur efficacité, garanties sans OGM et non irradiées, surtout en ce qui concerne les graines, un choix plus crucial que jamais !

  • Adjowan (Trachyspermum amni):

Graine très aromatique au goût de thym utilisée depuis des millénaires en Inde comme antiputride et antiseptique intestinal. On l’utilisait aussi écrasée en cataplasme local, autant contre les douleurs arthritiques que les crises d’asthme. Son huile essentielle est un bactéricide puissant utilisé contre les infections aiguës, autant digestives que pulmonaires, car elle contient un haut taux de terpinéol et de thymol. Il accompagne à merveille les bouillis, potées et soupes riches en fibres et protéines et les rend plus digestes.

  • Anis étoilé (Illicium verum):

Ce fruit séché en forme d’étoile est aussi appelé « badiane ». Son goût nuancé et sucré rappelle la réglisse. L’anis est reconnu comme un carminatif, ou antiflatulent, très doux, mais efficace. C’est aussi un déodorant de l’haleine et un digestif efficace, surtout au niveau intestinal, on peut même en faire boire aux bébés contre les coliques, en décoction légère dans de l’eau purifiée.

  • Cannelle (Cinnamomumzeylandicum):

Cette écorce interne issue d’un petit arbre tropical est désormais utilisée dans le monde entier, surtout en poudre, pour aromatiser les desserts. Elle cumule ces effets : aphrodisiaque, antiseptique, antidiabétique, déodorante et carminative. De récentes découvertes prouvent ses effets hypoglycémiants.

Son huile essentielle est puissamment bactéricide, mais il s’agit d’un topique caustique, donc à utiliser à la goutte ou en dilution dans l’huile. Utilisée dans les tartes, le vin chaud, la sangria et les brioches, elle se boit aussi dans du cidre chaud ou en décoction avec du miel, du citron et du gingembre, contre la grippe et les gastros.

  • Cardamome (Elettaria cardamomum):

Serties par dizaines dans une petite capsule, les graines de cardamome verte sont les plus aromatiques et agréables à croquer, pour désinfecter la bouche ou rafraîchir l’haleine. Originaire du Moyen-Orient, on l’utilise infusée dans le café ou ajoutée aux tajines et à certains desserts.

La cardamome a des propriétés aphrodisiaques et euphorisantes, souvent connexes, mais elle est également digestive et tonique.

  • Curcuma (Curcuma longa):

Des recherches de plus en plus poussées démontrent ses effets antioxydants et lipotropiques indéniables. C’est un anticholestérol, anti-inflammatoire, cholagogue qui préviendrait ou retarderait même les méfaits de l’Alzheimer et de la maladie de Crohn. On conseille d’en consommer une cuillère à thé par jour, combinée au cinquième de poivre noir, dans l’équivalent d’une cuillère à table d’huile d’olive. Avec les épices séchées, on peut préparer au préalable le mélange et l’ajouter aux salades, soupes et potées…

Sa racine fraîche, désormais facile à trouver dans les magasins exotiques et naturels, est la plus aromatique et efficace. Attention ! Son pigment jaune colore tout ce qu’il touche, dents et comptoir compris.

Précision : Le terme « curry » vient du tamoul « kuri », originaire de Ceylan, et signifie « sauce ». Les ingrédients de base en étaient le curcuma, la coriandre et le cumin, fraîchement moulus ou écrasés au mortier, cela va de soi !

Il en existe désormais des centaines de variantes…

  • Galanga (Alpinia officinarum):

Cette autre zingibéracée est originaire d’Indonésie et très utilisée dans les cuisines asiatiques du Sud.

On l’appelle aussi « gingembre bleu », et sa racine, plus pâle, est ligneuse, au goût très piquant et aromatique. S’ajoute râpé dans les mijotés ou soupes, sinon pris en décoction contre les bronchites ou indigestions.

  • Gingembre (Zingiber officinale):

Originaire du sud de l’Inde et de la Chine, ce rhizome aromatique et piquant est utilisé depuis la nuit des temps. On en fait des bonbons, des sirops, de la limonade, on l’utilise fraîchement râpé dans nombre de plats exotiques, sinon en poudre ou en décoction simple contre la nausée.

En cataplasme, dilué dans de l’huile de lin, par exemple, c’est un révulsif utile contre les bronchites à mucus ou encore les furoncles.

Aujourd’hui, on le cultive partout dans les Tropiques : de l’Australie à l’Afrique, de la Jamaïque à la Chine, extrême sous nos cieux, il pousse lentement, mais sûrement, dans les serres ou derrière une baie vitrée plein sud.

Il se conserve un mois au frigidaire dans un sac de papier, ou même congelé, mais il faut lui éviter l’humidité, sinon il moisit rapidement.

  • Girofle (Syzygium aromaticum):

Ce bouton floral est issu d’un arbre de quinze ans poussant à l’origine seulement dans les Moluques et autres îles subtropicales où on l’utilise depuis la nuit des temps, en cuisine et en médecine, et où on le fume, mélangé au tabac.

Il contient de nombreuses sortes d’huiles essentielles analgésiques, bactéricides, antifongiques et parasiticides.

Ajouté en fin de cuisson, il aide à mieux digérer les viandes, mais se boit également en décoction, pour éviter les ballonnements. Son huile essentielle est toujours employée en dentisterie comme antiseptique, surtout grâce à l’eugénol qu’il contient. On le trouve toujours en pharmacie, pour soulager les maux de dents. La teinture mère de girofle est combinée à l’armoise et au noyer noir dans plusieurs formules, pour combattre le candida albicans et plusieurs parasites.

  • Muscade (Myristica fragrans):

Ce fruit ovale issu du muscadier, autre arbre tropical haut de dix à quinze mètres de la famille des myristicacées, est utilisé en cuisine pour son arôme suave. On emploie le plus souvent sa noix fraîche râpée au dernier moment, sinon son écorce, le macis, plus doux au goût. On l’emploie dans les ragoûts, mijotés, soupes ou purées.

La muscade est reconnue comme étant digestive, mais aussi comme un aphrodisiaque stimulant des surrénales et des glandes, surtout chez les hommes, vu son analogie avec leurs nobles attributs… Elle contient de la myristicine, des pinènes de tous types et du safrol. En haute dose (10 grammes), elle accélère les battements cardiaques et serait hallucinogène, mais est rapidement vomitive et, en même temps, comme bien des plantes, rarement mortelle…

  • Nigelle (Nigella damascena ou sativa):

Aussi appelé « cumin noir », on extrait son huile très précieuse et coûteuse pour soigner les maladies de peau, plaies et rides sévères. On en a même retrouvé des flacons dans les cryptes de Cléopâtre et Néfertiti !

On peut l’acheter en graines, à ajouter dans les mijotés et soupes riches en protéines ou fibres. Plusieurs gâteaux et pains arabes en contiennent, et pour les musulmans, c’est une graine sacrée très recommandée par Avicenne, entre autres… On en trouve également comme suppléments en capsules, pour combattre les allergies sévères.

Sa fleur bleu tendre, ou de cultivars blancs ou rosés, est facile à cultiver ici. En élixir, elle soigne le manque de confiance en soi et la propension à se dénigrer, en aidant à s’épanouir grâce à sa propre créativité

  • Poivres (noir, blanc, etc.) (Piper nigrum et spp.):

Originaire du sud-ouest de l’Inde et de Ceylan, le poivre vert vient des fruits cueillis immatures, le blanc vient de ceux trempés huit jours, et le noir, des fruits mûrs séchés. Ses vertus sont nombreuses : aphrodisiaque, antioxydant, bactéricide (estomac, plaies), décongestionnant des sinus et bronchodilatateur, parasiticide. Actuellement, on l’étudie pour sa pipérine aux vertus anti-Alzheimer et même anticancéreuses, si combiné à l’huile d’olive et au curcuma, comme l’a prouvé le docteur Richard Béliveau.

 

Décoction exotique réconfortante

Pour 500 ml d’eau :

  • 2 étoiles d’anis
  • 10 grammes de racines de gingembre
  • 3 clous de girofle
  • Écorce finement pelée d’une orange bio

Faire bouillir le tout pendant cinq minutes et laisser macérer pendant dix minutes.

Filtrer et boire chaud ou froid, en cure avant les repas ou comme digestif après les repas.

Si désiré, ajouter du miel local, au goût.

En boire deux à trois tasses par jour pour faciliter la digestion, activer la circulation périphérique et, pourquoi pas, réchauffer vos sens.

 

En conclusion, avec l’un ou l’autre de ces délicieux condiments, gorgés du soleil de l’extrême Sud, si différents et parsemés çà et là sous diverses formes et recettes dans votre assiette, votre printemps n’en sera que plus aromatique et piquant et, finalement, plus réjouissant !

 

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