Semer le bien-être dans sa communauté

Publié le 15 juin 2018
Écrit par Julie Boisvert

Semer le bien-être dans sa communauté
Now pour mai 2024

Tenté ou tentée par le jardinage ? Si l’idée n’a pas encore mûri dans votre esprit, laissez-vous surprendre par ses multiples bienfaits ! D’ailleurs, de plus en plus de Québécois adoptent les jardins communautaires et collectifs. Alors que la plupart s’engagent dans cette activité pour le plaisir, une étude de l’Institut national de santé publique révèle aussi un souci de diminuer sa consommation de pesticides. Chez nos voisins torontois, les usagers des jardins publics rapportent notamment une amélioration sur les plans suivants :

  • Accessibilité et qualité de l’alimentation ;
  • Activité physique ;
  • Santé mentale ;
  • Moments de socialisation.

 

Des démarches qui portent fruit avec ça pousse !

Connaissez-vous le Dépôt alimentaire NDG? Situé dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce, ce centre de distribution alimentaire fusionné avec des jardins publics fait fleurir divers projets en lien avec l’alimentation : agriculture urbaine, ateliers de cuisine, marché de fruits et légumes local, soupers communautaires…

 

Ça pousse ! est une branche de l’organisme qui s’occupe du volet agriculture urbaine par l’implantation de jardins thérapeutiques, récréatifs et éducatifs. Les intervenants peuvent récupérer des terrains vacants à la demande de certains groupes et ils offrent également leurs services à des écoles, des résidences pour personnes âgées, des institutions médicales ainsi que des entreprises privées.

 

Selon Thibaud Liné, coordonnateur du programme, les participants cultivent la terre pour des raisons tout aussi diverses qu’apprendre, s’amuser, rencontrer d’autres personnes ou encore conscientiser la population aux enjeux environnementaux. « Dans le cas des aînés, c’est souvent une activité thérapeutique qui leur permet d’occuper leurs journées, de socialiser et de bouger. Certaines entreprises privées demandent aussi nos services pour faire du team building ou encore pour poser un geste de reconnaissance envers leurs employés. Nous connaissons aussi des restos désireux de produire leurs propres fines herbes. Quand tu fais pousser tes fines herbes dans ton local, ça ne peut pas être plus local que ça!» blague-t-il.

 

Les séances d’agriculture urbaine sont encadrées par des animateurs-jardiniers chargés d’assurer une bonne ambiance ainsi que d’aider les participants à développer un savoir-faire horticole. L’atelier se divise grosso modo en trois parties :

  • La période d’accueil, où on laisse le temps aux usagers de se retrouver ;
  • La présentation du thème de l’atelier, par exemple les infestations d’insectes. Il s’agit d’une période plus théorique ;
  • La partie pratique, soit l’activité liée au thème, suivie des autres tâches propres aux soins du jardin : arroser, désherber, récolter, tailler au besoin, etc.

 

Classes vertes nouveau genre

Les intervenants de Ça pousse ! se déplacent des Centres de la petite enfance (CPE) aux écoles secondaires pour rendre vivants des éléments vus en cours. Thibaud explique que dans les CPE, le but demeure surtout de stimuler les sens et de découvrir. À ce titre, goûter une tomate, la toucher, la sentir, savoir d’où elle provient devient un exercice amusant.

 

Dans les écoles primaires, on essaie plutôt de comprendre le processus de germination. « Voir et produire soi-même une germination, c’est plus concret qu’un dessin au tableau », estime M. Liné. De plus, l’agriculture invite à créer des liens avec les autres matières, puisqu’elle touche à des notions environnementales, géographiques, linguistiques et culturelles, pour n’en nommer que quelques-unes. « En mathématiques, on peut calculer la productivité d’un jardin, l’espacement nécessaire entre les plantes ou encore ses coûts », poursuit-il. « Certaines écoles mettent sur pied des projets d’entrepreneuriat et les élèves sont responsables de faire pousser et de vendre des fines herbes. »

 

Le secondaire se destine à la maîtrise des connaissances et des compétences ; des jeunes mentors sont formés. « Certains d’entre eux, par exemple, animent des présentations sur la pollinisation dans d’autres classes. »

 

Jardins zen

« Différentes approches existent concernant l’hortithérapie », nuance le coordonnateur. «De façon générale, on considère l’activité jardinière comme étant thérapeutique en soi : on constate des effets positifs sur la santé physique,  psychologique et sociale des utilisateurs. » Pour M. Liné, la terre propose bien plus qu’un passe-temps ou un lieu ordinaire. « C’est un espace de vie social, un lieu de rencontre censé être accueillant et apaisant. Nos participants organisent leur semaine en fonction de leur atelier.» Il ajoute que les potagers offrent un potentiel rassembleur unique. « Il serait difficile de coller une étiquette sociale aux jardiniers. Tout le monde se sent concerné par la nourriture, peu importe l’âge, le sexe ou la culture.» D’ailleurs, les jardins partagés sensibiliseraient la collectivité à des enjeux comme la biodiversité, le verdissement et l’embellissement des espaces urbains.

 

Garde-t-on ces avantages si on cultive pour soi ? « C’est certain qu’on peut jardiner pour son bien-être personnel. Par contre, la communauté ne profite pas de la beauté ni de l’espace de rencontre avec les jardins privés. » C’est la critique qu’adresserait M.Liné aux toits verts, malgré que l’initiative reste intéressante en matière de saveur, de fraîcheur, de coût et de complément au panier d’épicerie.

 

Potagers et alimentation

Les ateliers de jardinage et de cuisine sont une autre façon d’aider les gens à développer leurs compétences culinaires et leur regard critique quant à l’importance d’une bonne alimentation. Ça commencerait même plus tôt qu’on le croirait. « Certains enfants refusent de manger du McDo ! Ils préfèrent découvrir de nouveaux légumes, comme du chou frisé. C’est tout un exploit ! » s’exclame Thibaud Liné. Il poursuit en expliquant que du côté des aînés, la réception diffère légèrement. « Ce sont les retrouvailles d’une pratique utilisée auparavant. Ils sont conscients des bienfaits de produire leurs propres aliments et c’est ce qu’ils préfèrent. »

 

Au Dépôt alimentaire NDG, les aliments récoltés sont redistribués parmi les jardiniers, permettant un surplus pour les personnes en situation d’insécurité alimentaire, en plus de rencontrer des nouvelles personnes et de développer des compétences horticoles. « Le but, c’est vraiment de briser la précarité sociale. Nos ateliers sont d’ailleurs gratuits pour les personnes ayant un faible revenu. »

 

Si vous cultivez une passion horticole, sachez que de nombreux organismes existent et accueillent participants et bénévoles. Les écoquartiers représentent souvent une précieuse source d’information. Si vous êtes plutôt adepte du jardinage solo, le site Espace pour la vie et le Jardin botanique du Montréal proposent également plusieurs fiches-conseils, que ce soit pour trouver de l’information sur une plante spécifique ou encore pour créer une oasis à monarques.

 

Et le droit de manger ?

L’autonomie alimentaire, un concept défendu par le Regroupement des cuisines collectives du Québec (RCCQ), comprend non seulement l’accessibilité à une alimentation de qualité, mais également la capacité à faire des choix, à comprendre des enjeux alimentaires et à développer des compétences culinaires.

 

Au Québec, le droit à l’alimentation semble enterré quelque part entre des conventions internationales et des inégalités sociales qui n’offrent pas le même accès à la nourriture pour tous. Le RCCQ milite entre autres pour la reconnaissance et la protection de ce droit. En 2012, c’est un  million d’enfants canadiens qui vivaient l’insécurité alimentaire. Le RCCQ vous invite à signer la Pétition pour l’adoption d’une politique alimentaire québécoise et d’une loi-cadre sur le droit à l’alimentation sur le site de l’Assemblée nationale, qui sera disponible jusqu’au 12 juin 2018. Au-delà de cette date, la pétition restera accessible au www.droitsainealimentation.org, où vous pouvez également lire la déclaration pour le droit à une saine alimentation.

 

RÉFÉRENCES

Dépôt alimentaire NDG, Rapport annuel 2016, [En ligne], [http://www.depotndg.org/fr/rapport-annuel-2016]

Entrevue avec Thibaud Liné, coordonnateur du programme Ça pousse! 

Espace pour la vie, Mon jardin, [En ligne], [http://espacepourlavie.ca/mon-jardin]

Marie-Ève Levasseur et al., Utilisation des jardins communautaires et alimentation bio – Étude exploratoire, Institut national de santé publique du Québec, [pdf en ligne], [https://www.inspq.qc.ca/bise/utilisation-des-jardins-communautaires-et-alimentation-bio-etude-exploratoire]

Pétition pour l’adoption d’une politique alimentaire québécoise et d’une loi-cadre sur le droit à l’alimentation, site web de l’Assemblée nationale du Québec, [En ligne], [https://www.assnat.qc.ca/fr/exprimez-votre-opinion/petition/Petition-7287/index.html]

Regroupement des cuisines collectives du Québec (RCCQ), Déclaration pour le droit à une saine alimentation, [En ligne], [www.droitsainealimentation.org] 

RCCQ, L’autonomie alimentaire, [en ligne], [http://www.rccq.org/fr/a-propos/autonomie-alimentaire/]