Sexualité et périnatalité

Publié le 13 juin 2019
Écrit par Laurence Sala, naturopathe

Sexualité et périnatalité

La crainte d’une fausse couche n’est jamais loin… mais aussi la croyance de déclencher un accouchement avec un rapport sexuel. Aujourd’hui, je démystifie le sujet avec Julie Rouvier – une sexologue spécialisée en fertilité et périnatalité.

 

Pourquoi la grossesse peut-elle être un blocage à la sexualité ?

La grossesse est le début de grands changements. La plupart du temps, les futurs parents s’attendent à ce que le corps de la femme subisse des transformations : prise de poids, poitrine sensible, apparition de vergetures ou autres désagréments, la bedaine qui prend de la place… Contrairement à ce que l’on peut penser, ce n’est pas ce qui influencera le plus la sexualité du couple.

Les hormones jouant leur rôle, les femmes enceintes ont souvent un pic de libido, surtout au 2e trimestre, qui peut les amener à avoir même plus de désir qu’à leur habitude. Parfois, les partenaires ne suivent plus la cadence !

Les pères, eux, font face à de nouvelles préoccupations. S’il est rare que les changements corporels les atteignent, c’est plutôt la « présence » du bébé qui pose problème.

Ainsi, certains se montrent réticents, au fur et à mesure qu’ils voient la bedaine prendre de l’expansion. Ils peuvent avoir peur de déclencher l’accouchement, de faire mal au bébé ou encore penser qu’il va sentir ce qu’il se passe et que ce n’est pas bon pour lui.

Cela peut se manifester de plusieurs façons, allant d’une baisse considérable du désir, jusqu’au refus de faire l’amour durant la grossesse, en passant par de l’éjaculation précoce (« il faut que cela se termine vite pour éviter que le bébé ne se rende compte de ce qui se passe »).

Chaque grossesse étant unique, la sexualité des couples qui attendent un enfant l’est aussi. Malgré que certaines tendances se dégagent, vous pouvez vivre une expérience très différente !

 

Peut-on faire l’amour durant le premier trimestre sans prendre de risque ?

Il est tout à fait possible de faire l’amour sans danger durant le premier trimestre. La bedaine n’est pas encore très visible, ce qui vous permet d’être encore maître de vos mouvements et, si vous n’êtes pas de celles qui vivent une fatigue extrême ou des nausées continues, peut-être aurez-vous très envie de profiter de ces moments d’intimité avec votre partenaire.

Contrairement aux idées reçues, faire l’amour durant le premier trimestre de grossesse ne déclencherait pas de fausse couche. De nombreux autres facteurs peuvent être en cause.

Il existe cependant quelques cas, plutôt rares, face auxquels votre médecin vous déconseillera les rapports sexuels, mais cela s’applique davantage à des grossesses plus avancées. Si vous avez un doute sur votre condition, parlez-en à votre médecin.

Évidemment, les personnes ayant recours à certains accessoires ou à de la violence durant leurs rapports, par exemple dans le cas du BDSM (bondage, discipline, domination, sadomasochisme), devraient réfléchir ensemble à chaque acte qu’ils prévoient entreprendre.

Il est aussi recommandé d’éviter tout risque d’ITSS (infection transmissible sexuellement et par le sang), particulièrement l’herpès. Si votre conjoint est porteur, veillez à bien vous protéger. Une crise majeure développée peu avant l’accouchement présente des risques pour votre enfant. D’ailleurs, pour les futures mamans qui souffrent déjà d’herpès, un traitement préventif est fortement conseillé.

 

En quoi l’accouchement est-il un acte sexuel ? Pourquoi certaines femmes vivent un orgasme à l’accouchement ?

Est-ce monnaie courante ? L’accouchement a beaucoup de points communs avec ce que l’on appelle une « relation sexuelle ». Les deux événements sollicitent des hormones communes, entre autres l’ocytocine et les endorphines, et demandent un cadre particulier favorable au dévoilement de l’intimité. Il constitue un moment fort pour les partenaires. Quiconque entre dans leur bulle en perturbera le déroulement naturel, par le stress ou la peur qui engendre la production de cortisol. Cette hormone vient couper l’acte dans les deux cas.

Comme nous l’avons vu, une relation sexuelle et un accouchement sont semblables en plusieurs points. Cela, ajouté au fait que la douleur s’entremêle curieusement au plaisir, fait que certaines femmes arrivent jusqu’à l’orgasme lorsqu’elles donnent la vie. Comme vous devez vous en douter, ce n’est pas encore une majorité. Je suis persuadée que notre façon de vivre l’accouchement, qui se passe pour la plupart en hôpital avec plusieurs intervenants, empêche les femmes de le vivre en pleine communion avec leur bébé et avec leur corps, dans leur bulle. Bien souvent, dans un tel contexte, l’intimité du couple n’est pas respectée, et le taux d’ocytocine ne peut tout simplement pas monter suffisamment pour qu’une femme arrive à l’orgasme.

 

Quels seraient tes conseils pour reprendre contact avec sa sexualité après l’accouchement ?

Les nouvelles mères me demandent souvent à partir de quel moment elles peuvent à nouveau « faire l’amour » après avoir accouché. Cette question en dit long sur notre vision de la sexualité ! En effet, lorsque l’on parle de « faire l’amour », nous faisons souvent référence à la pénétration pénis-vagin. Or, après l’arrivée d’un enfant, il faut du temps pour que la femme se remette, autant physiquement que psychologiquement. L’« impératif » de pénétration peut faire peur et constitue l’une des causes de la baisse du désir chez la nouvelle maman.

C’est pour cette raison que vous ne devriez pas vous limiter à cela ! En effet, il est très peu probable de passer de 0 (n’avoir aucun contact avec son partenaire) à 100 (pénétration vaginale) en un claquement de doigts, quelques semaines après avoir accouché. Du moins, cela est techniquement possible, mais quel plaisir allez-vous en retirer ?

Mon meilleur conseil serait alors de garder contact avec votre partenaire en permanence : câlins, bisous, caresses, massages, etc. Ces petites actions du quotidien ont un pouvoir bien plus fort que ce que l’on pense ! Elles permettent de sécréter de l’ocytocine, l’hormone du bien-être, qui est aussi libérée après un orgasme.

Pour que cela fonctionne, vous devez en parler à votre conjoint. Il faut que cela soit clair entre vous que la pénétration n’est pas possible pour le moment, mais que vous allez entretenir vos liens autrement. Chez les couples qui n’en parlent pas, la femme peut en venir à refuser tout rapprochement, même pour un simple câlin, de peur que l’homme perçoive une porte ouverte à la pénétration. Si possible, parlez de ce non-impératif de pénétration dès la grossesse, et profitez-en pour redécouvrir dès maintenant le plaisir associé aux petits gestes du quotidien. Vous percevrez moins cette « coupure » de la sexualité dont on parle souvent, puisque vous aurez anticipé la situation.

Pour aller plus loin sur ce sujet, je vous invite à poser vos questions de façon anonyme sur ce blogue : www.indiscretes.com. Deux sexologues y répondront gratuitement.

Laurence Sala, naturopathe spécialisée

www.laurencesala.com

Julie Rouvier, sexologue spécialisée

www.indiscretes.com

Quelques outils et thérapies à considérer

L’huile essentielle d’ylang-ylang peut vous amener à déconnecter le mental et vous permettre de vous laisser aller dans un moment d’intimité. Originaire de l’Inde, cette huile essentielle réveille la passion, la joie et la sensualité sans culpabilité.

À diffuser dans sa chambre à coucher.

Le livre Rituels de femmes : pour découvrir le potentiel du périnée, d’Efféa Aguiléra est une mine d’or pour favoriser une (nouvelle) connexion à sa matrice, son pouvoir féminin et sa sexualité.

Une physio périnéale peut favoriser une préparation et une cicatrisation du périnée (et ce, même avant l’accouchement). Si les rapports sexuels sont douloureux, même un an après

l’accouchement, une physio peut vous aider à reprendre contact et plaisir avec votre matrice.

Et d’autres encore… à vous de cheminer dans votre sexualité