Publié le 1 janvier 2021
Écrit par Louis Lapointe et Yves Prescott
On sait que la situation du confinement a eu un impact négatif sur la réalité économique des consommateurs québécois, bien qu’il ait engendré une tendance en faveur de l’achat local, promu à l’échelle provinciale via Le Panier Bleu.
Certaines questions s’imposent. Est-ce que les facteurs déterminant nos choix en magasin se situent au niveau du prix, de la qualité du produit, des ingrédients ou de la provenance ? Il devient alors indispensable de considérer que l’emballage et l’étiquetage, non seulement attirent l’œil du consommateur, mais le guident dans un choix souvent difficile à faire face à un étalage abondant.
Bien que l’on puisse constater un engouement certain pour des produits du terroir depuis le début de la pandémie, cela ne fut pas toujours le cas. À une certaine époque, certes, les produits alimentaires provenaient directement des maraîchers (ou en vrac du magasin général), mais à la suite de la crise économique de 1929, on a peu à peu vu apparaître les premières épiceries à grande surface, où l’on proposait des denrées à des prix inférieurs à ceux de l’épicerie du coin. Cette façon de faire allait désormais dicter les standards, les formats et les quantités offertes au public.
Peu à peu, certains matériaux allaient graduellement disparaître des supermarchés, tels que le papier ciré qui était autrefois fabriqué avec de la cire d’abeille et donc parfaitement biodégradable. Ce n’est pas le cas de celui que l’on trouve encore aujourd’hui et qui est généralement fait de paraffine, un sous-produit du pétrole. Pour ce qui est des légumes racines, autrefois vendus en sacs de jute, sachons que cette fibre reste entièrement biodégradable et recyclable et, par conséquent, respectueuse de l’environnement. Au fil des décennies, on a développé des stratégies les plus diverses, qui auront pour conséquence d’éliminer ces empaquetages trop neutres, dans le but de mieux séduire et rassurer le consommateur.
Les innovations survenues au cours du 20e siècle ne sont pas que d’ordre esthétique ou liées au marketing ; à la suite de la Seconde Guerre mondiale, on a créé de nouveaux matériaux industriels, tels que le nylon, le téflon et le PVC. Mais il aura fallu attendre quelques décennies pour enfin produire des thermoplastiques résistants, non toxiques et parfaitement recyclables comme l’ABS (acrylonitrile butadiène styrène)*.
Les nouveautés qui se succèdent de manière soutenue ont privilégié des produits préemballés qui ont imposé des quantités qui ne correspondent pas forcément aux besoins du consommateur, d’où le risque évident de gaspillage. À date plus récente, les applications et plateformes mobiles conjuguées à l’ère de la COVID-19 ont aussi eu un effet majeur sur les habitudes des consommateurs, en contribuant à la prolifération de plats préparés et de denrées pouvant être livrés à domicile.
Par contre, plusieurs marchands avaient déjà cru bon retourner à une pratique de non-emballage, en offrant des produits en vrac, où l’individu peut, dans certains cas, apporter ses propres contenants, ce qui permet d’acheter strictement en fonction de ses besoins réels.
Avec une approche de « zéro déchet », le problème de la traçabilité devient alors évident, à savoir le pays d’origine de l’aliment que l’on souhaite acheter, les ingrédients qui s’y trouvent (OGM ?), sa valeur nutritive et dans quelles conditions il a été produit. Hélas, ceux et celles qui se sentent interpellés par la traçabilité doivent souvent faire face, non seulement dans les épiceries en vrac, mais aussi au supermarché, à des informations vagues sur certaines étiquettes. Celles-ci sont trop souvent de type « distribué par », « empaqueté pour » ou « importé par » telle ou telle compagnie, et ce, malgré des normes canadiennes pourtant strictes, précises et détaillées. Difficile, dans un tel cas, voire impossible d’exercer un choix permettant d’éviter des aliments en provenance de pays où la sécurité alimentaire reste parfois douteuse dans le meilleur des cas : par exemple, les noix de Grenoble nous parviennent principalement d’endroits aussi divers que la Californie, la Turquie, le Chili et la Chine populaire. Cela dit, de nouvelles mesures plus strictes devraient être mises en place, afin de remédier à cette situation.
Cependant, on notera que certains produits en provenance d’Extrême-Orient ont tendance au suremballage, malgré le fait qu’ils comportent toutes les informations voulues. Par exemple, on retrouve certains desserts emballés dans un contenant de plastique scellé. Ces contenants sont à leur tour enveloppés individuellement, puis empaquetés dans un autre sac, lui aussi fait de plastique. Il est bon de souligner que l’on considère qu’environ 70 % des effets négatifs d’un produit d’emballage peuvent être évités dès la conception ; un design écoresponsable doit offrir la meilleure protection à un aliment, en utilisant moins de matières et d’énergie dans sa fabrication, et ce faisant, on diminue le coût et l’impact sur l’environnement.
Un produit « santé » n’est pas forcément synonyme d’emballage écoresponsable. Conscients de ce problème, on expérimente aujourd’hui avec de nouveaux matériaux recyclables, faits de composantes organiques, telles que les algues, la fécule de maïs, les fibres naturelles, le chanvre, le bambou, voire certaines variétés de champignons.
Depuis mars dernier, faire l’épicerie exige désormais une vigilance constante, afin de se conformer aux directives dans les lieux publics, consignes visant à se protéger et à protéger les autres. Comme les emplettes sont réalisées le plus rapidement possible, on devra repenser la présentation des produits alimentaires à plus long terme.
Aujourd’hui, le consommateur veut se faire entendre et rien ne devrait être laissé à la discrétion des distributeurs. C’est aussi un défi de taille pour les producteurs d’ici, qui veulent se retrouver sur les étalages. Néanmoins, ces derniers pourraient se distinguer comme pionniers, en adoptant un design efficace et écoresponsable, faisant l’utilisation d’icônes clairement identifiables et capables de faciliter le choix des consommateurs.
* À ce propos, sachons que les entreprises contribuent financièrement à assumer le coût de collectes sélectives pour les emballages qu’elles mettent en marché au Québec.