Publié le 16 septembre 2016
Écrit par Daniel-J. Crisafi, nd.a., m.h., ph. d.
Votre dernier livre s’intitule Syndrome S, est-ce que c’est la même chose que le Syndrome X ? Si ce n’est pas le cas, pouvez-vous m’expliquer ce qu’est le Syndrome X ?
DÉFINITION
Le syndrome X n’est pas une maladie en soi, mais bien une façon de nommer une situation lors de laquelle un certain nombre de symptômes apparaissent simultanément plus ou moins progressivement chez un individu. On le nomme syndrome, car ces symptômes affectent souvent différentes parties du corps.
Ce syndrome porte différents noms, tels que syndrome métabolique, syndrome cardiométabolique ou, comme le nomment les Australiens, CHAOS (Coronary artery disease, Hypertension, Adult onset diabetes, Obesity, and Stroke). Le nom Syndrome X lui fut donné par Reaven à la fin des années 1980. Selon différentes sources, la lettre « X » a été attribuée à ce syndrome soit parce qu’elle affecte surtout la génération X (individus nés entre 1960 et 1980), soit parce que la cause est inconnue. Quoi qu’il en soit, ce syndrome est en croissance parmi nos concitoyennes et concitoyens. Pour le reste de cet article, je vais utiliser soit le mot « syndrome », soit celui de « syndrome métabolique » pour parler de cet état.
INCIDENCE
D’après Statistique Canada, environ 21 % des adultes de 18 à 79 ans sont atteints du syndrome métabolique. Selon l’American College of Preventive Medicine, c’est au moins un tiers de la population, soit 33 %, qui est affecté par ce syndrome. De plus, les statistiques démontrent que le pourcentage d’individus atteints par le syndrome augmente avec l’âge. D’après d’autres statistiques nord-américaines, environ 50 % des personnes de 60 ans et plus ont le syndrome.
SYMPTÔMES
Plusieurs symptômes sont associés à ce syndrome. Les symptômes majeurs comprennent : la résistance à l’insuline, le diabète de type 2, les triglycérides élevés, l’hypertension artérielle, le cholestérol HDL bas et l’obésité abdominale.
Pour recevoir un diagnostic de syndrome métabolique ou syndrome X, il faut présenter au moins trois des symptômes mentionnés ci-haut. À ces symptômes « classiques », de plus en plus de cliniciens ajoutent la glycation et l’inflammation. Il est important de noter que le syndrome métabolique peut se développer progressivement, de sorte que les paramètres sanguins, tout en étant normaux, démontrent une tendance à l’aggravation.
Fait à noter, la résistance à l’insuline est associée au syndrome métabolique. Or, la résistance à l’insuline peut causer l’hypoglycémie. En effet, dans ma pratique privée, j’ai souvent rencontré des personnes ayant le syndrome métabolique, mais dont les symptômes glycémiques étaient de type hypo (hypoglycémie) plutôt qu’hyper (hyperglycémie ou diabète).
Faisons ici un bref rappel au sujet de l’hypoglycémie :
L’hypoglycémie (hypo = bas, glycémie = taux de sucre) peut se définir comme étant un déséquilibre dans le métabolisme des glucides causant un niveau anormalement bas de glucose (sucre) sanguin ou cellulaire.
Comme le niveau de glucose sanguin ou cellulaire affecte surtout le système nerveux ainsi que le niveau d’énergie disponible, les symptômes d’hypoglycémie sont avant tout d’ordre nerveux et énergétique.
Nervosité, irritabilité, fatigue, déprime, allergies, tremblements, étourdissements, difficulté à se concentrer, rages de féculents ou de sucres, fatigue matinale, hyperactivité, palpitations, sueurs froides, etc.
Cette liste n’est pas exhaustive. De plus, la personne souffrant d’hypoglycémie n’a pas nécessairement tous les symptômes. Fait à noter, certains symptômes sont épisodiques, souvent une heure ou deux avant ou après le repas.
LE PROFIL
Vous voyez bien le profil. Soit le taux de sucre sanguin commence à augmenter, soit la personne commence à manifester des signes d’hypoglycémie (voir la section précédente).
Elle commence à prendre du poids autour de la taille sans raison apparente ; de plus, la prise de poids semble initialement se faire surtout et disproportionnellement à l’abdomen. La pression artérielle et les triglycérides commencent à augmenter et le « bon » cholestérol, le HDL, est à la baisse.
DANGERS
Le syndrome métabolique augmente de façon importante le risque de maladie cardiaque, de diabète et d’accident vasculaire cérébral. Certains suggèrent que bientôt, le syndrome métabolique pourrait dépasser le tabagisme à titre de facteur de risque pour les maladies cardiovasculaires. De plus, des chercheurs ont noté que le syndrome métabolique augmente le risque de décès à la suite d’une maladie cardiovasculaire même en l’absence de diabète ou de facteurs normalement associés à un AVC.
CAUSES
Les causes du syndrome métabolique sont multiples et, les lectrices et lecteurs de Vitalité Québec n’en seront pas surpris, elles sont fondamentalement les mêmes que celles du cancer.
1) Un mode de vie qui s’est éloigné de façon surprenante de celui de nos aïeuls. En effet, de plus en plus d’études suggèrent que malgré le fait que nous n’avons pas changé génétiquement, nous avons changé de façon importante le milieu dans lequel nous vivons sans avoir pu nous adapter physiologiquement. Ceci est particulièrement vrai lorsqu’il est question de nutrition et d’activité physique.
2) Activité physique. L’humain a toujours eu besoin d’équilibrer l’activité physique et l’alimentation. Malheureusement, dans notre société industrialisée, cet équilibre n’existe généralement plus. En Amérique du Nord, l’activité physique a chuté de façon importante après la Deuxième Guerre mondiale. En effet, malgré le fait que le sport ou les activités physiques de plaisance ont augmenté quelque peu, l’activité physique associée au travail, aux activités domestiques et au transport a chuté.
3) Alimentation. Malgré le fait que nous sommes considérablement moins physiquement actifs que nos aïeuls, nous consommons considérablement plus de calories qu’eux. Le fait d’avoir augmenté nos calories tout en réduisant notre activité physique n’a pu que contribuer à l’accroissement de l’embonpoint ou de l’obésité. Mais le problème ne s’arrête pas là. En effet, le problème de la réduction de densité nutritionnelle s’ajoute à celui de l’excès de calories. Non seulement consommons-nous moins d’aliments, mais ceux-ci renferment moins de nutriments (minéraux, oligo-éléments et vitamines) qu’avant.
4) Les polluants organiques. De plus en plus d’études suggèrent que les polluants organiques sont impliqués à la fois dans les cas d’obésité primaire ainsi que dans ceux associés au syndrome métabolique. Afin de satisfaire à notre dent sucrée, tout en réduisant notre apport calorique, nous avons eu recours à des substances chimiques, les édulcorants artificiels. Or, ces substances chimiques, comme plusieurs autres, ont démontré la capacité à augmenter l’incidence d’obésité. Et il y a plus. La consommation durant la grossesse de boissons contenant des édulcorants artificiels double le risque d’obésité chez l’enfant. Les substances chimiques ou artificielles ne sont jamais la solution !
5) Le stress. Le stress joue un rôle majeur dans le développement du syndrome métabolique par la résistance à l’insuline. En effet, le stress continu peut causer une résistance à l’insuline, laquelle causera à son tour une prise de poids troncal ainsi qu’une augmentation de la glycémie.
QUE FAIRE ?
Le syndrome métabolique peut être prévenu, voire renversé. Pour ce faire, il est essentiel de reprendre sa santé en main par une gestion équilibrée de son niveau d’activité physique et de son alimentation.
EXERCICE
L’effet positif de l’exercice physique dans la prévention et le traitement du syndrome métabolique est bien documenté. Depuis quelques années, des articles suggèrent que la quantité d’activité physique requise pour le maintien d’une bonne santé est d’environ deux heures et demie par semaine. Malheureusement, de plus en plus d’études suggèrent que ce niveau d’activité physique est insuffisant. L’exercice de résistance a d’importants effets pour améliorer l’état de santé chez les personnes atteintes du syndrome métabolique. Dans une étude entreprise auprès de patientes ayant survécu à un cancer du sein, l’exercice de résistance associé à l’exercice aérobique a démontré des effets très positifs au niveau de la réduction des paramètres du syndrome métabolique.
Faites de l’exercice de résistance au moins une demi-heure, trois fois par semaine. Le programme d’exercices devrait comprendre des exercices pour toutes les masses musculaires majeures : jambes, dos, poitrine, épaules, bras et tronc. L’exercice de résistance peut comprendre des exercices avec poids corporel tel que des pompes (push-ups) des accroupissements (squat) des tractions à la barre fixe (chin-ups) ou avec une résistance comme les bandes élastiques ou des haltères.
Vous pouvez aussi utiliser des machines de résistance. Différentes autres formes d’exercices ont aussi un effet de résistance, comme la nage, le Pilates ou le ramage. Mon expérience clinique et personnelle ainsi qu’un nombre croissant d’études suggèrent fortement que l’exercice de résistance est plus important que la seule activité aérobique lorsqu’il s’agit de gérer le syndrome métabolique.
L’activité aérobique doit aussi être incluse dans le programme d’exercices. Celle-ci peut inclure la marche – essayez de faire 10 000 pas par jour – la nage ou le ramage (ceux-ci ont un effet aérobique aussi bien que de résistance. La Zumba et la danse sont aussi d’excellentes formes d’exercices aérobiques. Attention à la course, car celle-ci peut, si elle est intense et soutenue, produire des dommages cardiovasculaires.
L’important, en fin de compte, c’est de bouger – beaucoup bouger – afin non seulement de brûler des calories, mais, surtout, de modifier le métabolisme. De plus, il est important de bouger quotidiennement plutôt que de faire du sport intense une fois par semaine. Vous pouvez consulter mon texte sur l’exercice dans l’édition de juin 2015 de Vitalité Québec.
SUPPLÉMENTS
Plusieurs suppléments alimentaires peuvent aider à améliorer les paramètres associés au syndrome
métabolique. Les nutriments qui aident à améliorer la résistance à l’insuline sont particulièrement intéressants, car cette dernière semble être le facteur le plus important dans le développement du syndrome métabolique. Parmi ceux-ci, j’aimerais mentionner les suivants :
CHROME
Le chrome, tout comme la vitamine B3, est nécessaire à la formation du facteur de tolérance au glucose (FTG). Or, le facteur de tolérance au glucose sensibilise les membranes cellulaires à l’insuline. Cette sensibilisation accrue contrebalance ou renverse la résistance à l’insuline. Des études ont en effet démontré que le chrome améliore la résistance à l’insuline chez les sujets obèses.
La prise de 200 à 400 microgrammes de chrome une ou deux fois par jour peut avoir un effet bénéfique. Point important, les diabétiques doivent très bien vérifier leur taux de sucre sanguin lorsqu’ils prennent du chrome, car celui-ci, en améliorant la résistance à l’insuline, peut faire baisser le taux de sucre sanguin.
VITAMINE B3
La vitamine B3, tout comme le chrome, est requise pour l’utilisation de l’insuline par les cellules. Donc, il est logique de croire qu’une supplémentation peut aider à améliorer la résistance à l’insuline. Plusieurs études ont démontré que la vitamine B3 aide à prévenir le diabète de type 1 et qu’elle peut aussi agir positivement sur plusieurs paramètres du syndrome métabolique.
La prise de 50 à 100 mg de vitamine B3 sous la forme de niacinamide ou de niacine à dissolution progressive peut grandement aider à améliorer les symptômes liés au syndrome métabolique.
ZINC
L’administration orale de zinc a aussi démontré des effets très positifs en ce qui concerne le syndrome métabolique.
MAGNÉSIUM
Je me permets de terminer avec le magnésium, l’un des minéraux les plus importants et pourtant le plus carencé dans notre alimentation nord-américaine. Un nombre important d’études suggèrent que le magnésium joue un rôle clé dans la sensibilité à l’insuline. Plusieurs études ont démontré qu’il y a une corrélation inverse entre la consommation de magnésium et le syndrome métabolique. Certaines études suggèrent que les jeunes adultes ayant un niveau de magnésium alimentaire plus élevé sont moins à risque de développer le syndrome métabolique. Une autre étude a souligné qu’il y a une corrélation inverse entre la consommation de magnésium et l’inflammation systémique ainsi que la fréquence du syndrome métabolique chez les femmes de 50 ans et plus.
La prise de 125 à 150 mg de magnésium matin et soir peut aussi être très utile dans un programme dont le but est de prévenir ou de corriger le syndrome métabolique.
Alimentation
Sur le plan alimentaire, plusieurs facteurs jouent un rôle dans la prévention ou l’élimination de divers paramètres associés au syndrome métabolique. En voici quelques-uns.
Réduisez ou éliminez les sucres simples. Gardez votre consommation de sucres simples pour les occasions spéciales (anniversaires, fêtes, etc.).
Réduisez votre consommation d’alcool à une consommation par jour, en moyenne, ou moins.
Assurez-vous d’avoir des protéines (animales ou végétales) à tous les repas. Consommez des légumes au moins deux fois par jour.
Assurez-vous d’avoir une quantité appréciable de fibres végétales dans votre régime quotidien.
CONCLUSION
Le syndrome métabolique ou syndrome X pose une menace réelle. Heureusement, il est possible de l’éviter et même de le renverser. La seule entrave à une gestion efficace et saine de ce syndrome est notre volonté. Eh oui, il faut prioriser notre santé et se prendre en main. Ces mêmes ajustements de vie qui aident par rapport au syndrome métabolique sont aussi ceux qui aident à réduire les risques de cancer. C’est à nous de choisir.
RÉFÉRENCES
Disponibles à la demande du lecteur.