Publié le 30 décembre 2023
Écrit par Nicolas Blanchette, D.O., B. Sc. kinésiologie
L’innovation et les progrès technologiques dans le monde de la santé rendent désormais possible ce qui nous paraissait autrefois de la pure science-fiction. Pour bien conclure cette année qui touche bientôt à sa fin, je vous propose d’explorer quelques-unes de ces technologies futuristes qui nous émerveillent et nous donnent espoir.
L’impression biomédicale en trois dimensions
On commence à entendre davantage parler de cette invention dont le brevet a été déposé aussi loin qu’en 1988 et qui n’a jamais cessé d’être perfectionnée depuis ! Cette technologie permet de produire un objet en trois dimensions à partir d’un fichier digital. On l’emploie, entre autres, dans le secteur industriel, où l’on estime son marché à environ 40 milliards de dollars américains mondialement.
Particulièrement dans la dernière décennie, des progrès importants dans l’accessibilité à cette technologie ont été réalisés. L’impression 3D est déjà abondamment utilisée dans le domaine médical, où elle permet d’aider à la production de prothèses auditives, par exemple. On utilise de plus en plus ces imprimantes sophistiquées pour créer des prothèses, des implants et même des articulations artificielles pouvant être utilisées lors des chirurgies. L’un des avantages incontournables des prothèses et des orthèses produites via l’impression en trois dimensions, c’est leur remarquable capacité d’ajustement aux mesures personnalisées de chaque patient avec une précision au millimètre près ! Cela permet d’offrir des niveaux sans précédent de confort et d’efficacité.
Sur le plan chirurgical, les bénéfices de l’impression 3D sont remarquables. Par exemple, en reproduisant de façon ultraréaliste des parties de l’anatomie d’un patient, cela permet aux chirurgiens de planifier et de se pratiquer pour une opération avec une précision et un réalisme qui était complètement impensables auparavant. Parmi les bénéfices, on compte un meilleur taux de succès et une diminution des risques de complications et du temps de récupération postopératoire.
On ne fait encore qu’effleurer les bénéfices potentiels de cette technologie. Que peut-il se passer, lorsqu’on la combine avec la bio-ingénierie ? En effet, des scientifiques ont déjà été capables de créer des vaisseaux sanguins, des cellules de la peau, des ovaires synthétiques et même un pancréas via des technologies adaptées de l’impression en trois dimensions ! Ces organes artificiels peuvent alors être implantés dans le corps du patient pour remplacer par exemple un organe qui serait malade ou endommagé, tout en réduisant fortement le risque de rejet par l’hôte. La capacité de créer des organes artificiels qui ne sont pas rejetés par le système immunitaire de l’organisme receveur montre des perspectives révolutionnaires et pourrait permettre de sauver chaque année des millions de gens dont la vie dépend d’un don d’organe.
L’intelligence artificielle en santé
Les prouesses dans le développement de l’intelligence artificielle dans les dernières années ont été si rapides que des experts du domaine des technologies ont même demandé un moratoire sur son développement en 2023. Toutefois, même si l’utilisation d’une intelligence artificielle avancée pouvant rivaliser avec l’être humain soulève des questions d’éthique évidentes, son utilisation dans le domaine de la santé pourrait présenter des bénéfices révolutionnaires. Certains scientifiques vont même jusqu’à proposer que cela puisse être la plus grande percée en médecine du 21e siècle.
En effet, les algorithmes sophistiqués mis au point par les ingénieurs en technologie médicale permettent déjà d’émettre des diagnostics plus précis et plus rapides que par des moyens conventionnels. Par exemple, pour le cancer du sein, l’intelligence artificielle permet déjà de réviser et d’interpréter les résultats des mammographies 30 fois plus rapidement et avec un taux de précision avoisinant les 100 %. Ceci permet ainsi de réduire la nécessité de pratiquer des biopsies invasives. Pour le cancer du poumon, un algorithme récemment développé permet de détecter la présence du cancer plus rapidement et avec une meilleure certitude que les interprétations actuelles par les radiologues (17 % d’amélioration, selon une récente recherche). Au final, on ne peut que se réjouir devant ces avancées importantes qui permettront de sauver des vies et de mieux prendre en charge certaines maladies.
La technologie ARNm
L’ARNm (pour acide ribonucléique messager) a constitué le sujet de recherche qui a permis à Jacques Monod et à son équipe de remporter un prix Nobel en 1965. Sa découverte ne date donc pas d’hier ! En gros, cette molécule intermédiaire consiste en une copie transitoire d’une partie de l’ADN de certains gènes d’un organisme vivant. Elle est utilisée comme intermédiaire par les cellules pour synthétiser des protéines aux rôles variés. L’ARNm agit donc à la manière d’un plan ou d’une recette qui permettrait à notre organisme de se préparer à réagir avant même d’avoir été en contact avec un virus, par exemple. Récemment. l’ARNm s’est retrouvé de nouveau sous les feux des projecteurs, puisqu’on a utilisé cette science pour le développement des vaccins préventifs contre la COVID-19. Ces derniers ont montré plusieurs avantages : un haut taux d’efficacité et un potentiel de production rapide jumelé à un coût réduit en comparaison aux technologies de vaccination traditionnelles.
Les vaccins ARNm fonctionnent en fournissant un modèle de codage génétique aux cellules de notre organisme. À partir de ce « plan », celles-ci peuvent produire des protéines, stimulant la production d’anticorps antiviraux. Mais le potentiel de cette technologie prometteuse ne saurait s’arrêter au coronavirus. Les scientifiques sont actuellement en train de l’étudier pour aider à prévenir et à traiter toutes sortes d’autres maladies, des cancers en passant par le Zika.
Un des points forts importants de l’ARNm, c’est qu’il permet à notre propre corps de synthétiser des anticorps, un processus qui se révèle beaucoup moins dispendieux que de produire les anticorps en laboratoire en avance. Cette réduction des coûts entraînée pourrait permettre de diffuser des traitements plus rapidement à travers le monde, entre autres pour les pays dont la situation économique n’est pas aussi aisée que celle des grandes puissances occidentales.
La réalité virtuelle
Certains d’entre vous ont peut-être déjà expérimenté la technologie de réalité virtuelle dans le confort de leur salon. En effet, les casques de réalité virtuelle perfectionnés, quoiqu’encore relativement dispendieux, ont été lancés sur le marché grand public dès les années 2010. Toutefois, il faut savoir que leur utilisation sur le plan médical, particulièrement dans la sphère de la santé mentale, remonte à bien plus loin que cela. Les progrès réalisés dans les dernières décennies en matière de réalisme graphique, de fluidité d’utilisation et d’accessibilité ont fait en sorte que la réalité virtuelle connaît un regain de popularité dans les sciences de la santé. On l’utilise maintenant pour le traitement et la gestion d’un vaste éventail de pathologies et de troubles psychologiques : anxiété, stress, dépression, démence, autisme et douleur persistante.
Cette technologie permet aux patients de s’immerger complètement dans un environnement où leurs sens sont stimulés pour encourager plusieurs réactions du système nerveux et de l’organisme. On peut, par exemple, se transporter sur une plage des Antilles pour méditer et se détendre afin de réduire l’anxiété. Se retrouver sous un soleil d’été radieux en plein hiver, pour les gens touchés par la déprime saisonnière. La personne âgée qui vit en résidence et qui possède une capacité de locomotion limitée peut revivre ses souvenirs en se retrouvant tout à coup en balade en forêt. On peut aussi aider les gens isolés à combattre la solitude en leur permettant d’interagir avec d’autres personnes via cette interface qu’offre la réalité virtuelle.
De plus, la réalité virtuelle peut aussi aider le personnel médical à s’entraîner ou encore à mieux expliquer à leurs patients le fonctionnement de leur corps ou d’une maladie en se projetant littéralement à l’intérieur d’une vue réaliste du corps humain. Certes, le meilleur reste à venir pour l’utilisation de la réalité virtuelle en santé, mais on peut déjà entrevoir des perspectives optimistes dans des domaines aussi variés que les soins, l’oncologie, la douleur persistante, la chirurgie, la gériatrie et la psychologie.
La médecine de précision
Chaque personne est unique. Ainsi, dans un monde idéal, chaque traitement devrait également l’être. La médecine est, plus que jamais, en voie de s’approcher de cette personnalisation fine des interventions. Ainsi, dans des domaines comme l’oncologie, les traitements du cancer se raffinent de plus en plus pour prendre en considération les variabilités génétiques, environnementales et liées aux habitudes de vie de chaque personne. Les médicaments peuvent ainsi être ajustés relativement à la composante, au dosage ou encore à la planification de l’horaire de consommation pour optimiser les résultats sur une base unique individuelle. Les résultats scientifiques attestent déjà de la supériorité de ce type d’approche. Outre l’oncologie, la médecine de précision pourra servir au traitement des maladies auto-immunes, des troubles génétiques rares, de la douleur chronique, et on étudie actuellement les possibilités qu’elle offre pour le traitement des infections. Intégrer la médecine de précision n’est cependant pas sans défis : sa mise sur pied sur une large échelle nécessitera de revoir nos modèles de santé, nos infrastructures ainsi que l’organisation traditionnellement utilisée dans nos systèmes actuellement en place.
RÉFÉRENCES :
Burke, Hannah, Top 10 new medical technologies, Proclinical, 2022,
Autres sources mentionnées dans le texte