Publié le 10 juillet 2016
Écrit par Stéphanie Plamondon, Ac., M. Sc.
Nous l’attendons toute l’année, et voilà enfin que l’été se présente dans toute sa splendeur.
RIEN DE PLUS AGRÉABLE, en effet, que de faire le plein de chaleur et de luminosité estivales. Un trouble-fête peut cependant se présenter et ruiner un pique-nique en famille ou une soirée passée autour du feu, à savoir le redoutable maringouin. En plus d’être désagréable, ce moustique piqueur peut également transmettre certains virus aux humains et aux animaux, dont celui du Nil, de l’encéphalite équine de l’Est et, plus récemment, celui du Zika.
Pour se protéger de ces moustiques et de leurs possibles effets néfastes sur l’organisme, Santé Canada recommande l’application d’un insectifuge contenant du DEET ou d’un autre produit homologué. Cependant, face à la toxicité et à la possible dangerosité du DEET, particulièrement sur la santé des enfants, il est intéressant d’explorer l’efficacité d’autres produits, notamment aromatiques. Pleins feux sur les huiles essentielles antimoustiques !
TOXICITÉ DU DEET
Le DEET (N,N-diéthyl-3-méthylbenzamide) est un produit chimique faisant partie de la famille des toluènes, qui fut utilisé pour la première fois pendant la guerre du Viêtnam afin d’éloigner les moustiques présents en abondance dans les forêts et les campagnes. Il s’agit d’un produit qui fonctionne en bloquant les récepteurs olfactifs des insectes afin qu’ils ne puissent plus parvenir à localiser leur cible (humaine ou animale).
Quoique ces réactions risquent de se manifester suite à un usage fréquent et prolongé d’insectifuges contenant du DEET, ils peuvent aussi survenir lors de la toute première application, particulièrement chez les enfants.
Pour cette raison, les instances gouvernementales limitent et contrôlent étroitement la concentration de DEET présente dans les différents insectifuges retrouvés sur le marché. La toxicité de ces insectifuges tient au fait que 56 % du DEET sont absorbés par la peau et que 17 % traversent l’épiderme pour se rendre jusqu’à la circulation sanguine.
Quelques heures suivant l’application, le DEET peut ainsi se retrouver dans le sang, à une concentration atteignant jusqu’à 3 mg par litre. Les dommages les plus inquiétants qu’il cause sont reliés au système nerveux central. Des études ont en effet démontré que le DEET peut provoquer des déficits locomoteurs, des troubles de la mémoire ainsi que des retards d’apprentissage. Afin d’éviter ces effets néfastes sur la santé des jeunes, des précautions d’usage chez les enfants de 12 ans et moins doivent obligatoirement apparaître sur les contenants des répulsifs contenant du DEET.
Face aux risques que représentent ces insectifuges sur la santé, certains préfèrent plutôt recourir à des répulsifs contenant des extraits botaniques et aromatiques, dont la citronnelle, réputée pour sa grande efficacité.
HOMOLOGATION CANADIENNE DE LA CITRONNELLE
En 2004, Santé Canada a entrepris une réévaluation des répulsifs à moustiques contenant de la citronnelle et a exigé des fabricants qu’ils prouvent la non-dangerosité de cette huile essentielle sur la santé. Cependant, en raison des coûts exorbitants des études nécessaires à cette fin (évalués à plus de 800 000 $), les compagnies produisant un chasse-moustiques à base de citronnelle n’ont pas remis les tests demandés, et Santé Canada a décidé, en 2007, de ne pas renouveler leur homologation et d’interdire la vente de ces produits. Ainsi, tout répulsif contenant de la citronnelle devait être retiré des tablettes à partir du 31 décembre 2014. Cette décision fut décriée par de nombreuses personnes, y compris le NPD.
Pourtant, en 2006, une équipe de cinq chercheurs a démontré que la citronnelle ne représente aucun danger pour la santé. Un des scientifiques siégeant sur le comité de recherche, Sam Kacew, s’est d’ailleurs prononcé publiquement contre cette décision de Santé Canada, qui continuait pourtant d’indiquer sur son site Web que la citronnelle est un produit ne comportant aucune toxicité.
L’inquiétude de Santé Canada repose sur le fait que certaines citronnelles contiendraient du méthyleugénol, une molécule qui serait potentiellement carcinogène. Les compagnies qui produisent des répulsifs à base de citronnelle ont cependant contesté la décision d’en interdire la vente, puisque la citronnelle qu’elles emploient ne contient aucune trace de cette molécule. De plus, le méthyleugénol entre dans la composition de plusieurs mets et pâtisseries sans qu’aucune restriction ne soit imposée quant à son utilisation.
Comme les répulsifs à base de citronnelle ne sont interdits nulle part ailleurs dans le monde, certains ont soupçonné Santé Canada de favoriser le lobby du DEET.
VOLTE-FACE
Face aux nombreuses pétitions et contestations de la part des consommateurs, le 3 décembre 2014, soit moins d’un mois avant le retrait de tous les répulsifs contenant de la citronnelle du marché, Santé Canada est revenu sur sa décision et a admis qu’il devait réviser ses exigences quant à l’homologation de ces produits. Les permis de vente de ces chasse-moustiques ont été reconduits jusqu’en 2020.
PROPRIÉTÉS DE LA CITRONNELLE
La citronnelle contient des molécules qui masquent l’odeur de l’acide lactique produite par le corps et qui attire les moustiques. Ces molécules sont le citronnellol et le géraniol, qui appartiennent à la famille des monoterpénols, et ; le citronnellal, qui appartient à la famille des aldéhydes terpéniques. Elles sont reconnues comme étant très efficaces et non toxiques depuis de nombreuses années, leur première homologation en Amérique du Nord datant de 1943.
Il existe différentes variétés de citronnelles, dont la citronnelle de Java (Cymbopogon winterianus) et la citronnelle de Ceylan (Cymbopogon nardus), toutes deux reconnues pour leurs effets antimoustiques, ainsi que pour leurs propriétés antivirales, relaxantes et anti-inflammatoires.
Le Cymbopogon nardus est la citronnelle la plus utilisée au monde pour fabriquer des insectifuges et des chasse-moustiques. Dans une recherche « bras en cage », il a été démontré que les produits contenant de la citronnelle agissent moins longtemps que ceux à base de DEET, mais qu’en revanche ils ne présentent aucune toxicité. Pour compenser, il est recommandé d’en appliquer plus souvent, soit aux heures.
AUTRES HUILES ESSENTIELLES INSECTIFUGES ?
La citronnelle est certainement l’huile la plus connue et la plus utilisée pour ses effets anti-moustiques. Les recherches indiquent qu’il en existe pourtant d’autres, qui possèdent une activité répulsive tout aussi intéressante et qui peuvent notamment être jumelées à la citronnelle pour accentuer son efficacité.
Notons quelques huiles essentielles supplémentaires ayant démontré une efficacité répulsive intéressante
En revanche, notons certaines huiles essentielles testées n’ayant pas démontré d’activité antimoustiques particulière dans les recherches menées en Thaïlande :
QUELQUES RECETTES ANTIMOUSTIQUES
Il est possible de retrouver sur le marché d’excellents produits répulsifs qui contiennent jusqu’à 10 % de citronnelle : des savons, des lotions et des huiles. Ils sentent merveilleusement bon et sont homologués par Santé Canada. Des chasse-moustiques efficaces et sécuritaires peuvent également être fabriqués à la maison, dont voici quelques recettes.
Chasse-moustiques dans une base d’huiles végétales
Bouteille à vaporisateur de 100 ml
Durée de vie : 1 an
Huiles essentielles (concentration : 5 %)
Bien mélanger les huiles végétales et essentielles et verser dans une bouteille. Vaporiser sur la peau toutes les heures (jusqu’à une limite de 6 fois par jour).
Chandelle antimoustiques à base de soya
Un contenant de 50 g en verre ou en céramique
50 g cire de soya sans OGM
Une mèche
Huiles essentielles (concentration : 5 %)
Dans une petite casserole en acier inoxydable, faire fondre la cire de soya à feu très, très doux. Lorsqu’elle est fondue, y plonger un thermomètre ; ajouter les huiles essentielles quand le mélange indique 38 °C ou moins.
Placer la mèche au fond du contenant.
Verser doucement la cire, en tenant le bout de la mèche entre le pouce et l’index. Laisser figer la cire au réfrigérateur.
Allumer pour un effet antimoustiques efficace et agréable (ne pas remplacer la cire de soya par celle d’abeille puisque sa chaleur est plus élevée, ce qui endommagerait les huiles essentielles).
Antimoustiques pour animaux, à base de poudre
Contenant : salière
Durée de vie : 1 an
Huiles essentielles (concentration : 3 %)
Dans un bol, bien mélanger les poudres. Ajouter les huiles essentielles, et à l’aide d’une fourchette, triturer le mélange. Placer la poudre dans une salière et saupoudrer le pelage de l’animal. Répéter aux heures, jusqu’à un maximum de 3 applications.
Chasse-moustiques à diffuser
Dans un diffuseur ou un nébuliseur, placer les huiles essentielles suivantes :
Faire diffuser le mélange pendant 20 minutes. Répéter aux heures.
Et si un moustique sanguinaire parvenait malgré tout à se frayer un chemin parmi les effluves aromatiques, les huiles essentielles s’avèrent tout aussi efficaces pour calmer l’inflammation et la démangeaison qui en résulteraient.
Formule apaisante antipiqûres
Rendement : 5 ml
Placer les huiles essentielles dans une bouteille en verre ambré avec bouchon à codigouttes. Bien secouer le flacon. Appliquer 1 goutte de formule sur une piqûre de moustique afin d’en accélérer la guérison. Répéter au besoin jusqu’à diminution des démangeaisons.
Les huiles essentielles représentent une solution de rechange efficace, sécuritaire et biodégradable, en comparaison à la toxicité des produits à base de DEET. De plus, elles sont une solution peu coûteuse pour les populations des pays qui sont aux prises avec des maladies transmises par les moustiques. À part la citronnelle, plusieurs huiles essentielles sont à explorer et à essayer, afin de nous assurer un été à l’abri de ces moustiques voraces. Bonnes vacances !
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