Vaincre les dorsalgies par la thérapie manuelle et la réeducation posturale

Publié le 20 mars 2018
Écrit par Nicolas Blanchette, B. Sc. kinésiologie, D.O.

Vaincre les dorsalgies par la thérapie manuelle et la réeducation posturale
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Le terme « dorsalgie » fait référence aux douleurs qui sont ressenties dans la zone du milieu du dos.

 

Plus précisément, la dorsalgie touche les tissus mous (peau, muscles, nerfs, ligaments, etc.) qui se rapportent à la partie dorsale (ou thoracique) de la colonne vertébrale. On différencie ce type de douleurs de celles qui peuvent gêner le bas du dos (lombalgie) ou le cou (cervicalgie). Elles sont très communes et se manifestent la plupart du temps sans événements déclencheurs évidents. Elles impliquent souvent des déséquilibres posturaux ou des troubles psychoémotifs. Chaque cas doit être traité de manière individualisée après un examen minutieux. Fait étonnant, la résolution du problème passe parfois par le traitement de zones réflexes plus éloignées.

  

ANATOMIE 101 DE LA RÉGION DORSALE

Cette section de notre rachis est particulière. Ses 12 vertèbres servent de points d’ancrage aux 12 paires de côtes qui protègent nos poumons et notre cœur. La région dorsale est donc impliquée dans l’activité respiratoire. À l’inverse de la région lombaire et cervicale, la courbure de la colonne thoracique est normalement convexe (bombée) plutôt que concave (creuse). Certaines variations posturales peuvent surcharger le système musculosquelettique et créer des zones transitionnelles d’inconfort, particulièrement à la jonction entre la région lombaire ou la région cervicale.

 

DÉCONDITIONNEMENT MUSCULAIRE

On qualifie d’« hypercyphosée » une courbure dorsale très accentuée, donnant l’impression d’un dos voûté. Ce sont les muscles paraspinaux, de petits muscles très endurants reliant les vertèbres entre elles, qui sont responsables de maintenir la colonne vertébrale bien érigée. Lorsqu’ils s’activent correctement, ils donnent l’impression d’une silhouette élancée, légère et résiliente contre le poids de la gravité. Le fait d’adopter un maintien « grand » est donc une manière efficace d’entraîner ces petits muscles. Malheureusement, nous leur imposons souvent des contraintes sans le savoir.

Être assis de longues heures de manière ininterrompue pour écrire ou consulter un écran d’ordinateur (ou pire, un portable ou un téléphone intelligent !) nous fait adopter des postures qui, aidées par la fatigue, participent à un affaissement général de la colonne vertébrale. Un maintien de la tête loin devant le thorax, comme lorsque l’on fixe un écran de manière concentrée, place aussi un stress important sur les muscles cervicaux et encourage un arrondissement de la région dorsale haute. Ces habitudes créent un déconditionnement des muscles paraspinaux, c’est-à-dire un affaiblissement qui rend leur activation de plus en plus difficile au fil du temps. Ainsi, à mesure que le temps passe, la colonne vertébrale finit par ployer, produisant un dos voûté. Telle une grande toile qui couvrirait le dos, les tissus mous comme les muscles et les fascias se trouveront alors dans une position d’étirement constant.

Ils réagiront à ce désavantage mécanique en durcissant et en formant plusieurs points de tension dans un effort pour résister à l’effet de la gravité. Le nerf dorsal scapulaire, responsable des muscles rhomboïdes, pourrait même être irrité, envoyant de la douleur près des omoplates. C’est le début d’un cercle vicieux de dorsalgie.

Lors de ce type de problème, l’exercice et le mouvement sont au cœur de la solution. Il faut chercher à maintenir une attitude d’« autograndissement » aussi fréquemment que possible. La marche consciente, en regardant bien devant soi, est un exercice tout simple qui participe à l’activation des muscles paraspinaux (la marche, téléphone cellulaire à la main, ne procure malheureusement pas cet effet bénéfique). Lors de séances de thérapie manuelle, il est possible de stimuler les muscles paravertébraux avec les doigts. Les exercices doivent avoir leur place dans tout programme de traitement et de prévention des dorsalgies.

Bien sûr, l’être humain étant un tout indissociable dans ses sphères physique, mentale et émotionnelle, certaines épreuves peuvent aussi entraîner un affaissement de la colonne dorsale. C’est le cas de la dépression, par exemple, avec son attitude d’abattement caractéristique. Tout comme le corps physique, l’aspect psychoémotif demandera alors aussi une attention appropriée.

 

HYPERTONICITÉ

L’autre déviation posturale, un peu moins commune, montre une région dorsale très arquée. En effet, au lieu de la courbure convexe normale, l’ensemble de la région dorsale présente très peu de bombement, voire un aspect creux. C’est la posture associée à l’hypervigilance et un maintien rigide, « militaire ». Dans ce type de posture, les muscles paravertébraux et les longs muscles érecteurs du rachis sont dans un état hypertonique pouvant amener, à la longue, une surfatigue musculaire ou un pincement des articulations intervertébrales. Ce type de dorsalgie bénéficiera beaucoup des massages profonds axés sur une détente globale générale. Un travail sur la gestion de l’anxiété, voire une approche en psychologie, est souvent aussi recommandé pour réduire l’hypervigilance, que cette dernière soit consciente ou inconsciente (à la suite d’un ancien traumatisme, par exemple).

 

DOULEUR MYOFASCIALE RÉFÉRÉE

Les douleurs myofasciales sont causées par des points de tension (points gâchettes) qui sont formés à la suite de divers stress que subissent la musculature et les tissus mous environnants. Elles ont pour particularité de produire très fréquemment une douleur que l’on dit « référée ». Par exemple, il est étonnant de constater que la première cause de douleur myofasciale référée dans la région du haut du dos et entre les omoplates provient de points gâchettes situés au niveau des muscles à l’avant du cou. Plus particulièrement, il s’agit d’un groupe de muscles qui stabilise la région cervicale et aide à la respiration : les scalènes.

Ce symptôme est extrêmement commun ; en effet, selon le rhumatologue français Robert Maigne, les tensions au niveau des muscles scalènes sont retrouvées plus fréquemment comme source d’inconfort aux omoplates qu’autour de celles-ci. Les points gâchettes au niveau des scalènes s’accompagnent souvent d’une sensation de fatigue perpétuelle du cou, de rigidité de la région cervicale, voire de douleurs référées aux bras et à la poitrine (névralgie). Un maintien de la tête vers l’avant ou encore un stress chronique, puisqu’ils modifient le cycle respiratoire, peuvent être à la source d’un surtravail des scalènes et de la formation de points gâchettes dans ces derniers. La thérapie manuelle par un professionnel est un excellent moyen de délier ces structures délicates tout en encourageant une détente globale de l’organisme et l’enseignement de saines habitudes d’ergonomie.

 

AUTRES CAS

Finalement, il faut rester vigilant devant des dorsalgies inhabituelles qui s’accompagneraient de douleurs très aiguës ou qui ne répondraient à aucun traitement. En effet, bien qu’il s’agisse de symptômes plus rares, certains troubles, incluant les cancers, les affectations pancréatiques, cardiaques ou pulmonaires, de même que les ulcères d’estomac, peuvent s’accompagner de dorsalgies. En cas de doute, particulièrement si les maux de dos s’accompagnent d’autres symptômes comme des nausées, des douleurs aiguës à la poitrine ou au ventre, il vaut mieux toujours obtenir l’avis de son médecin.

 

RÉFÉRENCE

DAVIES, CLAIR, TPT Workbook, 2001.